Affaire Priore/Historique de l'Affaire


L'historique de l'Affaire Priore


Le but de ce chapitre est de décrire le contexte historique de l’Affaire Priore. L’aspect scientifique est relégué au second plan.

La partie scientifique du dossier est développée dans Les appareils d'Antoine Priore et Les observations biologiques

Certains « problèmes », évoqués ici sont détaillés dans Les problèmes « humains » de l'Affaire et dans les « Notes de synthèse ».

Note : La majorité de photos ayant pour sujet l'« Affaire Priore » sont l’œuvre de photographes anonymes et datent de moins de 70 ans. En conséquence, elles ne sont pas admissibles dans Wikipédia. Dans le texte, l'emplacement d'une illustration utile, mais pas admissible dans Wikipédia, est indiqué par une cadre « Image externe », qui contient un lien vers un fichier sur un site externe à Wikipédia.

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Biographie d'Antoine Priore modifier

En août 1944, un officier de la marine italienne, attaché à la base sous-marine de Bordeaux, prend discrètement contact avec un responsable de la police française. Cet italien, Antoine Priore, connu pour ses opinions antifascistes, craint d'être exécuté lorsque les Allemands abandonneront Bordeaux. L'officier de police, Louis Durand, fait partie de la Résistance. Il prend en charge Antoine Priore et le conduit dans un maquis de Dordogne. Antoine Priore va se distinguer, au cours d'opérations militaires, ce qui lui vaudra à la Libération la croix de guerre et la médaille de la Libération.

Il s’installe à Bordeaux. Une étrange aventure commence...

Antoine Priore est né le 10 avril 1912 près de Trieste en Italie, ville dans laquelle il fait ses études et obtient, en 1932, un diplôme d'ingénieur-électronicien décerné par l'école Alessandro Volta avant d'effectuer son service militaire dans la marine italienne comme aspirant à l'Académie Navale de Livourne.

En 1938, Priore est rappelé dans la Marine, d'abord avec le grade d'enseigne, puis avec celui de lieutenant. Durant la guerre, il est envoyé en Albanie pour remettre en fonctionnement une centrale électrique,

En Italie, c'est la débâcle. L'armistice de Cassibile estt signé par les Italiens en septembre 1943. Le maréchal Graziani, chef des armées, reste fidèle à Mussolini, de l'autre côté le maréchal Badoglio et son gouvernement luttent maintenant aux côtés des Alliés. Le maréchal Badoglio demande aux soldats italiens de rejoindre les Alliés ce qui les fait passer dans le camp des adversaires du Troisième Reich.

Fait prisonnier par les Allemands, il est successivement détenu dans plusieurs camps et bases militaires. En février ou mars 1944, les Allemands transfèrent Antoine Priore à la base sous-marine italienne et allemande de Bordeaux.

Pour les 2 000 italiens de la base c'est le moment de choisir. Face aux 60 000 soldats allemands, la majorité de ses hommes décident de rester fidèle à l'Axe. Quelques-uns désertent et rejoignent la Résistance, trois d'entre eux sont capturés et fusillés à la base sous-marine même[1]. Antoine Priore, avec la complicité de Louis Durand, un commissaire principal de police appartenant à la résistance, est parmi les évadés en août 1944 et il rejoint le maquis F.T.P. en Dordogne, puis l'armée de la Libération au 7e bataillon F.T.P. de la Dordogne, brigade Carnot, avec le grade de sergent-chef où il prend part aux derniers combats pour la libération de la région.

 
Attestation de formation préparatoire aux études d'ingénieur décernée à Antoine Priore.

C'est pendant la période 1938-1944 qu'Antoine Priore parfait ses compétences en technologie des générateurs très haute fréquence et des radars. En 1949, il suit une formation préparatoire à l'École Professionnelle Supérieur de Paris.

Revenu à la vie civile, il s'installe à Bordeaux, travaillant pendant la journée dans l’atelier de radioélectricité de M. Saintamon, 39 cours Balguerie et le soir comme projectionniste de cinéma. Priore ayant l'esprit inventif, il met au point des dispositifs électroniques de protection de radiorécepteurs contre des court-circuits ; de mesure automatique de pression des pneus des voitures ; de régulation des phares de voiture. Il consacre tous ses loisirs et l'essentiel de ses revenus à ses recherches.

Son intérêt principal est de mettre en application une observation qu'il a faite en 1942. Envoyé en Albanie pour réparer une centrale électrique, il observe un phénomène qui lui parait extraordinaire : des oranges, qu'il a oubliées depuis plusieurs semaines dans une pièce emplie d’appareillages électriques, ont conservé leur état de fraîcheur ; d'autres oranges, loin des appareils électriques, ont pourri « normalement »...[2]. Antoine Priore voulait mettre au point un système industriel de « stérilisation » de fruits et légumes. Il projette de créer une sorte de tapis roulant qui permettrait de faire passer fruits, légumes, viandes, etc., sous un champ électromagnétique en vue de leur conservation. Il se fonde sur ce qu'il pense être un principe nouveau et totalement inconnu : la « stérilisation par ondes électromagnétiques ».

Grâce au soutien de ses anciens compagnons de résistance, il parvient à équiper un laboratoire personnel avec des équipements militaires américains, appareils à la pointe de la technologie de l'époque.

Au cours de nombreuses expériences il expose des végétaux (lentilles, asperges, tulipes, etc.) à des champs magnétiques et électromagnétiques divers et constate que, pour certains champs, les pousses se développent plus rapidement que celles des lots témoins et que pour d’autres champs le développement des pousses est moins rapide que celui des témoins. Il tente ensuite, avec la collaboration du Dr Marc Moureau de la faculté de médecine de Bordeaux[3], le même genre d’expériences avec des cultures de bactéries.

Ces premiers résultats l'amènent à penser qu'il se trouve en présence d'un principe fondamental qui permet, par l’application d’un champ électromagnétique approprié, de modifier la croissance cellulaire. Devant ces observations, Antoine Priore ne manquera pas de se poser la question :

Si on peut modifier le comportement de cellules végétales et de diverses bactéries avec des ondes électromagnétiques, que peut-on faire avec des cellules animales et humaines ?

En 1952, Louis Durand le met en relation avec le Dr Francis Berlureau, ancien directeur d'études à l'école vétérinaire de Toulouse et directeur, à cette époque, des abattoirs de Bordeaux. Une collaboration s'instaure, qui va durer plus de vingt-cinq ans. Berlureau attire l'attention de Priore sur un petit ouvrage : Cancer : un dérangement électrique[4] de Charles Laville, ingénieur de l'École nationale vétérinaire d'Alfort. Cette plaquette, sans bases expérimentales ou théoriques, relate les élucubrations de son auteur qui prétend que l'origine des cellules malades est un déséquilibre électrique et qu'une guérison de la maladie peut être obtenue par l'application d'un champ électromagnétique approprié. Pour Priore, c'est la révélation : on peut guérir le cancer avec des ondes électromagnétiques !

