Psychologie cognitive pour l'enseignant/Exercices et exemples : comment rendre la pratique efficace ?

Apprendre à résoudre des problèmes est un point crucial dans certaines disciplines. Qu'il s'agisse de problèmes mathématiques, de problèmes de physique, d'exercices de biologie, etc; les mécanismes mentaux de résolution de problème sont presque toujours les mêmes, et les connaître permet de déduire des recommandations pédagogiques diverses et variées. Or, la charge cognitive va aussi jouer dans l'acquisition de stratégies ou de procédures, et pourra diminuer l'efficacité des exercices donnés aux élèves. Dans ce qui va suivre, nous allons voir quelles recommandations peut nous donner la théorie de la charge cognitive quand il s'agit de résolution de problème.

Les stratégies de résolution de problèmes

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Résoudre un problème demande d'utiliser ses connaissances, ou de mobiliser des procédures connues pour les appliquer. Il est donc évident que connaître les connaissances et procédures nécessaires est un pré-requis absolu pour résoudre des problèmes. Mais cela ne suffit pas, mobiliser ses connaissances demandant de pouvoir activer les connaissances et procédures quand c'est nécessaire ou pertinent. Cela demande des connaissances conditionnelles, qui indiquent quand il faut mobiliser telle ou telle connaissance/procédure/stratégie/méthode, etc.

Les stratégies de réflexion d'un expert

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Seul l'expert a pu forger, avec son expérience, de telles connaissances conditionnelles, qui lui permettent d'appliquer ses connaissances de manière efficace. Elles lui permettent d’accéder aux informations pertinentes pou résoudre un problème sans avoir à réfléchir, en se basant uniquement sur leur mémoire. Ces connaissances prennent la forme de schémas (le terme a plusieurs sens en psychologie cognitive), des catégories de problèmes qui sont reliées aux informations pertinentes pour leur résolution. C'est grâce à eux que l'expert peut reconnaître si un problème correspond ou non à une situation connue. Ces schémas sont reliés aux connaissances et aux concepts nécessaires pour résoudre le problème. Ils sont aussi reliés à des procédures de résolution, ce qui permet d'appliquer des solutions stéréotypées à une classe de problème bien précise sans avoir à formuler d'hypothèses.

Pour donner un exemple, on va prendre l'exemple d'un joueur de Football professionnel, qui doit gérer à tout moment sa position sur le terrain et ses actions en fonction de divers paramètres tactiques. Ce Footballer a mémorisé lors de son entraînement une grande quantité de configurations de jeu, chacune d'entre elle étant reliée à une solution tactique stéréotypée. La même chose a lieu chez les joueurs d'échec : ils ont mémorisé un grand nombre de configurations de jeu, chaque configuration étant reliée au meilleur coup à jouer. Ce genre de chose permet aussi d’expliquer les performances en mathématique ou en physique de nombreux élèves.

Les stratégies de réflexion d'un novice

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Cette mobilisation efficace n'est pas à la portée du novice, même si celui-ci dispose des connaissances et procédures nécessaires. Celui-ci a beau savoir comment faire, il ne dispose pas des schémas sus-mentionnés et ne sait donc pas quand utiliser telle procédure/connaissance. Sans connaissances conditionnelles, un novice n'a accès qu'à quelques stratégies générales, comme procéder par analogie ou par essais et erreurs. Ces stratégies générales fonctionnent quelle que soit la situation, mais on ne peut pas dire qu'elles soient efficaces. Elles demandent une certaine réflexion et utilisent donc la mémoire de travail. Dans les grandes lignes, il existe deux stratégies générales de ce type, outre l'analogie : le Hill Climbing et la Means-End Analysis. Les deux fonctionnent par essais et erreurs, le sujet formulant des hypothèses et décomposant le problème en sous-problèmes.

Avec le Hill climbing, l’élève va partir des données du problème pour progressivement se rapprocher de la solution : il va planifier la suite d’étapes en partant des données du problème. À chaque étape, l’élève vérifie s’il s’est approché de la solution : si c’est le cas, il continue à partir de l’étape obtenue, et revient en arrière sinon.

Ce Hill climbing est souvent comparé avec une de ses variante : la Means-end analysis. Avec celle-ci, le sujet peut décomposer le problème en sous-problèmes. Dans le cas le plus courant, l’élève va partir du but demandé, pour poursuivre à rebours vers les données du problème. Lors de ce parcours à rebours, chaque étape va créer un nouveau sous-problème à résoudre, sous-problème qui sera résolu avec la même méthode, et ainsi de suite : le problème est résolu quand on atteint un sous-problème peut être résolu directement à partir des données du problèmes.

Prenons l’exemple suivant :

   y = x + 6, x = z + 3, et z = 6. Trouvez la valeur de y.
  • Un novice va se focaliser sur le but : trouver la valeur de y.
  • Il va d’abord lire y = x + 6. Il va alors chercher à résoudre le sous-problème : trouver x.
  • Il va ensuite lire x = z + 3. Il va alors chercher à résoudre le sous-problème : trouver z.
  • Enfin, il va lire z = 6, et il va rembobiner le tout.

