Photographie/Netteté des images/L'œil et la perception de la netteté

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Netteté des images photographiques


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Comparé aux objectifs modernes, l'œil humain est un instrument d'optique assez médiocre mais néanmoins capable, à certains égards, de performances assez étonnantes. Sauf pour certaines applications scientifiques que nous n'évoquerons pas ici, c'est lui qui va apprécier la netteté des photographies et il importe donc de bien comprendre comment il « fonctionne ».

Structure de la rétine

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La rétine est un prolongement du cerveau ; elle comporte une dizaine de couches de cellules reliées entre elles selon des associations complexes et finalement connectées aux 800.000 fibres nerveuses du nerf optique. Les cellules visuelles proprement dites, dont le nombre dépasse 100.000.000, forment ce que l'on appelle la « couche bacillaire ». Elles sont de deux types : des bâtonnets particulièrement sensibles aux faibles lumières et des cônes qui permettent la discrimination des couleurs.

Contrairement aux films et aux capteurs qui possèdent les mêmes propriétés sur toute leur surface, la rétine est peuplée densément au centre et de moins en moins en allant vers les bords, où l'on ne trouve plus que quelques rares bâtonnets. Le nombre total de cônes est difficile à estimer car les cellules visuelles, malgré leurs noms qui font penser à des formes géométriques simples, ne sont pas très faciles à distinguer ; selon les sources, les valeurs varient de 1.000.000 à plus de 6.000.000 ...

La zone centrale est occupée par la macula, ou tache jaune, dont la surface d'environ 2 mm² est richement dotée en cônes et en bâtonnets. Le milieu de la macula est lui-même occupé par une petite dépression de 0,4 mm de diamètre, la fovéa, où l'on ne trouve que des cônes extrêmement serrés. C'est là que l'acuité visuelle est maximale, du moins en bonne lumière. La nuit, faute de bâtonnets, la fovea est aveugle et pour percevoir la lumière provenant d'étoiles de faible magnitude, il faut regarder un peu à côté, en utilisant les cellules de la macula.

 

La fovéa correspond à un angle de vision d'environ 1,5° et c'est sur elle que nous amenons instinctivement l'image du point que nous sommes en train de fixer. Loin de la fovéa, l'acuité visuelle diminue rapidement jusqu'à devenir très médiocre ; l'œil sain « voit flou » partout sauf au centre mais il compense cette insuffisance par une très grande mobilité grâce à laquelle il peut explorer les diverses parties du sujet situé devant lui. Le cerveau s'adapte aux diverses situations pour constituer, avec les informations qu'il reçoit, une « image mentale » utilisable.

Limite de perception

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Lorsque l'image d'un motif tel qu'une ligne ou une tache se forme sur une cellule visuelle, celle-ci fournit un signal qui permet au cerveau d'en détecter la présence. Il faut donc se poser la question : jusqu'à quelle limite un objet très fin est-il visible ? De ce point de vue, l'œil normal se révèle très sensible, puisqu'il est capable de détecter des lignes très fines vues sous un angle d'environ 2" dans le sens transversal et un peu plus pour des taches. Un cheveu noir placé devant un fond lumineux peut ainsi être vu à plusieurs mètres de distance.

La perception d'un fin détail dépend en fait au moins autant, sinon plus, du contraste local et de la netteté de ses bords que de ses dimensions. Placé à 1 m d'une surface blanche bien éclairée, l'œil « normal » y distinguera sûrement un point noir de 0,25 mm de diamètre mais pas une chiure de mouche jaune pâle de 1 mm de diamètre, pourtant beaucoup plus grande.

Le fait que l'on puisse percevoir un objet ne veut pas dire que l'on puisse en évaluer les dimensions. Il faut pour cela que cet objet soit vu sous un angle suffisant. Par exemple, une ligne noire très fine et une ligne grise un peu plus large donneront visuellement la même impression si elles sont vues depuis une certaine distance, la différence ne pouvant être constatée qu'en s'approchant suffisamment ou en utilisant un instrument grossissant.

     

Les trois dessins ci-dessus sont identiques mais affichés à des échelles de plus en plus réduites. Sur un écran de 1 280 x 1 024 pixels, dans les trois cas, les deux traits d'une même paire devraient être affichés l'un en noir et l'autre en gris. Â deux ou trois mètres de l'écran, vous ne devriez plus percevoir cette différence pour la paire de traits la plus fine.

Si cette petite expérience n'est pas probante, en raison des caractéristiques d'affichage de votre matériel, alors vous pouvez très facilement constater ce phénomène avec une feuille de papier, une règle et un crayon !

Limite de résolution ou acuité visuelle

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Cette notion, encore appelée « pouvoir séparateur angulaire », ne doit pas être confondue avec la précédente. Il ne s'agit plus de percevoir la présence d'un objet, mais de distinguer l'un de l'autre deux objets très proches.

On peut imaginer que si les images de deux points distincts d'un sujet se forment sur une même cellule visuelle, ces deux points ne seront pas distingués mais au contraire perçus comme un point unique. Il s'agit là, évidemment, d'une idée quelque peu schématique. Les recherches ont montré qu'un œil normal pouvait séparer des points lumineux vus sous un angle minimal d'environ 1' (une minute d'angle), soit à peu près 1/3.000 radian. Nous appellerons   (epsilon) cet angle.