Il y consacre le reste de sa vie.

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  « Antoine Priore 1958, avec pansements »

Dès 1952 des journaux locaux parlent de lui[5].

Francis Berlureau obtient de Jacques Chaban-Delmas, récemment élu maire de Bordeaux, l'autorisation pour Priore d'utiliser les équipements du laboratoire des abattoirs pour ses recherches. C’est la première manifestation du soutien que Chaban-Delmas lui accordera tout au long de ses recherches (voir la Note : section:Mairie de Bordeaux ci-dessous).

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  « Dr Fournier, Dr Berlureau, Commissaire Durand et Antoine Priore vers 1960 »

Avec le concours de plusieurs médecins bordelais (principalement le Dr. Fournier, de Blaye et le Dr. Dagréou, de Bègles), Priore traite des patients cancéreux avec ses appareils. Les documents existants (voir section : Pratique illégale de la médecine) relatent quelques cas des patients qui ont survécu.

En 1957 Antoine Priore quitte la rue Poyenne à Bordeaux pour s'installer dans un petit pavillon, cours Gambetta à Floirac, dans la proche banlieue de Bordeaux. Il continue de soigner les malades qui sollicitent son aide. C'est dans une pièce de cette maison et dans les bâtiments construits sur son terrain, qu'il entreprend la construction de ses machines. Il investit son temps et ses ressources dans des recherches dont il ne tire aucun profit, accumulant les dettes pour subvenir aux besoins de sa famille.

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  « Pr. J. Biraben »

Le Dr. Fournier, dont plusieurs patients sont soignés et guéris par Antoine Priore, tente de l'introduire dans le milieu des cancérologues bordelais. En 1958/1959, il prend contact avec professeur Lachapèle, directeur de l'Institut Bergonié. Les Docteurs Delmon et Biraben expérimentent son appareil avec des rats sur lesquels a été greffée une tumeur. Les résultats sont très encourageants et, en juin 1960, Jacques Chaban-Delmas demande l'avis d'une commission de médecins pour les suites à donner aux recherches de Priore. En 1962, malgré un avis très négatif de la commission dont Lachapèle fait partie, ce dernier est toutefois disposé à donner un local à Priore pour construire un appareil à l'hôpital. Antoine Priore refuse l'offre, car il a peur que l'on vole sa découverte. Le professeur Lachapèle, qui sait parfaitement que Priore traite des malades clandestinement, est convaincu, par ce refus, qu'il est un charlatan. Par la suite il utilisera toute son influence auprès de ses collègues pour dénigrer Antoine Priore.

Pour tenter de se protéger, Antoine Priore dépose trois plis cachetés à l'Académie des sciences : le 20 février 1961, pli no 14184 et le 25 avril 1962, plis no 14297 et no 14299[6]. Ces plis n'ont jamais été décachetés.

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  « Appareil Priore circa 1964, utilisé pour les observations de cancer expérimental et le traitement de malades »

Vers 1963, par l'intermédiaire du Dr. Berlureau, Priore réussit à attirer l'attention des chercheurs de l'Institut de Recherche Scientifiques sur le Cancer de Villejuif, les professeurs Rivière et Guérin, qui font des expériences à Floirac avec des animaux greffés avec des cancers expérimentaux. Tous les cancers régressent. Les résultats figurent dans les comptes rendus de l'Académie des sciences de Paris en 1964/1965.

Le 1er mars 1965, le Professeur Robert Courrier, secrétaire perpétuel de l'Académie des sciences présente, en séance publique, la troisième publication de professeurs Rivière et Guérin. Leurs observations marquent peut-être le début d'une piste importante dans la lutte contre le cancer. Le professeur Courrier termine sa présentation sur ces mots :

« Quand il s'agit d'un problème aussi grave que le cancer et qu'on voit poindre une lueur, on a le devoir de rechercher ce que représente cette lueur. On n'a pas le droit de l'éteindre avant de savoir ce qu'elle vaut. »

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  « Pr. Robert Courrier (1963) »

La Presse avait été alertée le 25 février, par le service de communication de l'Académie, d'une importante communication sur le cancer prévu pour le 1er mars. La salle est comble et le matin même il y a des gros titres dans les journaux nationaux, soit « Antoine Priore, l'homme qui a vaincu le cancer ! », soit « Antoine Priore, le charlatan ! ». L'ambiance à l'Académie est « électrique »[7]. Les académiciens cancérologues étaient tous très hostiles : selon certains témoins, le professeur Antoine Lacassagne et le professeur Courrier en sont presque venus aux mains.

Antoine Priore est pourchassé par des journalistes, courtisé par des industriels qui voyaient en lui un marché potentiel énorme, et attaqué par les cancérologues parisiens.

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  « Antoine Priore (1972) »

Dans les vingt années qui suivent, Antoine Priore construit, avec l'aide de financement de l’État et des apports privés, une série d'appareils de plus en plus puissants. Quelques dizaines de chercheurs universitaires (CNRS, INSERM etc.) et plusieurs milliers d'animaux (souris, rats et lapins) ont pu constater des effets du rayonnement émis par les appareils sur leurs modèles de maladies expérimentales. Les controverses parasitent et empêchent l'investigation scientifique de ce qui est, peut-être, une découverte importante. Antoine Priore est obsédé par l'idée que s'il révèle « son secret », sa découverte sera reprise par d'autres et il sera oublié, puisqu'il n'appartient pas au sérail de la recherche scientifique. Cette attitude, qui engendre beaucoup de difficultés pour ses défenseurs, donne des munitions à ses détracteurs.

En 1980, Antoine Priore, diabétique, est victime d'un AVC qui le rend hémiplégique ; il meurt le 9 mai 1983 à 22 heures des suites de ces deux affections.

Il ne laisse à son décès aucun document permettant de connaître le détail du fonctionnement de ses appareils.

Références modifier

  1. Dominique Lormier, La base sous-marine de Bordeaux, 1940-1944, Bordeaux, C.M.D., coll. « Questions de Mémoire », , 76 p..
  2. Claude Robert, « L'électron au service de la médecine », dans La Vie de Bordeaux, no 68, 30 mai 1952 [texte intégral] .
    Pour des réflexions intéressantes voir également :
    Robert Courrier, « C.R. personnel de l'historique de l'Affaire »
    Peltier, « Lettre du 27 octobre 1994 »
  3. Moureau, « C.R. d'expériences du 7 février 1952 »
  4. Charles Laville, Introduction à la mécanique de la vie VI : Le cancer, dérangement électrique, Paris, Éditions Laville, , 48 p. (lire en ligne).
  5. Claude Robert, « Le Cancer : Perturbations électriques des tissus », dans La Vie de Bordeaux, no 78, 15 août 1952 [texte intégral] .
    « « Je crois à la thérapeutique électronique » affirme M. Prioré, ingénieur électronicien », dans Sud-Ouest, 8 août 1952 [texte intégral] 
    « Un ingénieur bordelais apporte sa contribution à la lutte contre le cancer », dans Courrier Français, 9 août 1952 [texte intégral] 
    « M. Prioré s'inspire d'une théorie personnelle pour l'aider à la lutte contre le cancer », dans Sud-Ouest, 16 août 1952 [texte intégral] .
  6. Robert Courrier, « Note : Plis cachetés d'Antoine Priore (février 1965) », sur Archives de l'Affaire Priore
  7. Robert Clarke, « Cancer : l'incroyable affaire Priore », dans Science & Vie, no 572, mai 1965, p. 114-118 [texte intégral] .