La résolution d'un problème par analogie

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L'analogie est une méthode de résolution de problème générale, au même titre que les deux précédentes. L'analogie permet de reconnaître qu'un problème est analogue à une situation déjà rencontrée. Celle-ci est utilisée à la fois par les sujets intermédiaires/novices et les experts, avec toutefois une petite différence : les novices utilisent des analogies inefficaces, contrairement aux experts.

Les sujets peu performants utilisent des analogies de surface, où les situations source et cible partagent des caractéristiques de surface, des éléments qui peuvent être remplacés par d'autres sans que cela change la manière de résoudre le problème. Par exemple, les deux problèmes qui vont suivre sont analogues du point de vue de l'analogie de surface, vu que leurs énoncés partagent les mêmes mots/concepts et valeurs numériques, mais ne se résolvent pas de la même manière :

   Paul possède 50 euros, il en donne 3 à Vanessa, combien Paul a-t-il d'argent ?
   Paul possède 50 euros, Vanessa lui en donne 3, combien Paul a-t-il d'argent ?

En comparaison, les sujets performants utilisent des analogies structurales où les relations des deux situations peuvent être mises en correspondance. Par exemple, les deux problèmes qui vont suivre sont analogues du point de vue de l'analogie structurale et se résolvent de la même manière, mais ne sont pas analogues du point de vue de l'analogie de surface :

   Paul possède 50 euros, il en donne 3 à Vanessa, combien Paul a-t-il d'argent ?
   Un patron possède 20 usines de fabrication de composants électroniques, il se fait racheter 5 de ses usines par un concurrent, combien lui en reste-t-il ?
   Un oiseau a pondu une vingtaine d’œufs. Au total, 7 œufs se font manger par des prédateurs avant d'éclore. Les œufs ont éclos, combien de poussins sont nés ?

Là ou les analogies de surface demandent simplement de remarquer des points communs, les analogies profondes permettent de reconnaître des catégories de problèmes qui se résolvent d'une certaine façon. Le traitement des sujets performants se base donc plus sur un traitement conceptuel que sur la simple présence de points communs entre les deux situations. Mais ce traitement conceptuel n'est possible que parce que les sujets performants ont abstrait des structures mentales élaborées, qui permettent de reconnaître des types de problèmes bien précis. Ces catégories de problèmes sont de plus connectées à la procédure de résolution du problème. Le tout, la somme catégorie et procédure, est appelée un schéma dans la littérature sur la résolution de problèmes.

Des méthodes de raisonnement différentes

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Pour résumer, novices et experts n'utilisent pas les mêmes méthodes de raisonnement face à des problèmes identiques. Les débutants font appel à des méthodes faibles, qui ont un caractère général, et peuvent s'appliquer à de très nombreuses situations, si ce n'est toutes. Mais ces méthodes faibles sont peu performantes, non seulement parce qu'elles saturent la mémoire de travail, mais aussi parce qu'elles n'utilisent pas les connaissances du sujet. Ces méthodes sont les seules utilisables chez les sujets qui ne disposent pas de connaissances utiles pour résoudre la tâche demandée. Autant dire que les sujets experts peuvent utiliser des méthodes fortes, qui font usage des connaissances acquises et notamment des schémas. Seules les connaissances acquises leur permettent d'utiliser ces méthodes, que ce soit par usage de l'analogie ou de schémas.

Cependant, l'usage des méthodes faibles par le novice peut interférer avec l'apprentissage. En effet, les méthodes faibles utilisent fortement la mémoire de travail, pour mémoriser les buts et sous-buts à résoudre, et planifier les différentes étapes à effectuer. On peut alors se demander, compte tenu de cette occupation de la mémoire de travail, comment se forment les schémas. Quelques chercheurs ont suggéré, autrefois, que les schémas s'apprenaient à force de pratique, par l'action. Mais la formation de schémas demande une certaine forme d'abstraction, qui utilise les ressources de la mémoire de travail. Dans ces conditions, l'usage des stratégies générales nuit à l'acquisition des schémas. L'élève qui résout un problème est dans une situation de double-tâche : il doit non seulement résoudre le problème, mais aussi former les schémas nécessaires à l'apprentissage. Limiter la surcharge de la mémoire de travail lors de la résolution d'exercice facilite donc l'abstraction de schémas. Les premières expériences sur le sujet, réalisées par Sweller, montrent que ce phénomène est une réalité, ont d'ailleurs posées les bases de la théorie de la charge cognitive. Dans ce qui va suivre, nous allons voir comment diminuer la charge cognitive lors de la résolution de problème.

L'apprentissage de la procédure, avant les exemples et exercices

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Avant de passer aux exemples et aux exercices, il est possible de fournir quelques explications qui aident l'élève à mieux réaliser les exercices. Ces explications sont implicites, dans le sens où un élève qui a mémorisé la procédure et sait la réaliser ne connaît pas forcément ces informations. Par exemple, un élève qui sait multiplier sait reconnaître les types de problèmes qui se résolvent par multiplication, mais il aura du mal à expliquer pourquoi il faut multiplier pour tel problème et pas pour tel autre. Il le sait, mais cette connaissance reste implicite, non verbalisable. De même, il ne sait peut-être pas ce qui se cache derrière la procédure de multiplication, pourquoi on procède en enchaînant telle étape avec telle étape. Pourtant, ces informations sont utiles pour l'élève et lui permettent de mieux réussir les exercices. Il faut donc les expliciter, les enseigner verbalement aux élèves.

