Photographie/Techniques particulières/Mémoires photographiques

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Cet article concerne l'utilisation des procédés argentiques ou plus généralement photochimiques dans des systèmes d'enregistrement de données, et non les mémoires utilisées pour stocker les images numériques.


Qu'est-ce qu'une mémoire ?

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Les systèmes de mémoires sont chargés de recevoir des informations, de les conserver et de les restituer à la demande. Dans les machines et autres systèmes techniques, les données sont enregistrées sous forme matérielle par des procédés fort divers, qui peuvent être mécaniques, chimiques, magnétiques ou électromagnétique, optiques, etc. Les mémoires se différencient donc par la nature du support utilisé, par les phénomènes mis en jeu et leur caractère permanent ou temporaire. Dans de nombreux cas, les informations enregistrées peuvent changer de support sans subir aucune altération.

Contrairement au cerveau humain, dont les capacités de mémorisation sont certainement finies mais dont nul ne peut connaître les limites, les systèmes de mémoires mis au point par l'homme sont « géométriquement + définis, en ce sens que leur capacité de stockage des informations est parfaitement quantifiable et quantifiée.

Les mémoires statiques sont ainsi nommées car leur contenu est immuable, tandis que les mémoires dynamiques contiennent des informations susceptibles de changer à tout moment. Par exemple, la position des picots sur le cylindre d'une boîte à musique permet de mettre en mémoire une mélodie qui ne changera pas par la suite, tandis que la position d'un relais électromagnétique peut basculer à la demande.

Premières réalisations

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Les premières mémoires étaient mécaniques, comme celles qui étaient utilisées pour animer les automates des siècles passés. Par la suite on a largement utilisé les bandes perforées pour faire fonctionner les orgues de Barbarie, les pianos mécaniques ou les métiers à tisser servant à réaliser des brocarts et autres étoffes dont les dessins sont réalisés directement par le mode d'entrecroisement des fils qui les constituent.

Les ordinateurs des années 1950 et 1960 utilisaient largement des paquets parfois énormes de cartes perforées sur lesquelles on enregistrait des informations et des programmes. Chaque carte permettait de stocker 80 caractères et le terme de « fichier » était alors parfaitement justifié par la forme des bacs où l'on stockait ces sortes de « fiches », réalisées dans une qualité spéciale de carton léger et résistant appelée « mécanocarte ». Afin de permettre le déroulement des calculs, les informations statiques supportées par les cartes étaient chargées dans des mémoires dynamiques magnétiques comportant des milliers de minuscules tores de ferrite enfilés sur des réseaux de fils conducteurs. D'innombrables ouvrières asiatiques ont pratiquement perdu la vue au cours de la réalisation de ces mémoires.

Dans les années 1970, la plupart des machines-outils à commande numérique étaient encore commandées par des bandes perforées contenant, sous forme codée, les diverses instructions correspondant aux phases successives de l'usinage des pièces mécaniques, du pliage des tôles, du cintrage des tubes, etc.

Utilisation de procédés photographiques pour stocker des données

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L'utilisation de procédés photographiques pour réaliser des mémoires est beaucoup moins connue. Elle repose sur la capacité qu'ont les émulsions photographiques d'enregistrer des images très fines, grâce à leur définition élevée. On a pu ainsi réaliser des mémoires non effaçables à haute capacité en inscrivant les informations sous forme de diagrammes constitués d'une juxtaposition de plages opaques ou transparentes dont chacune correspond à une quantité élémentaire d'information codée sous forme binaire, dite en anglais « binary digit », plus couramment abrégé en « bit ».