Expériences sur les animaux et essais sur des malades du cancer modifier

Francis Berlureau fournit à Antoine Priore des tissus animaux pour ses expériences.

Un jour de 1952, en opérant sur les testicules d'un bœuf atteint de cancer, il est frappé par le fait que les caractéristiques électriques mesurées sont totalement différentes de celles d’un testicule normal. Ce qui l’amène à penser que le cancer est la conséquence d’un dérèglement électrique des cellules. Dans cette hypothèse, il serait possible d'envisager un traitement électromagnétique du cancer, si toutefois son appareil permet, comme il le pense, de modifier les propriétés électriques des cellules...

Le Dr Berlureau se décide alors à confier à Antoine Priore des animaux cancéreux, destinés à être euthanasiés. Certains de ces animaux seront guéris ou verront leur état amélioré. Dès cette époque, la presse locale fait part de ces résultats[1].

Fasciné par ce qu'il pense être une immense découverte, le Dr Berlureau tente d'attirer l’attention des spécialistes du cancer et commence[2], vers la fin de 1952, avec le Pr Blanquet de la faculté de médecine de Bordeaux. Il semble qu’un début d’expérimentation a eu lieu[3].

  Images externes
  « Priore et appareil c 1952 a »
  « Priore et appareil c 1952 b »
  « Priore et appareil c 1952 c »

Quelques lapins et rats greffés avec la tumeur expérimentale T8 de Guérin ont été traités par Antoine Priore, mais l’expérimentation fut sans suite. Puis, en juin 1953, le Dr Berlureau a contacté le centre anti-cancer de Villejuif et le Professeur Lachapelle, directeur de la fondation Bergonié, centre anti-cancer de Bordeaux, auxquels il propose[4] une expérimentation animale pour tester l'efficacité du traitement de l’appareil d’Antoine Priore.

Ses propositions sont rejetées d’emblée, car c’était chose connue des cancérologues bordelais qu’Antoine Priore traitait des malades atteints de cancer. Dans les milieux médicaux, il était classé d’emblée parmi les « guérisseurs » et on le considérait plus ou moins comme un charlatan, ce que ne pouvait qu’être un vulgaire réparateur de radio.

Ensuite le Dr Berlureau se tourne vers la faculté des sciences de Bordeaux et tente[5] pendant les années 1956 à 1959 d'attirer, sans succès, l'attention d’un professeur de physique de l'université de Bordeaux, Roger Servant.

Peu découragé par l'attitude des universitaires, Antoine Priore poursuit ses recherches et met au point des appareils plus élaborés, avec lesquels il traite, sous contrôle médical, beaucoup de malades atteints de cancers divers.

Essais sur les malades jugés incurables

En 1953, Antoine Priore va franchir une étape importante. Avec le concours de certains médecins bordelais (les docteurs Fournier, Princeteau, Connardeau et Dagréou), il entreprend le traitement de malades atteints de cancers jugés incurables. Il va ainsi traiter, en quelques années, de nombreux patients. (Aux funérailles d'Antoine Priore, en mai 1983, on pourra rencontrer, parmi l'assistance, d’anciens patients, jugés incurables dans les années 1950 - 1960.)

Le Dr. Fournier tient informé le président de l'Ordre des Médecins de la Gironde et les soins sont prodigués gratuitement[6].

Le Dr Fournier a constitué un dossier, où sont réunis tous les cas traités par Antoine Priore. Les documents concernant les patients traité par Antoine Priore sont très fragmentaires et sont principalement des comptes rendus d'examens anatomo-pathologiques ou attestations de médecins traitants, mais ils correspondent aux pratiques médicales à l'époque.

On doit considérer ces rapports de cas comme anecdotique et pas de tout comme « preuve » de l'action du rayonnement contre le cancer, car ils sont peu nombreux et les cas cliniques ne sont pas parfaitement définis. Mais, il est incontestable qu'ils étaient d'une très grande utilité pour Antoine Priore dans ses tâtonnements de réglages avec ses appareils.

De ce dossier nous avons retrouvé quelques fiches :