Découper les procédures en sous-procédures

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Quelques études recommandent de découper une procédure complexe en sous-procédures simples. L'idée est ici de regrouper certaines étapes consécutives de la procédure, en faisant en sorte que le regroupement soit logique. Les étapes regroupées doivent former une sous-procédure qui donne un résultat interprétable. Le résultat donné par le regroupement d'étape doit avoir une interprétation logique, il doit avoir un sens. En faisant cela, la sous-procédure sera vue comme un seul item en mémoire de travail et les élèves auront moins de mal à mémoriser l’enchaînement des étapes de la procédure. Par exemple, on peut imaginer segmenter une procédure de huit étapes en deux sous-procédures de quatre étapes. Ce faisant, on apprend les quatre étapes de chaque procédures indépendamment, puis on apprend à enchaîner les deux sous-procédures. La charge cognitive est alors répartie dans le temps. Ou encore, pour une procédure de 10 étapes, on peut imaginer regrouper les quatre premières dans une sous-procédure. Ce faisant, on peut apprendre à l'élève la sous-procédure, avant de l'utiliser pour réaliser la procédure complète.

Par exemple, on peut imaginer le cas d'une procédure de plusieurs étapes, dont les premières sont regroupées dans une sous-procédure, sous-procédure dont le résultat sert de base à la suite. La sous-procédure peut recevoir son propre nom, être séparée visuellement de la procédure complète, ou tout autre séparation entre la sous-procédure et le reste de la procédure complète. Les études de Catrambone montrent les bienfaits qu'il y a a identifier une sous-procédure dans une procédure plus complexe.

Son étude de 1990 portait sur l'enseignement de procédures statistiques bien précises. Dans cette étude, des étudiants d'université devaient apprendre des manipulations statistiques impliquent la distribution de Poisson. Les étudiants étaient regroupés en deux groupes : un où les exemples mettaient en avant les sous-procédures et les sous-buts via des annotations, et un autre avec des exemples avec la procédure complète sans les annotations. Par la suite, les étudiants étaient testés sur deux exercices semblables aux exemples étudiés, et quatre exercices conceptuellement similaires, mais dont la résolution se faisait différemment mais faisait usage des sous-procédures. Sans mettre l'accent sur des sous-procédures, les sujets n'arrivaient pas à utiliser ce qu'il avaient appris pour résoudre les exercices un peu différents. Mais ils y arrivaient si l'expérimentateur indiquait quelles étapes de la procédure pouvaient se regrouper, avec des annotations.

Dans des études ultérieures, Catrambone documenta deux outils très importants pour mettre en avant les sous-buts et les sous-procédures. Leur but est de mettre en avant la séparation entre la sous-procédure et le reste de la procédure, de l'expliciter.

  • Premièrement, donner un nom, un titre ou tout autre label verbal à la sous-procédure ou à son résultat. Et le simple fait de lui donner un nom suffit, même si son sens n'est pas compris par les élèves. Le nom seul indique à l'élève qu'il faut regrouper certaines étapes de la procédure complète et suffit pour extraire la sous-procédure. Et ce même si le sens de la sous-procédure ou son résultat n'ont pas d'interprétation claire et semblent arbitraires. Au pire, l'élève peut essayer de lui-même de trouver une explication aux faits que les étapes puissent se regrouper, ce qui rend les explications parfois superflues. Évidemment, il est toujours utile de donner un sens au regroupement, quitte à donner quelques explications, même si le label en lui-même suffit souvent.
  • Deuxièmement, dans le cas d'exemples présentés sous forme de textes, il ne faut pas hésiter à donner des indices visuels. Ces indices doivent indiquer que telles étapes forment une sous-procédure. Le simple fait de séparer la sous-procédure du reste par des interlignes est une solution possible.
Formellement, ce conseil aurait eu toute sa place dans le chapitre "Réduire la charge cognitive intrinsèque". Après tout, ce conseil se base sur le processus de regroupement, comme toutes les autres méthodes de réduction de la charge cognitive intrinsèque. Mais j'ai préféré le placer ici car c'est un conseil qui ne s'applique qu'aux procédures, sujet de ce chapitre. Alors que les conseils du chapitre sur la charge intrinsèque s'appliquent surtout aux connaissances conceptuelles, factuelles ou verbale.

Expliquer pourquoi on passe d'une étape à une autre

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Un autre conseil est d'expliquer non seulement comment passer d'une étape à une autre, mais aussi pourquoi on fait ainsi. Une expérience, réalisée en 2006 par van Gog, Paas, et van Merriënboer, a montré que les exemples qui indiquaient juste quel opérateur appliquer à chaque étape ne sont pas les plus efficaces, et qu'il vaut mieux expliquer pourquoi tel opérateur est appliqué pour passer à l'étape suivante. On pourrait donner à cette observation le nom d'effet de justification.