Il est théoriquement possible avec les meilleures émulsions de réaliser des enregistrements comportant jusqu'à 108 bits/cm2, mais les difficultés pratiques sont considérables. La lecture optique de telles surfaces est obtenue par un balayage analogue à celui que l'on utilisait pour les écrans cathodiques de la télévision ou des ordinateurs, avant la généralisation des écrans plats. On utilise un pinceau cathodique mobile produisant un spot lumineux associé avec une cellule photoélectrique et un tube photomultiplicateur, de façon à obtenir un signal utilisable. La source lumineuse est peu intense et le niveau du signal est réduit, ce qui peut engendrer des bruits et des erreurs de lecture ; il faut donc prévoir un codage permettant la détection et la correction automatiques des erreurs. Cette difficulté se rencontre d'ailleurs dans la lecture de tous les supports d'information à haute densité, y compris bien entendu les enregistrements sur nos disques durs et autres mémoires-flash.

Le nombre des informations utilisables dépend finalement de la finesse du spot lumineux. Pour les plus hautes densités il faut utiliser un support mobile sous forme de disque ou de cylindre et un système de lecture fixe. On ne peut alors plus accéder à toutes les informations en même temps, mais on les lit les unes à la suite des autres. On passe d'un système « parallèle » à un système « série ».

Applications concrètes

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Les premières applications des machines fonctionnant selon ce principe, comme le Sceptron états-unien (Spectral Comparative Pattern Recognizer) ont permis par exemple de transformer directement la sténotypie en caractères imprimés, évitant ainsi le passage par l'étape intermédiaire de la dactylographie.

La mémoire photo-digitale IBM à plaquettes photosensibles pouvait emmagasiner jusqu'à 1018 bits, une quantité d'information qui aurait nécessité plus d'un million de cartes perforées, représentant une masse de plusieurs tonnes. Les plaquettes utilisées par la machine IBM ont des dimensions de 3,3 x 6,8 cm et portent environ 5.000.000 bits. Elles sont exposées sous vide non pas par la lumière, mais par un faisceau d'électrons dont la position est déterminée à tout instant par un système de focalisation approprié. Elles sont développées, fixées, lavées et séchées à l'intérieur du système lui-même, puis placées dans des cellules protectrices en matière plastique qui contiennent 32 plaquettes.

L'enregistrement des données de la commission de l'Énergie Atomique Américaine, réalisé avec le système IBM, aurait nécessité autrement plus d'un milliard de cartes perforées qui, mises bout-à-bout, auraient fait quatre fois le tour de la Terre.

Autres procédés

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Les mémoires photographiques ne font pas toutes appel aux propriétés des sels d'argent, on a également fait des essais avec des matières photochromiques capables de se colorer de façon temporaire sous l'effet des rayonnements lumineux, en particulier ultraviolets. Les inscriptions perdurent pendant un temps variable et on peut les effacer par échauffement ou irradiation ; on peut en enregistrer un très grand nombre en raison de l'absence totale de grain, contrairement aux émulsions argentiques. Cependant, les recherches pour réaliser des mémoires optiques dynamiques sont restées au stade du laboratoire en raison du développement d'autres techniques plus efficaces.

Le gros défaut des systèmes où l'information est inscrite sous forme de petites taches est leur grande sensibilité aux poussières et autres impuretés. Ce problème est résolu de façon très efficace en utilisant la lumière cohérente du laser qui permet d'obtenir des hologrammes où l'information n'est plus localisée en des points précis mais en quelque sorte dispersée sur toute la surface sensible. Dans le système proposé par la société états-unienne Precision Instrument Company, on sort du domaine purement photographique car le laser est utilisé pour inscrire sur le support de stockage des « trous » minuscules dont le diamètre est de l'ordre du micron.

Naturellement tous ces systèmes seraient totalement inefficaces si on ne les associait pas avec des procédés d'indexation permettant de retrouver très vite les données enregistrées. L'un des plus connus a été le système Miracode, mais on sort ici du domaine de la photographie pour entrer dans celui de la documentation.

  • HÉMARDINQUER, Pierre .- Une application de la photographie, les mémoires photographiques. In : Photo-Ciné-Revue, décembre 1968, pp. 536-540.


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