  • 1954 Le cas d'un garçon âgé de 15 ans, A.B., pour lequel les spécialistes hésitent entre deux diagnostics : un réticulo-sarcome ou une forme maligne de maladie de Hodgkin. Ce garçon traité à l’aide de la machine de Priore a pu obtenir en 1956 et puis en 1966, un certificat médical attestant sa parfaite santé.
Septembre 1954 : Compte rendu d'examen fait par Dr. Angibeau pour A.B. : Hodgkin malin[7].
Décembre 1955 : attestation du Dr. Cotoni : A.B. est en bonne santé[8] ;
Octobre 1966 : attestation du Dr. Moulinier que A.B. ne présent aucun affection aiguë ou chronique[9].
Lettre de remerciement de la part de A.B. adressée à Antoine Priore[10]
  • 1955 G.R. atteint d'un cancer du larynx, a refusé une laryngectomie. Il a été complètement guéri après un traitement par l’appareil de Priore.
Mars 1955 : Biopsie du larynx de G.R. faite par Dr.Parroche : cancer[11] et demande de prise en charges par le Dr. Phillip pour l’enlèvement[12].
Mai 1955 : G.R. a refusé l'intervention et il s'est fait soigné chez Antoine Priore. CR de biopsie du Dr. Parroche : larynx normal[13].
  • 1956 Mme M. avait un cancer du sein. Après le traitement, la tumeur a disparu. Mme Masse était toujours en bonne santé vingt-cinq années plus tard[14].
  • 1958 M.P. concerne une ulcération de la lèvre. La biopsie révèle un sarcome fibroblastique qui disparaissait après traitement
Janvier 1958 : CR anatomo-pathologique du lèvre de M.P. par le Dr. Carles : sarcome fibroblastique[15].
Février 1958 : Lettre du Dr. Cabanie : Après traitement chez Priore M.P. est en bonne voie de guérison[16]
Avril 1958 : Attestation du Dr. Connardeau : M.P. ne présente plus aucun signe de lésion au niveau de la lèvre supérieure[17].
  • 1959 Mme Q-C.concerne une tumeur maligne, s’accompagnant d’une biopsie avant et après le traitement Priore,
Novembre 1959 : CR de biopsie pratiquée sur Mme Q-C par le Dr. Carles : tumeur maligne[18].
Janvier 1960 : CR de biopsie et examen pratiquées sur Mme Q-C après traitement chez Priore par le Dr. Carles et par le Dr. Machy : tumeur begnine[19].
  • 1959 Mme Dagréou, épouse du Dr. Henri Dagréou, souffrait d'un cancer et fut traité par le Dr. Delmon à la Fondation Bergonié. Devant l'inefficacité du traitement le Dr. Delmon préconise le traitement par la machine de Priore ! Le compte rendu de la maladie de son épouse est donné par le Dr. Dagréou[20] en 1987.
  • Pratique illégale de la médecine L'accusation de soigner des malades et de pratiquer illégalement la médecine est proféré entre 1959 et 1965 pour dénoncer Antoine Priore comme un charlatan. La presse populaire l'utilise pour insinuer qu'Antoine Priore a comme premier motif l’appât de gain et un certain milieu médical l'utilise pour décrédibiliser le travail expérimental fait par les Professeurs Rivière et Guérin. La réalité est plus nuancée :
Le professeur Reboul, radiologue à l'Institut Bergonié propose qu'Antoine Priore puisse traiter certains de ses patients[21]. Priore accepte la proposition, mais ne peut les traiter à l'hôpital, car son appareil n'est pas transportable. L'administration du C.H.U. refuse le transport des malades chez Priore à Floirac[22]. En conséquence Reboul ne peut pas tester les effets du rayonnement sur ses patients !
Le 8 mai 1961 le Dr. Grenoilleau, Inspecteur divisionnaire de la santé, somme Priore de traiter des malades uniquement dans le cadre défini par le directeur de la Fondation Bergonié, le centre anticancéreux de Bordeaux, sous risques de poursuites pour pratique illégale de la médecine[23].
En février 1962, le professeur Lachapèle, directeur de l'Institut Bergonié, propose un local à l'hôpital pour Priore de construire un appareil[24]. Priore refuse l'offre car d'abord il est dans l'impossibilité financier de construire un appareil neuf à l'hôpital et il a peur d'être dépossédé de sa découverte.
Le traitement des malades du cancer par Antoine Priore s'arrête.

Références modifier

  1. « L'électron au service de la médecine », dans La Vie de Bordeaux, 30 mai 1952 [texte intégral] 
    « Le cancer : perturbations électriques des tissus », dans La Vie de Bordeaux, 15 août 1952 [texte intégral] 
    « Je crois à la thérapeutique électrique, affirme M. Priore », dans Sud-Ouest, 8 août 1952 [texte intégral] 
    « M. Priore s'inspire d'une théorie personnelle pour aider à la lutte contre le cancer », dans Sud-Ouest, 16 août 1952 [texte intégral] 
    « Un ingénieur bordelais apporte sa contribution à la lutte contre le cancer », dans Courrier Français, 8 août 1952 [texte intégral] 
  2. F. Berlureau, « Notes historiques »
    F. Berlureau, « L'histoire d'Antoine Priore »
  3. G. Delmon, « Note MS. »
  4. F. Berlureau, « Notes historiques »
    F. Berlureau, « Notes historiques »
    R. Courrier, « Notes: Antoine Priore »
  5. F. Berlureau, « Information adressée au Pr. Courrier le 16 février 1966 »
  6. Dr. Fournier, « Lettre du 5 juillet 1965 »
    Dr. Fournier, « Lettre du 15 novembre 1965 »
  7. Dr. Angibeau, « CR Adénogramme »
    Dr. Angibeau, « CR examen anatomo-pathologique »
  8. Dr. Cotoni, « Attestation de la bonne santé de A.B. »
  9. Dr. Moulinier, « Attestation de la bonne santé de A.B. »
  10. A.B., « Lettre adressée à Antoine Priore »
  11. Dr. Parroche, « CR Biopsie du larynx de G.R. »
  12. Dr. Phillip, « Demande de prise en charges de G.R. »
  13. Dr. Parroche, « CR biopsie de G.R. »
  14. R. Pautrizel, « Journal d'octobre 1972 »
    J. Ducrot, « Lettre du 24 avril 1983 adressée à R. Pautrizel »
    J. Ducrot, « Lettre adressée à Mme F. Priore le 3 novembre 1983 »
  15. Dr. Carles, « CR anatomo pathologique de M. P. »
  16. Dr. Cabanie, « M.P. est en bonne voie de guérison »
  17. Dr. Connardeau, « Attestation de la bonne santé de M.P. »
  18. Dr. Carles, « CR Biopsie de Mme Q-C. »
  19. Dr. Carles, « CR Biopsie sur Mme Q-C. »
    Dr. Machy, « CR Biopsie sur Mme Q-C. »
  20. H. Dagréou, « CR du traitement de Mme Dagréou par Antoine Priore »
  21. Dr. Dagréou, « Lettre du 5 octobre 1961. »
  22. Pr. Tayeau, « Lettre du 16 décembre 1961. »
  23. Dr. Grenoilleau, « Lettre du 8 mai 1961. »
  24. Pr. Tayeau, « Lettre du 9 février 1962. »

La société S.O.V.I.R.E.L. et Antoine Priore modifier

Le traitement des malades par Antoine Priore provoqua, en 1957 ou 1958, une rencontre qui se concrétisera par une collaboration exemplaire dans le cadre de l'affaire Priore.

M. Philippe Vène, directeur commercial pour le sud-ouest de la société S.O.V.I.R.E.L. (Société des Verreries Industrielles Réunies du Loing) de Bagneaux, filiale du groupe St. Gobain (et plus tard, de la société américaine Corning Glass Inc.) est à l'affût des débouchés intéressants en verrerie scientifique. Au cours de ses pérégrinations autour de Bordeaux il entend parler d'Antoine Priore, de sa machine, et des soins prodigués auprès des malades du cancer. Or l'élément central de l'appareil Priore se trouve être un gros tube électronique en verre... P. Vène réalise rapidement que si l'efficacité du traitement est prouvée, les conséquences médicales seront révolutionnaires et économiquement fructueuses. Il décide de persuader la direction de la S.O.V.I.R.E.L. d'aider Antoine Priore.

Un accord tacite s'établit entre MM. Vène et Priore : en cas de commercialisation des appareils, l'exclusivité de la fabrication des tubes serait confiée à la S.O.V.I.R.E.L.

L’aide de la S.O.V.I.R.E.L. à Antoine Priore fut stimulée et d'autant plus substantielle que Priore prodigua des soins au père de P. Vène qui souffrait d'un cancer [1] et à M. Borocco, l'un des directeurs de St. Gobain, qui souffrait d’une sclérose en plaques. M. Borocco était convaincu [2] que son état de santé était amélioré par le traitement effectué à l'aide de l'appareil Priore.