Expliciter les catégories de problèmes

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Un autre conseil est d'expliciter les différents types de problèmes, de montrer que les problèmes peuvent se ranger dans quelques types bien précis. Il peut être utile de modifier les exercices de manière à ce que l'élève doive identifier ou nommer le type de problème auquel il est confronté avant de tenter de le résoudre. Le premier exemple est celui de l'apprentissage des quatre opérations fondamentales : addition/soustraction, et multiplication/division. Il existe une méthode d'apprentissage du calcul qui explicite au maximum les différentes catégories de problèmes mathématiques qui se résolvent avec une addition/soustraction ou une multiplication/divisions : on l'appelle sous le nom anglais de Schema Based Intervention.

Mais nous avons vu dans les chapitres précédents que former des catégories était un processus relativement compliqué, et que donner des définitions ne suffisait pas. Les catégories doivent être illustrées avec des exemples, et éventuellement des contre-exemples. Et les catégories/types de problèmes ne font pas exception. D'où l'utilité des méthodes qui vont suivre.

L'usage d'exemples résolus ou partiellement résolus

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La seconde méthode consiste à présenter des exemples de problèmes résolus à l’élève, que l’on appelle des exemples travaillés. Ces exemples travaillés sont des exemples d’exercices que le professeur résout devant les élèves, ou dont il fournit la solution détaillée. En présentant ces exemples, le professeur pense à haute voix, montre explicitement comment il résout le problème, montre bien quelles sont les étapes de résolution et comment il les enchaîne, il explicite ses raisonnements, etc. Expérimentalement, ces exemples travaillés sont systématiquement plus efficaces que de passer directement aux exercices : on parle d’effet des exemples travaillés (worked exemples effect).

La raison est simplement que les exemples travaillés ont une charge cognitive inférieure à celle de la résolution d'un exercice. Lors de la résolution de l’exercice, l'élève se retrouve à utiliser sa mémoire de travail à la fois pour résoudre le problème, mais aussi pour mémoriser ce qu'il faut. De plus, la résolution de l'exercice utilise des méthodes faibles pour résoudre le problème, qui saturent sa mémoire de travail. Écouter le professeur résoudre des exemples, ou simplement lire l'exemple sur papier, n'a pas ce problème : toute la mémoire de travail est utilisée pour la compréhension de la solution.

Les études sur les exemples résolus ou partiellement résolus

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L'effet se manifeste pour de nombreux domaines, mais le domaine le plus étudié est de loin les mathématiques. En 1985 et 1987, Sweller and Cooper ont testé l’efficacité des exemples travaillés dans l’apprentissage de manipulations algébriques. Par la suite, une étude faite par Carroll (1994), a reproduit ces résultats et a montré que l’usage d’exemples travaillés donne de bons résultats sur des étudiants faibles ou avec des difficultés lors de l’apprentissage mathématique. Paas (1992) a ensuite validé cet effet sur des problèmes de statistique. Ce même auteur a aussi validé cet effet pour des exercices de géométrie avec une autre étude avec son collègue van Merriënboer, en 1994.

On pourrait croire que les exemples travaillés sont surtout utiles pour les domaines bien structurés, dans lesquels il y a des procédures algorithmiques strictes, comme les mathématiques, les sciences, l'informatique, etc. Mais d'autres études ont répliqué l'effet des exemples travaillés dans des domaines non-scientifiques. Par exemple, Owens et Sweller ont montré, dans leur étude de 2008, que les exemples travaillés pouvaient être utilisés dans des cours de musique. D'autres études datée de 2007, réalisées par Diao, Chandler, et Sweller, ont montré que l'apprentissage d'une seconde langue bénéficiait aussi de l'usage d'exemples travaillés.

 
Exemple travaillé (en anglais) sous forme écrite, pour un problème de géométrie.

D’autres expériences ont évalué l’efficacité des exemples partiellement travaillés dans lesquels le professeur résout partiellement les exercices présentés et laisse les élèves finir. Expérimentalement, on peut constater que cela donne de bons résultats sur pas mal d’élèves. C’est ce qu’on appelle le problem completion effect. Cet effet a notamment été étudié par Van Merriënboer (1990), pour l’apprentissage de la programmation informatique. Dans son étude, il a comparé deux classes : une qui recevait un enseignement dans lequel les élèves devaient créer eux-mêmes des morceaux de programmes, et une autre qui devait modifier et étendre des programmes existants. Après une période de dix leçons, les deux classes étaient invitées à créer des programmes dans leur intégralité. Le groupe à base d’exemples partiellement travaillés avait les meilleurs résultats. Ces résultats ont été reproduits dans une étude faite par Van Merriënboer et de Croock (1992). Dans cette étude, les élèves étaient encore répartis en deux groupes : un dans lequel les élèves devaient créer totalement des programmes, et un autre dans lequel les élèves devaient terminer des programmes partiellement écrits et remplir les blancs.