 

Au mieux, l'œil distingue donc des détails séparés de 0,33 mm à 1 m, ou de 3,3 mm à 10 m, ou de 3,3 cm à 100 m, etc., ou encore deux ballons de football vus à 750 m, mais seulement lorsque l'image se forme au niveau de la minuscule fovéa. Encore faut-il, pour atteindre cette limite, que les points soient très contrastés par rapport au fond, comme par exemple deux étoiles proches, ce qui n'est presque jamais le cas pour les objets de la vie quotidienne. Par ailleurs, l'acuité visuelle dépend de très nombreux facteurs ; en particulier, elle diminue avec la fatigue et aussi avec d'éventuelles pathologies.

Cette valeur de 1/3.000 radian n'est pas très éloignée de l'ordre de grandeur que l'on peut obtenir par un raisonnement simpliste consistant à partir du diamètre d'un cône, environ 4 µm, et de la distance focale moyenne de l'œil, 23 mm. Si l'image se formait dans l'air on trouverait un angle égal à 0,004 / 23 radian, mais il faut corriger ce résultat en tenant compte de l'indice de réfraction des milieux aqueux constituant l'œil, soit 1,336 :


 


Les très bons objectifs sont souvent capables de performances sensiblement supérieures et ceci, dans toute l'étendue du champ photographié, pas seulement dans la zone centrale.

Application à la photographie

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Perception de taches-images contiguës

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Quoi que l'on fasse, l'image photographique d'un objet n'est jamais parfaitement nette, même si l'œil, éventuellement assisté d'un instrument, la perçoit comme telle dans certaines conditions d'observation. Il n'existe en effet aucun objectif parfait, aucun film parfait, aucun papier photographique parfait, aucun capteur parfait, aucun écran d'ordinateur parfait, ...


 
L'image d'une source quasi ponctuelle (une étoile lointaine en constitue un excellent modèle) n'est jamais un point, mais une tache aux bords plus ou moins flous, généralement accompagnée d'anneaux de diffraction concentriques dont la structure peut être très complexe. Les amateurs de mathématiques iront voir, pour en savoir plus, du côté des taches d'Airy.
 
Si le flou n'est pas trop important, deux taches-images voisines peuvent être distinguées à l'œil nu ou à l'aide d'un instrument grossissant ; sinon, elles fusionnent et l'information est perdue. La limite à partir de laquelle cette fusion se produit est très difficile à définir.
 
Pour quantifier cette limite, on considère deux taches voisines telles que le maximum de luminosité de l'une corresponde au premier minimum de l'autre, c'est-à-dire que le centre lumineux de la première se trouve au niveau du premier anneau noir de la seconde.

Limite pratique du pouvoir séparateur angulaire

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Comme nous venons de le voir, le pouvoir séparateur de l'œil doit être considéré comme un angle limite en-dessous duquel deux points lumineux distincts ne peuvent plus être perçus comme tels.

Il faut bien comprendre que cet angle limite n'est qu'une valeur de référence, forcément arbitraire.

Dans la zone d'une photographie qui doit être nette et qui, on va le voir, ne correspond pas forcément à la totalité de la scène, deux points du sujet tels que M et N, susceptibles d'être distingués à l'œil nu depuis le point de vue, devraient traduits sous la forme de deux points m et n de l'image visibles distinctement depuis une distance de référence qui sera autant que possible la distance orthoscopique D.

 

Remarquons au passage qu'il n'y a aucun rapport entre la distance réelle des points M et N et celle de leurs images m et n, car M et N peuvent se situer n'importe où sur leurs rayons visuels respectifs. La grandeur qui caractérise l'acuité visuelle est bien l'angle limite que nous venons de définir et pas la distance qui sépare les points m et n, d'autant que celle-ci varie avec les dimensions de l'image.

Compte tenu des conditions réelles dans lesquelles on observe généralement les photographies, nous considérerons comme limite pratique de cet angle le double de la limite théorique, soit 1/1.500 radian.


Remarque 

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Influence du contraste

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Nous aurons l'occasion de revenir sur le caractère très subjectif et très relatif de la sensation de netteté qui dépend de nombreux facteurs, parmi lesquels le contraste joue un rôle déterminant. Il suffit pour s'en convaincre de regarder les trois images suivantes :


  Voici une portion de mire constituée de traits nets alternativement noirs et blancs,
  puis une première image un peu floue de cette portion de mire donnée par un objectif X,
  et une seconde image apparemment très dégradée donnée par un objectif Y.


Ce n'est pas le nombre des lignes visibles qui différencie visuellement les deux images, mais la façon dont l'objectif a traduit le contraste de la mire. La première, observée avec quelques mètres de recul, paraîtra nette, tandis que la seconde, au contraire, paraîtra grise et surtout floue. Ces deux images contiennent pourtant la même quantité d'informations !

L'impression de netteté est due au moins autant aux micro-contrastes locaux qu'à la restitution précise des fins détails. Une photo très peu contrastée paraît grisâtre et donne une impression de flou qui n'est pas forcément justifiée.

Effets de bord

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Par ailleurs, le cerveau a sa façon bien à lui de traiter les informations qu'il reçoit et bien d'autres phénomènes liés à la perception interviennent sur la sensation de netteté ; regardez les deux images ci-dessous, en vous plaçant à différentes distances de votre écran.


 
Les lignes noires et blanches sont floues tandis que les lignes grises sont parfaitement nettes et contiennent une information de meilleure qualité. Remarquez au passage, sur ces dernières, un effet de bord grâce auquel l'œil augmente le contraste des frontières. Les lignes grises donnent l'impression de ne pas être uniformes mais elles le sont pourtant bel et bien.
 


Remarque 

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Netteté des images photographiques