Pour établir leur maîtrise technique de ces lampes à plasma la S.O.V.I.R.E.L. les fabriquait selon les desiderata d'Antoine Priore et les lui fournissait gratuitement. Au total, plus de 19 lampes furent fabriquées pour lui, chacune valant plusieurs dizaines de milliers de francs !

À partir de 1958, et jusqu'en 1981, Pierre Genty, ingénieur chez S.O.V.I.R.E.L., eut la responsabilité de la fabrication des lampes. En 1974 il fut détaché à Bordeaux afin de s'occuper exclusivement de l'appareil Priore. En plus de cette aide matériel, P. Vène épaula Antoine Priore pour la rédaction de son premier brevet, ainsi que pour des projets de publications scientifiques et lui donna des conseils juridiques quand il était en conflit avec d'autres industriels (voir §9). L'aide de la S.O.V.I.R.E.L. sur le plan scientifique passait par l'intermédiaire du directeur du laboratoire des recherches à St. Gobain, Ivan Peychès [3]. Ce dernier s’est rendu plusieurs fois à Floirac pour faire des mesures physiques élémentaires de caractérisation du rayonnement émis par l’appareil.

Il n'y eut jamais de cadre juridique liant la S.O.V.I.R.E.L. et Antoine Priore. Leurs rapports étaient basés sur une confiance mutuelle, un respect de la parole donnée et une considération réciproque. La société S.O.V.I.R.E.L. a soutenu Antoine Priore au-delà de toute logique commerciale, sans doute parce que ses dirigeants et certains de ses personnels, convaincus par des effets thérapeutiques observés ou vécu par eux, étaient ou sont toujours des priorephiles passionnés.

Les détails de cette association sont décrits dans la note S.O.V.I.R.E.L..

Références modifier

Une expérimentation avec des rats cancéreux modifier

Le Dr Berlureau, après avoir essuyé le mépris des physiciens et des cancérologues, s'adresse directement au professeur Francis Tayeau, vice-doyen de la faculté de médecine de Bordeaux. Le Pr Tayeau fait preuve d'un esprit plus ouvert que les professeurs Servant, Lachapelle et Reboul. En 1959 il délègue deux chercheurs, le Dr Jean Biraben, responsable du département d'anatomie pathologique de la faculté et son assistant, le Dr Guy Delmon, pour expérimenter l’appareil sur des animaux.

Ces deux scientifiques travaillent, depuis quelques années, sur les tumeurs cancéreuses du rat et en particulier sur la tumeur T8, isolée par Guérin [1] en 1934, et pour laquelle personne n'a encore trouvé de traitement efficace.

Leur surprise est immense lorsque, après 12 mois d’expérimentation, ils constatent que 70% des tumeurs greffées sur les rats régressent après le traitement avec l’appareil de Priore. C'est, en effet, la première fois qu'on peut observer une guérison dans cette forme très virulente de cancer.

Avec le concours d’Antoine Priore, qui modifie quelques paramètres de l’appareil : la durée d'irradiation, la fréquence H.F., l'intensité du champ magnétique, etc. Leurs tentatives sont couronnées de succès. Les résultats qu'ils observent sont sans ambiguïté : les tumeurs greffées cessent d'évoluer et régressent à 100%.

De tels résultats sont susceptibles d'intéresser vivement l'Académie de médecine.

Pourtant, les deux chercheurs ne les publient pas. Pour quelle raison ?

Il se trouve que Dr Biraben doit passer l'agrégation et que son président de jury n'est autre que le professeur Lachapelle, qui considère Antoine Priore comme un charlatan. Celui-ci ne laisse aucun choix à Biraben : « De deux choses l'une. Ou bien vous passez votre concours et vous pouvez espérer la carrière que vous méritez, ou bien vous publiez les résultats obtenus avec Antoine Priore. Mais il ne vous sera pas possible de faire les deux à la fois ».

Le Dr Biraben se plie au chantage et est reçu à l’agrégation. (Il fera une publication de ses résultats en février 1966[2], après la publication des travaux de Rivière, Priore et Guérin en 1964 et 1965 qui confirment et dépassent les siens.)

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Une Commission d’experts modifier

Le maire de Bordeaux, Jacques Chaban-Delmas, ancien compagnon de résistance d'Antoine Priore et futur Premier ministre, est alors informé des résultats constatés par ces deux universitaires, ainsi que d’une demande de subvention d’Antoine Priore afin d’améliorer son installation. Il décide de réunir une commission scientifique le 21 juin 1960, chargée d'analyser en détail les résultats observés par Biraben et Delmon et de lui donner un avis sur leur importance.

Cette première commission va cependant rejeter les observations expérimentales.

Cette attitude peut paraître étrange mais elle s'explique par le mode de fonctionnement actuel de la science. Aussi indéniables que puissent être des résultats observés par l'expérimentation, ils ne pouvaient être reconnus et pris en compte par la communauté scientifique tant qu’une description précise sur la manière de les obtenir avait été publiée, afin de permettre à un autre chercheur de les reproduire.

Or, ni Biraben, ni Delmon ne peuvent décrire la nature exacte des rayonnements mis en œuvre dans la machine de Priore et ils ne sont pas capables de reproduire un appareil semblable.

Il faut préciser qu'Antoine Priore, qui vit dans l'obsession de se faire voler sa découverte et de voir d’autres expérimentateurs arriver au but (c’est-à-dire le traitement des cancers humains) avant lui, se refuse à dévoiler la nature exacte du rayonnement émis par son appareil et à indiquer les différents paramètres techniques qui permettent son émission. Il souhaite que son invention soit développée dans la région de Bordeaux même, sa région d'adoption, et il craint que s'il livre son secret, le dossier soit alors transféré à Paris, où siègent les plus hautes institutions médicales. Toutes ces raisons le conduiront à garder, tout au long de sa vie, le secret de son appareil.

Mais, il existe aussi d'autres raisons, moins avouables et plus humaines, derrière ce rejet.

Il faut savoir, en effet, que la décision rendue par cette commission n'a pas pu être adoptée à l'unanimité de ses membres. L'un d'entre eux, et non le moindre, se trouve être le Professeur Lachapelle, qui a déjà eu l'occasion de refuser d'accorder le moindre intérêt aux résultats obtenus avec la machine de Priore. Il croit, sans doute sincèrement, qu’Antoine Priore est un charlatan. Il le condamne parce qu’il traite des malades du cancer avec son appareil. Le professeur Lachapelle néglige totalement le fait que personne dans le monde « officiel » de la lutte contre le cancer n’a réussi à guérir des rats greffés avec la tumeur T8. Étant le seul cancérologue de cette commission, sa voix, sur une question de cancer expérimental, fut prépondérante.

Lorsqu'il apprend que la décision de rejet n'a pu être obtenue à l'unanimité et qu'il est possible que la découverte d’Antoine Priore soit importante, Jacques Chaban-Delmas demande au Pr Tayeau de constituer d'une nouvelle commission et le ré-examen du dossier.