Le contenu des exemples travaillé doit être varié

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La théorie de la charge cognitive ne se borne pas à dire qu'il faut utiliser des exemples travaillés. Elle donne aussi quelques conseils sur le contenu des exemples travaillés. Rappelons qu'un objectif des exemples est de faciliter l'abstraction d'une catégorie de problèmes analogues. En donnant plusieurs exemples de problèmes analogues, l'élève va abstraire une catégorie de problème et identifier leurs points communs. Nous avons vu il y a quelques chapitres de cela comment favoriser l'abstraction de catégories à partir d'exemples. Pour résumer rapidement, il faut varier les exemples et faire en sorte que des exemples consécutifs soient les plus dissemblables possibles. On peut appliquer ce conseil aux exemples travaillés, ce qui nous dit qu'il vaut mieux utiliser des exemples travaillés variés, assez différents les uns des autres. On parle d'effet de variation.

Pour donner un exemple, on peut citer les résultats des études de Sweller et Cooper, datée de 1985 et 1987. Elles ont testé l’efficacité des exemples travaillés dans l’apprentissage de manipulations algébriques. Les élèves devaient apprendre à simplifier et à résoudre des équations. La première catégorie de groupes d’élèves passait directement aux exercices après le cours, tandis que l’autre avait droit à des exemples travaillés intercalés entre les exercices. L'usage d'exemples travaillés a augmenté de manière significative les résultats des élèves, mais seulement lorsqu'on interrogeait les élèves sur des problèmes similaires. Les élèves du groupe "exemples travaillés" répondaient plus vite et faisaient moins d'erreurs que le groupe "pratique immédiate", mais seulement pour des problèmes similaires aux exemples travaillés. Si on interrogeait les élèves sur des problèmes dissimilaires aux exemples travaillés, les résultats étaient bien plus faibles. La faute à des exemples travaillés trop semblables.

Varier les exemples travaillés a un impact sur la charge cognitive

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Les études sur le sujet ont clairement montré que varier les exemples travaillés entraîne une augmentation subjective de la charge cognitive. Ce qui est économisé d'un côté en utilisant des exemples travaillés est dépensé de l'autre en variant les exemples. Mais ce n'est pas un mal car le fait de varier les exemples permet un meilleur apprentissage, en permettant à l'élève de mieux comprendre l'ensemble des situations qui correspond à un type de problème. Généralement, l'usage d'exemples travaillé est à l'origine d'une économie suffisante pour que l'usage d'exemples variés ne soit pas un problème. Mais il peut y avoir des situations où ce n'est pas le cas. Toute tendance a des exceptions, qu'il vaut mieux ne pas laisser de côté.

À ce sujet, on peut citer l'étude de Paas et Van Merrienboer (1994), sur le sujet. Cette étude portait sur les calculs pour déterminer la longueur et les coordonnées d'un segment dans un plan. Elle compara les résultats de quatre groupes : un avec des exemples travaillés très variés, un autre avec des exemples travaillés peu variés, un autre avec des exercices très variés et un dernier avec des exercices peu variés. Dans les groupes avec des exercices/exemples variés, les étudiants recevaient des problèmes où ils devaient calculer les coordonnées d'un segment et d'autres où ils devaient calculer la longueur du segment. Dans les groupes avec des exercices/exemples peu variés, ils recevaient des problèmes de calcul de longueur uniquement. Les résultats étaient les plus élevés pour les deux groupes avec des exemples travaillés, avec un avantage pour les exemples variés. Par contre, dans les groupes qui travaillaient des exercices sans exemples travaillés, l'effet de variation ne se manifestait pas.

L'étude précédente dit que si varier les exemples travaillés est très utile, varier des exercices seuls ne l'est pas forcément, en raison de la charge cognitive induite par la variation des exemples/exercices. Précisons que l'expérience précédente portait sur des exercices non-précédés par des exemples travaillés. Utiliser des exercices variés après des exemples travaillés n’entraîne pas forcément une charge cognitive insoutenable. Et sous ces conditions, varier les exercices serait alors une bonne solution. À ce propos, nous verrons plus tard dans le chapitre que certaines techniques de variation marchent bien pour les exercices, études à l'appui. Et ces techniques devraient être d'autant plus efficaces que l'on utilise des exemples travaillés (variés ou non).

Varier la structure profonde des exemples, pas leurs caractéristiques de surface

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Il faut donc varier les exemples, c'est à dire utiliser des exemples doivent sont différents les uns des autres sur certains points. Mais là encore, il faut bien le faire et le diable est dans les détails. Plus haut dans le chapitre, nous avons vu les deux types d'analogies : analogie de surface et analogie profonde. La première a lieu quand deux problèmes sont analogues car ils partagent des caractéristiques de surface, comme le même vocabulaire, les mêmes valeurs numériques, les mêmes phrases dans l'énoncé ou autres. Ces caractéristiques de surface ne sont par pertinentes pour résoudre le problème et elles ne sont pas des données utiles pour résoudre le problème. À l'inverse, les analogies profondes relient des problèmes qui ont la même structure et se résolvent de la même manière. Les problèmes d'une même catégorie partagent la même structure profonde et se résolvent de la même manière, ce qui fait qu'ils partagent une analogie profonde. Mais ils ne partagent pas forcément les mêmes caractéristiques de surface.