Craignant de se voir déjugé, le Pr Lachapelle obtient alors la nomination à cette nouvelle commission du professeur Jean Courtial, de l'Institut du radium de Paris, l'une des plus hautes autorités de l'époque en matière de cancer. Le professeur Courtial écrivit une lettre le 11 août 1960 [1], dans laquelle il assimile l’appareil de Priore à un générateur de rayons X ou gamma. Il s’interrogeait sur le fait que le traitement de Priore étant vanté comme si efficace, il n’existe pas de données sur les malades traités. En conclusion, il condamne Antoine Priore parce qu’il n’a pas présenté un travail clinique !

La deuxième commission a été réunie le 3 décembre 1960 à la mairie de Bordeaux [2]. Les voix des cancérologues sont encore prépondérantes, elle rejette la demande de subvention présentée par Biraben, Delmon et Priore et recommande qu’Antoine Priore fasse connaître sa méthode en détail.

Aucune de ces deux commissions n’a visité le laboratoire d’Antoine Priore, ni envisagé des expérimentations complémentaires. Cependant, les cancérologues bordelais, probablement très méfiants et « hautains » à l'égard d'Antoine Priore, laissent la porte entr'ouverte. Le Pr Reboul acceptait le principe de laisser Antoine Priore traiter certains de ses patients [3]. Malheureusement, la direction régionale des hôpitaux de Bordeaux n’acceptait pas que des malades de la fondation Bergonié soient transportés au domicile privé d’Antoine Priore pour leur traitement [4]. Le Pr Lachapelle était disposé à donner un local dans la fondation Bergonié pour l’installation de l’appareil et pour l’expérimentation animale [5]. Cette fois, c’était Antoine Priore qui refusait, car c’était matériellement impossible pour lui de démanger son appareil et, comme toujours, il ne voulait pas laisser échapper « son secret ». Jacques Chaban-Delmas a essayé de relancer la commission en 1962, mais sans succès.

Il est clair que les cancérologues bordelais étaient convaincus qu’Antoine Priore était un charlatan et que Priore et ses amis étaient convaincus de la mauvaise foi des universitaires. Les deux camps avaient, en partie, raison. Le malaise produit par cette commission et ses suites, surtout dans le milieu des cancérologues parisiens, poursuivra Antoine Priore et ses amis pendant des années.

Le déroulement de la commission est décrit en détail dans la note La commission de 1960.

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Les cancérologues de Villejuif modifier

Le professeur Lachapelle ayant réussi à discréditer les recherches de Biraben et Delmon dans la communauté scientifique et médicale de la région bordelaise, le Dr Berlureau et Antoine Priore sont allés porter l’affaire à Paris.

En juillet 1963 ils sont entrés en contact avec le professeur Maurice Guérin lui-même, au centre anti-cancer de Villejuif. Le professeur Guérin, mis au courant des résultats obtenus par Biraben et Delmon, décide immédiatement de confier à son assistant, le Dr Marcel-René Rivière, la mission d'expérimenter l’appareil Priore sur la tumeur T8 et sur deux autres cancers expérimentaux utilisés à Villejuif : le lymphosarcome lymphoblastique LS347 et une tumeur spontanée, la LS2.

Pendant dix-huit mois, Marcel-René Rivière va se consacrer à cette tâche, et le 9 décembre 1964, il adresse une « note pour publication dans les comptes rendus de l'Académie des sciences », dans laquelle il décrit le mode d'expérimentation et l’effet de guérison de la T8 greffée sur des rats.

Un autre personnage essentiel dans cette affaire apparaît ici.

II s'agit du professeur Robert Courrier, endocrinologue très réputé qui, depuis les années 30, a la charge du poste de secrétaire perpétuel de l'Académie des sciences et qui va devenir, par la suite, président de l'Académie de médecine.

C'est en effet au Pr Courrier que le Dr Rivière doit s'adresser pour obtenir la publication de ses articles dans les Comptes rendus de l'Académie. Les deux hommes se connaissent depuis l'époque où Rivière a passé son doctorat sous sa direction.

Robert Courrier, convaincu de l’importance potentielle des résultats, décide de confier le dossier à différentes institutions françaises, responsables du financement de projets de recherche scientifique [1].

C'est ainsi qu'il adresse un courrier au ministre de la recherche, Gaston Palewski, et au directeur du C.N.R.S., Pierre Jacquinot, dans lequel il leur demande de recevoir Antoine Priore et le Dr Rivière. Cet entretien aura effectivement lieu le 13 janvier 1965, mais il tournera au désastre.

Empli d'enthousiasme, depuis qu'il a démontré que son rayon a un effet curatif chez les rats cancéreux, Antoine Priore s'est entièrement focalisé sur cette maladie. Cela peut d'ailleurs se comprendre. Voilà un immigrant italien, sans argent ni grands moyens, complètement hors des circuits officiels de la recherche médicale, qui veut offrir à l'humanité un traitement du cancer.

Pour lui, les expérimentations, les contrôles, les vérifications, et la recherche sont une perte de temps. J'ai inventé une machine qui guérit le cancer. Prenez-la et traitez vos malades avec. Ne vous occupez plus du reste. Voilà à quoi se résumait son point de vue.

Pour ces différentes raisons - la moindre n'étant d'ailleurs pas que les administrateurs scientifiques ne se sentent jamais très à l'aise lorsqu'ils se trouvent confrontés à un inventeur qui n’est pas du sérail et n’a pas eu à franchir les mêmes obstacles qu’eux au cours de leur carrière - le ministre et le directeur du C.N.R.S. vont se méfier d'Antoine Priore.

Ils se contentent de demander à un physicien, le Pr Alfred Kastler, d'aller se pencher sur l'appareil pour en déterminer le fonctionnement. Lorsque ce physicien revient de sa visite à Bordeaux, au cours de laquelle, accompagné du Pr Servant, il a simplement regardé l’appareil, « les mains dans les poches », il dit qu'il lui a été totalement impossible de comprendre quoi que ce soit à la machine de Priore [2].

Le 15 février 1965, le Pr Rivière adresse un deuxième article pour publication à l'Académie. Il s’agit d’un autre type de tumeur cancéreuse, qui n'a encore jamais pu bénéficier d'un traitement actif [3] : le lymphosarcome lymphoblastique 347 (LS347). Les résultats qu'il observe sont encore spectaculaires.

Vu l’enjeu, Robert Courrier décide de vérifier les observations du Pr Rivière. Il confie la tâche à sa plus fidèle assistante au Collège de France, madame Anne-Marie Colonge. Elle est chargée de répéter à Floirac l’expérience sur les rats greffés avec la tumeur LS347. L’expérience est un succès [4]. Mme Colonge revient à Paris avec ses rats guéris, très impressionnée par tout ce qu'elle a pu observer.