En, 1989, Ross émit l'hypothèse qu'il valait mieux présenter des problèmes structurellement similaires avec des caractéristiques de surface similaires, afin de faciliter la formation des catégories de problèmes par les élèves. Par exemple, il vaudrait mieux présenter les problèmes de proportionnalité avec des problèmes de prix de limonade en fonction du volume acheté, alors que les problèmes de conversion entre unités devaient être présentés avec des problèmes sur la construction d'un port. Après un peu d’entraînement, les problèmes peuvent être variés un peu plus et avoir des caractéristiques de surface différentes.

Mais les études sur le sujet n'ont pas montré que cette stratégie était la bonne. Par exemple, citons l'étude de Quilici et Mayer, datée de 1996. Dans cette étude, trois groupes d'élèves devaient apprendre à utiliser des concepts statistiques (le T-test, le test chi-square, et la corrélation). Le premier groupe recevait des exemples avec des caractéristiques de surface similaires, comme conseillé par Ross. Les histoires et situations des différents exemples étaient similaires. L'autre recevait des exemples structurellement similaires, mais cachés derrière des caractéristiques de surface différentes. Les histoires et situations des exemples étaient totalement différents, mais la structure des exemples était la même. Le dernier n'avait pas d'exemples et recevait juste le cours et une description des procédures à appliquer. Le second groupe avait de meilleures performances que les deux autres, le premier et le dernier groupe ayant des performances identiques.

Pour résumer, il vaut mieux varier les caractéristiques de surface des problèmes et mettre l'emphase sur la structure profonde. Les caractéristiques de surface sont trompeuses au cours de l'apprentissage. Les élèves vont naturellement classer les problèmes en fonction de leurs caractéristiques de surface, qui sont les plus visibles, les plus saillantes. Mais cette classification ne servira à rien et les élèves devront l'abandonner pour une classification basée sur des caractéristiques profondes. On ne souhaite pas que les élèves croient que les caractéristiques de surface sont des caractéristiques utiles. À la place, on veut que les élèves les filtrent et n'y fassent pas attention, le but étant de se concentrer sur les données utiles pour classer les problèmes. En conséquence, les exemples travaillés doivent avoir des caractéristiques de surface très différentes d'un problème à l'autre, ils doivent varier leurs caractéristiques de surface. Ainsi, les élèves comprennent rapidement que celles-ci ne permettent pas de résoudre les problèmes et ils se concentrent sur les caractéristiques profondes.

Passer progressivement des exemples travaillés aux exercices autonomes

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Les expériences précédentes ont été répétées de nombreuses fois, pour vérifier quelque chose : quand ces exemples travaillés deviennent inutiles ? Il apparaît qu’au bout d’un certain temps, les exemples travaillés ont de moins en moins d’effets positifs. Les premières expériences sur le sujet furent des études qui comparaient la performance de deux groupes de sujets dans la durée. Elles regardaient comment les élèves évoluaient durant de longues durées, suivant qu’ils aient droit ou non à des exemples travaillés. Mais il semblerait que ce ne soit pas le temps qui soit la variable pertinente. À la place, il semblerait que les exemples travaillés deviennent inutiles quand les élèves ont acquis les catégories de problèmes adéquates. Il ne leur reste plus qu'à automatiser la procédure de résolution avec de l’entraînement, ce pour quoi les exemples travaillés sont inutiles.

Dans une de leurs études datée de 2001, Kalyuga, Chandler, Tuovinen, et quelques collègues, ont vérifié si cela jouait sur l’efficacité des exemples travaillés. Dans leur première expérience, les élèves devaient apprendre à programmer des équipements industriels. Dans une expérience additionnelle, citée dans la même étude, les mêmes expérimentateurs ont reproduit cet effet sur un groupe de sujets qui apprenait à créer des équations booléennes de circuits à base de relais (ça date, je sais…) Les résultats étaient clairs : plus on présente d'exemples travaillés, plus l’effet des exemples travaillés diminue. L'explication de cet effet est assez simple : si l’élève a acquis les catégories de problèmes voulues, de nouveaux exemples travaillés ne font que répéter ce qui est déjà su et agissent comme une sorte de redondance. Cela arrive après une dizaine d’exemples travaillés, voire un peu plus (15/20).

Au vu de ce qui vient d'être dit, on se dit qu'il faut donc faire suivre les exemples travaillés par des exercices réalisés en autonomie. Cependant, ce n'est pas la méthode la plus efficace. La transition entre exemples travaillés et exercices est trop brutale et elle n'a pas forcément lieu au bon moment pour tous les élèves en même temps. Pour éviter cela, il est possible de passer progressivement des exemples travaillés aux exercices en utilisant un intermédiaire : les exemples partiellement travaillés. Après la présentation d’exemples totalement travaillés, le professeur poursuit par des exemples partiellement travaillés, avant de laisser les étudiants résoudre les exercices eux-mêmes. La transition doit se faire de la manière la plus douce possible. Lors de l’usage d’exemples partiellement travaillés, le nombre d’étapes que les élèves doivent réaliser pour résoudre totalement l’exercice doit graduellement augmenter à chaque exercice. En utilisant cette organisation, on observe que les résultats sont meilleurs que sans. C’est ce qui est appelé le Guidance fading effect.