Pendant ce temps, le Pr Rivière n'est pas resté inactif. Il a effectué une nouvelle série d'expérimentations, sur des tumeurs plus malignes, les lymphosarcomes LS2 de la souris et a adressé une troisième « note » décrivant ses résultats au Pr Courrier.

Celui-ci, définitivement convaincu de l’importance des conséquences biologiques du rayonnement émis par l’appareil de Priore, décide alors de présenter en personne ces nouveaux résultats, à l'Académie des sciences, au cours d'une intervention solennelle, le 1er mars 1965.

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Scandale à l’Académie des sciences modifier

Quelques jours avant la date fixée pour ce discours solennel à l'Académie des sciences, la presse[1] a vent d’une information selon laquelle on a découvert un nouveau traitement contre les cancers... humains. Elle dépêche aussitôt une horde de journalistes dans le laboratoire de Priore. Celui-ci refuse de les recevoir et publie un communiqué [2], dans lequel il exprime sa gratitude à tous ceux qui lui ont apporté leur aide au cours des années passées. À Rennes, Dr Rivière, dans un autre communiqué à la presse[3] insiste sur le fait que ses travaux sont purement expérimentaux, concernant seulement des animaux greffés et qu’il ne sera pas question de traitement des malades humains avant de longues années de recherche.

Les journalistes, laissés sur leur faim, s'adressent alors aux Professeurs Lachapelle et Reboul de la Faculté de médecine de Bordeaux, pour obtenir les informations dont ils ont besoin pour nourrir leurs articles. Ceux-ci leur annoncent sèchement que la machine de Priore n'a rigoureusement aucun intérêt et qu'elle ne vaut même pas le déplacement[4].

Dans les jours qui suivent, les articles publiés dans la presse sont clairement partagés entre, d'un côté, ceux qui présentent Antoine Priore comme un vulgaire charlatan et, de l'autre, ceux qui annoncent, en gros titres, un traitement potentiel du cancer humain.

Cet intérêt très vif et la polarisation de la presse autour des travaux d'Antoine Priore, était en rapport avec un fait divers, présent dans tous les esprits de l'époque : "L'affaire Naessens". Gaston Naessens, biologiste autodidacte, prétendait avoir inventé un remède miracle contre le cancer : l'Anablast. Il traitait, contre une forte rémunération, des malades à Bastia, en Corse. Parmi ses patients plusieurs enfants leucémiques, détournés de la médecine classique, sont morts. Les poursuites judiciaires contre Naessens faisaient les gros titres dans la presse et son procès pour pratique illégale de la médecine et de la pharmacie eut lieu à Paris en avril 1965[5].

Une analyse de l’interaction et de l’influence de la presse dans l’affaire Priore est décrite dans la Note La Presse et l'Affaire Priore.

Tout ce battage médiatique finit par alarmer la communauté scientifique, et notamment le Dr Wilhelm Bernhard de Villejuif, spécialiste mondial en microscopie électronique. Celui-ci demanda[6] à son ami Robert Courrier de surseoir à son intervention. Il lui laissa entendre qu'elle va mettre en danger sa réputation personnelle, ainsi que celles du Pr Guérin et du Pr Rivière et de l'Institut de Villejuif tout entier.

La peur d'une autre "Affaire Naessens" était bien réelle.

Robert Courrier croit que c’est son devoir de scientifique de rapporter des faits expérimentaux qu’il a dûment contrôlés.

Le 1 mars 1965, à l’Académie, les places réservées au public sont combles.

Le Pr Courrier s'adresse solennellement aux membres de l'Académie. Il présente les différents travaux de recherche effectués avec l’appareil d’Antoine Priore et conclut son intervention en déclarant :

L'action biologique des champs magnétiques est l'objet de recherches intenses aux États-Unis. Dans des institutions spécialisées, l'influence de ces champs sur des cultures de tissus, des microbes, différentes espèces de plantes, des diastases et des tumeurs, est en cours. Jusqu'à présent, les résultats obtenus sur des tumeurs greffées semblent moins significatifs que ceux que nous avons présentés aujourd’hui.

Quand il s'agit d'un problème aussi grave que le cancer et qu'on voit poindre une lueur, On a le devoir de rechercher ce que représente cette lueur ; On n'a pas le droit de l'éteindre avant de savoir ce qu'elle vaut.

Après en avoir terminé, le Pr Courrier va se rasseoir à sa place. Le Pr Antoine Lacassagne, ancien directeur de l’Institut du Radium, se dresse parmi l'assistance. Il semble que le Pr Lacassagne[7] ait été poussé par ses collègues bordelais, Lachapelle et Reboul afin de faire contrepoids à l’emballement de la presse à l’égard des travaux effectués à l’aide de l’appareil de Priore. Il s'inquiète perfidement des raisons pour lesquelles les notes publiées ne font aucune mention bibliographique des travaux effectués sur les effets biologiques observés sur les tumeurs cancéreuses à partir de rayonnements électromagnétiques.

Le Pr Lacassagne, continuant l’attaque, utilise une argumentation pour le moins étrange : les résultats observés n'ont aucune valeur, dans la mesure où il s'agit, dans ce protocole expérimental, de tumeurs greffées et non de maladie spontanée.

Le fait qu'aucun traitement connu, parmi les dizaines de tentatives faites par divers centres de recherche contre le cancer, à part celui de Priore, ne soit jusqu’alors parvenu à faire régresser la tumeur T8 n'a donc aucune importance à ses yeux.

Il termine son intervention en qualifiant les expériences présentées « d'impromptus ».

Le Pr Courrier lui rétorque que cette dernière remarque est ridicule.

À ces mots, le Pr Lacassagne quitte ostensiblement l'assemblée.

Selon des témoins, ces deux vieux messieurs, très dignes, étaient sur le point de s’engager dans un pugilat en pleine séance de l’Académie !

Aucun débat, aucune discussion sérieuse ne suivra l'intervention solennelle du Pr Courrier. Mais dans les coulisses, c’est l’effervescence. Les académiciens se demandent ce qu’il faut penser ; il y a des partis pris pour ou contre. Les réunions de l’I.R.S.C. de Villejuif sont houleuses et des propos quasi diffamatoires sur les personnes de Robert Courrier et d’Antoine Priore circulent. La presse et la radio en parlent longuement[8].

Les diverses interactions entre Antoine Priore et l’Académie des sciences sont décrits en détail dans les notes : Académie des science et Le rapport Bernard-Latarjet.

Références modifier

Les visées commerciales de la société Leroy-Somer modifier

Le tapage médiatique provoqué par la séance à l’Académie des sciences suscita l’intérêt de gens qui ont immédiatement pressenti l’immense potentiel financier des « appareils qui guérissent le cancer ». Parmi eux se trouvait Georges Chavanes, président du directoire de la société Moteurs Leroy d’Angoulême. Cette société (qui deviendra plus tard Moteurs Leroy-Somer) est une P.M.E. fabriquant des moteurs et des pompes électriques. Elle jouera un rôle décisif dans l'échec d'Antoine Priore.