Cependant, cette tactique peut s’appliquer de deux manières, qui dit comment effectuer des exemples partiellement travaillés. Dans le premier cas, le professeur commence par résoudre les exemples travaillés devant les élèves, et il leur demande de les terminer à partir d’un certain point. Au fur et à mesure des exemples, le professeur s’arrête de plus en plus tôt, jusqu’à ce qu’il n’y ait plus d’étapes à enlever. Dans la seconde tactique, les élèves doivent commencer par résoudre le début de l’exercice, et le professeur termine les exercices à partir d’un certain stade. Au fil du temps, le professeur est repoussé de plus en plus vers la toute fin de l’exercice, et ne doit plus résoudre que les toutes dernières étapes de l’exemple travaillé. L’étude de Renkl, Atkinson, Maier, and Staley, datée de 2002, a montré que les deux stratégies ne sont pas égales. La tactique qui consiste à laisser les élèves résoudre la fin de l’exercice donne de meilleurs résultats. En tout cas, les deux stratégies font mieux que l’usage d’une rupture brutale entre exemples travaillés et exercices.

Les exercices et autres travaux autonomes

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La théorie de la charge cognitive nous dit que laisser un élève résoudre de lui-même des problèmes est peu efficace en début d'apprentissage, mais que cela devient utile quand l'élève a vu suffisamment d'exemples travaillés. Des méthodes actives forcent l'élève à utiliser des méthodes faibles pour résoudre le problème, ce qui sature sa mémoire de travail. Mais au niveau des exercices eux-mêmes, il y a des techniques qui permettent de réduire la charge cognitive. Ils permettent de laisser les élèves réfléchir par eux-mêmes, sans pour autant saturer leur mémoire de travail.

L'interleaving et l'effet de variation

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Le contenu des exercices peut être travaillé afin de compléter au mieux les exemples travaillés. Et certains conseils applicables aux exemples travaillés le sont aussi aux exercices. Nous avons vu plus haut que l'effet de variation se manifeste à la fois pour les exercices et les exemples travaillés, mais surtout pour les exemples travaillés. Pour les exercices, la variation ajoute une charge cognitive qui peut être délétères et peut compenser les effets positifs. Mais si l'on fait précéder les exercices par des exemples travaillés, la charge cognitive des exercices devrait diminuer, les exemples travaillés ayant servi d’entraînement permettant de faciliter la résolution des exercices. En réduisant la charge cognitive des exercices, l'effet de variation se manifeste alors.

Sous ces conditions, il est préférable que les exercices soient variés, tout comme les exemples travaillés. Les exercices qui appartiennent à la même catégorie de problème doivent être différents les uns des autres, au moins superficiellement. Notons qu'en théorie, varier les exercices/exemples augmente la charge cognitive ressentie par l'élève. Lors des exemples travaillés, en début d'apprentissage, ce qui est économisé en utilisant des exemples travaillés est compensé par la variabilité des exemples. Lors des exercices, varier les exercices peut entraîner une charge cognitive plus élevée qu'avec ces exemples peu variés. Mais l'apprentissage est bien meilleur, pour une charge cognitive assez variable, qui va de moindre à légèrement supérieure. Tout est histoire de compromis entre charge cognitive et variation des exemples/exercices, mais ce compromis est surtout important pour les exemples travaillés. Lors des exercices, l'élève a acquis les connaissances antérieures qui réduisent sa charge cognitive, ce qui fait que sa charge cognitive est de base assez basse. On peut alors augmenter la charge cognitive en faisant varier les exercices sans trop de problèmes : on sait qu'il y aura la place en mémoire de travail.

Un autre conseil, qui peut être vu comme une variation assez extrême du précédent, est de mixer différents types de problèmes dans une même session d'exercices. D'habitude, chaque chapitre porte sur un type de problèmes particulier, qui fait l'objet d'exemples et d'exercices, avant de passer au chapitre suivant. Ce faisant, les élèves savent que les exercices visent à appliquer le cours du chapitre, et en déduisent que les exercices portent sur le type de problèmes qu'ils viennent d'aborder en cours. L'élève n'a pas besoin de former de catégories de problèmes pour résoudre ces exercices, mais a juste besoin de se souvenir du sujet du chapitre en cours. Mais lors des épreuves finales, ou dans la vie réelle, les problèmes ne surviennent pas dans l'ordre des chapitres vus en cours. Pour éviter cela, il vaut mieux mixer des problèmes liés au chapitre en cours avec des problèmes liés aux chapitres précédents. Ainsi, l'élève devra, pour répondre correctement, déduire à quel type de problème appartient chaque exercice et donc abstraire les catégories de problèmes adéquates. Cette technique, l'interleaving, donne de très bons résultats et ne demande pas beaucoup d'efforts de la part de l'enseignant.

L'usage de problèmes dits "goal-free"

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Il est possible de diminuer la charge cognitive en modifiant le format des exercices. Pour comprendre pourquoi, il faut savoir que les stratégies de résolution de problème ne sont pas égales du point de vue de la mémoire de travail. La Means-End Analysis sature rapidement la mémoire de travail, contrairement au Hill climbing : dans ces conditions, la mémorisation des exemples et la formation de schémas s’effectue mal, voire n’a pas lieu. Pour que le novice ne puisse pas utiliser la Means-End Analysis, la théorie de la charge cognitive recommande de modifier le format des exercices : c’est ce qu’on appelle le Goal-free effect. Les exercices donnés à l’élève ne doivent pas donner un but précis : à la place, les exercices doivent demander à l’élève de déduire tout ce qu’ils peuvent à partir des données contenues dans l’énoncé.

Par exemple, l’exercice suivant :

> y = x + 6, x = z + 3, et z = 6. Trouvez la valeur de z.

doit être modifié en :

> y = x + 6, x = z + 3, et z = 6. Trouvez le maximum de valeurs.

Autre exemple, l’exercice suivant :

> Une particule a une vitesse de 2 mètres par seconde à un instant t. Elle accélère de 5 mètres par secondes carrées durant 25 secondes. Calculez la distance parcourue à l’instant t + 5 minutes.

Doit être reformulé comme ceci :

> Une particule a une vitesse de 2 mètres par seconde à un instant t. Elle accélère de 5 mètres par secondes carrées durant 25 secondes. Trouvez un maximum de valeurs.

Cet effet a été validé expérimentalement. Les expériences de Owen et Sweller (1985) ont comparé deux groupes d’élèves de même niveau qui recevaient des exercices de géométrie : un groupe avait un énoncé sans but, et l’autre un exercice conventionnel. On entraînait les deux groupes d’élèves, chacun avec un type bien précis d’exercice, et on comparait les résultats avec des exercices conventionnels tout ce qu’il y a de plus normaux. Des expériences complémentaires, effectuées par Bobis, Sweller, et Cooper (1994), ont confirmé l’efficacité de cette stratégie avec des exercices de géométrie. Enfin, les études de Sweller, Mawer, et Ward (1983) ont testé l’efficacité de cette technique sur des exercices de physique. La différence était en faveur du groupe sans but dans tous les cas.

L'explication de la démarche

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Un des défauts des exercices est qu'ils permettent à l'élève de trouver la solution par essai ou erreur, sans avoir réellement compris la démarche à utiliser. Un élève qui a réussi à trouver la solution ne saura pas forcément se souvenir de comment celui-ci à fait et encore moins de savoir pourquoi il a procédé ainsi. Ce problème est souvent résolu par l'usage d'exemples travaillés, mais cela ne marche pas toujours chez certains élèves. Il arrive que les élèves se contentent de reproduire une procédure sans la comprendre.

Pour éviter cela, il est possible de demander à l'élève de justifier sa démarche, pourquoi a-t-il procédé ainsi, de le forcer à expliquer pourquoi ce qu'il a fait permet de trouver la solution. Ces explications permettent à l'élève d'identifier quels sont les types de problèmes et pourquoi ceux-ci doivent être résolus d'une certaine manière. Cette explication de la démarche (le terme anglo-saxon, mal-nommé, est "self-explanation"), donne expérimentalement de bons résultats, du moins si l'élève arrive à donner des explications correctes et élaborées.

L'usage de travaux de groupe

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De nos jours, les pédagogies basées sur des travaux de groupe deviennent de plus en plus courantes. Ces **pédagogies coopératives** demandent aux élèves de travailler en groupes de deux personnes ou plus, que ce soit en utilisant des débats de classe, des jeux de rôles, des travaux pratiques en groupe, etc. On peut se demander pourquoi faire travailler les élèves en groupe permettrait d'améliorer l'apprentissage. On peut supposer un effet sur la motivation, mais il existe aussi une raison liée à la mémoire de travail. L'effet de la mémoire de travail collective nous dit que la charge cognitive est diminuée quand on fait travailler les élèves en groupe. De plus, cet effet est valable pour tous les élèves, même ceux qui ont peu de connaissances antérieures : il ne s'agit pas d'un expertise reversal effect.

Cela vient du fait qu'avec une bonne répartition des tâches entre élèves, la charge cognitive est répartie sur plusieurs personnes, diminuant la charge cognitive pour chaque élève. Cela implique que le travail de groupe ne fonctionne que pour des tâches complexes et est contre-productif pour les tâches simples. Avec des tâches simples, la charge de la mémoire de travail est suffisamment faible pour que les élèves puissent la gérer individuellement : il n'y a pas besoin de la répartir entre plusieurs élèves.

Mais à cette répartition de la charge cognitive, il faut ajouter les coûts de communication entre élèves : ceux-ci doivent échanger des informations. Et ces coûts de transaction vont augmenter légèrement la charge cognitive : pour savoir à qui demander l'information, il faut conserver des informations sur la répartition des tâches dans le groupe en mémoire de travail. Ainsi, un bon apprentissage coopératif doit explicitement concevoir les problèmes de manière à diminuer les coûts de transaction et faciliter la répartition des tâches. Cela expliquerait pourquoi les études et recherches sur l'apprentissage coopératif donnent des résultats si variés : suivant la qualité de la répartition des tâches, l'apprentissage peut être très efficace ou très laborieux. Ainsi, la majorité des études sur l’efficacité de l'apprentissage coopératif sont à jeter à la poubelle : elles ne tiennent pas en compte la qualité de la séparation des tâches.

Références

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  • Learning from examples: Instructional principles from the worked examples research, par Atkinson, Derry, Renkl et Wortham, datée de 2000.