Dès le 4 mars 1965, Georges Chavanes, en compagnie de son ingénieur Paul Ribeau, rendaient visite à Antoine Priore et lui proposaient[1] de mettre à sa disposition un laboratoire de 500 m2 à Angoulême. Quelques jours plus tard, le 18 mars, Chavanes augmenta son offre[2] et proposa à Antoine Priore de lui construire une usine à Bordeaux, pour exploiter ses brevets, à la condition que Priore signe un contrat d’exclusivité avec la maison Leroy !

Après quelques hésitations de la part d'Antoine Priore et ses amis, la société S.E.R.E.S.O. (Société d'Études et de Recherche Électronique du Sud-Ouest) fut créée le 15 juillet 1965, avec Chavanes comme gérant et Antoine Priore comme directeur technique. Sans doute Antoine Priore imaginait-il que ses rapports avec la société Leroy-Somer, et en particulier avec MM. Chavanes et Ribeau, seraient de la même nature que ses relations avec la S.O.V.I.R.E.L. et avec MM. Vène, Gousset, Régis et Genty. Si tel était le cas, il se trompait lourdement[3].

Très vite le prototype d’un appareil fut construit par Paul Ribeau dans un contexte plutôt conflictuel avec Antoine Priore. Au début de 1966, Chavanes proposa cet appareil à l’I.R.S.C. (Institut de Recherches Scientifique sur le Cancer) de Villejuif pour la somme de 751 000 F. L’I.R.S.C., par le biais de son administrateur, Jacques Crozemarie, était prêt à l’acheter [4] et à l’expérimenter sous le contrôle des professeurs Latarjet et Denoix[5].

En fait, l’appareil, construit sous la direction de Ribeau et que Chavanes veut vendre n’est pas au point et ne donne pas les résultats biologiques d’un véritable appareil Priore[6]. Antoine Priore réussit à arrêter la vente car, après la campagne de presse de mars 1965, le mauvais fonctionnement de cet appareil à Villejuif aurait ruiné tout ses espoirs. Bien évidemment, le refus de vente subit d’un appareil à l’I.R.S.C. alimentera les suspicions de charlatanisme des cancérologues.

Au cours des années 1965-1966 les rapports entre Antoine Priore, Paul Ribeau et la S.E.R.E.S.O. se détériorent considérablement. Apparemment Ribeau se considère comme le supérieur technique d’Antoine Priore et ne respecte pas les consignes de ce dernier[7]. En contrepartie, Antoine Priore n’a probablement pas une totale confiance en la S.E.R.E.S.O. et en Paul Ribeau, car il garde son « secret ».

En plus des tiraillements entre les hommes, il y a eu des comportements juridiques étranges de la part de la S.E.R.E.S.O. : un contrat de licence, daté du 28 décembre 1966, entre Antoine Priore et la S.E.R.E.S.O., a subi des modifications manuscrites, à l'insu d'Antoine Priore, entre la signature des intéressés et son enregistrement officiel par Georges Chavanes[8]. Philippe Vène, de la S.O.V.I.R.E.L., qui a eu les deux versions du document entre ses mains, tentera de clarifier la situation[9], mais sans succès.

Les relations entre la S.E.R.E.S.O. et Antoine Priore continuent à se dégrader et ce dernier démissionne de la société[10] en juillet 1967. La S.E.R.E.S.O. essaie de continuer sans Antoine Priore, mais Paul Ribeau ne possédant pas les connaissances techniques requises, son appareil, dénommé le PR1, fut un échec total[11]. La société S.E.R.E.S.O. fut dissoute par anticipation le 7 juillet 1969.

Les relations sadomasochistes entre Antoine Priore et la société Leroy-Somer (qui reviendra dans l’affaire en 1971) sont décrites en détail dans la note La société Leroy-Somer et Antoine Priore.

Références modifier

  1. G. Chavanes, « Lettre adressée à A. Priore le 5 mars 1965 »
  2. G. Chavanes, « Lettre adressée à A. Priore le 18 mars 1965 »
  3. A. Priore, « Lettre adressée au Pr. Maréchal le 5 décembre 1966 »
  4. J. Crozemarie, « Lettre adressée à G. Chavanes »
    J. Crozemarie, « Lettre adressée à A. Maréchal »
    P. Grabar, « Lettre adressée au Ministre de la recherche le 2 décembre 1965 »
    G. Chavanes, « Lettre adressée à J. Crozemarie le 28 février 1966 »
  5. R. Courrier, « Note personnelle - janvier 1966 »
  6. M. Fournier, « Lettre adressée au Pr. Courrier » }}
  7. A. Priore, « Lettre adressée au Pr. Maréchal le 15 octobre 1966 »
  8. S.E.R.E.S.O., « Contrat Priore ver. a »
    S.E.R.E.S.O., « Contrat Priore ver. b »
    S.E.R.E.S.O., « Contrat Priore ver. c »
  9. P. Vène, « Lettre adressée à G. Chavanes le 30 janvier 1967 »
    P. Vène, « Lettre adressée à A. Priore le 7 février 1967 »
    P. Vène, « Lettre adressée à G. Chavanes le 9 février 1967 »
    P. Vène, « Lettre adressée à A. Priore le 9 février 1967 »
    P. Vène, « Lettre adressée à A. Priore le 1 mars 1967 »
    G. Chavanes, « Lettre adressée à P. Vène le 27 janvier 1967 »
    G. Chavanes, « Lettre adressée à P. Vène le 2 février 1976 »
  10. A. Priore, « Lettre adressée à G. Chavanes le 7 juillet 1967 »
  11. A. Priore, « Lettre adressée au Pr. Maréchal le 2 mars 1967 »
    A. Priore, « Lettre adressée à G. Chavanes le 17 août 1967 »
    F. Berlureau, « Lettre adressée au Pr. A. Maréchal »

La rumeur de substitution d’animaux et de fraude modifier

Au cours de cette débâcle commerciale a surgi un problème qui empoisonnera le dossier Priore pendant plus de vingt années : la rumeur selon laquelle les effets biologiques du rayonnement Priore n’étaient qu’une vulgaire escroquerie ; qu’au lieu de guérir des animaux, Antoine Priore et/ou ses collaborateurs bordelais pratiquaient la substitution d’animaux malades par des animaux sains.

Cette rumeur a été répandue et savamment entretenue par le professeur Roger Latarjet, cancérologue réputé (chercheur à Villejuif, directeur de la Fondation Curie, etc.), à partir de mars 1966 et jusqu’à la mort d’Antoine Priore en 1983. Elle a laissé une marque indélébile dans l’affaire et dans la conscience collective des journalistes et des administrateurs de la recherche scientifique française ayant eu à traiter le dossier.

À l’origine, la rumeur portait sur les travaux d’une équipe de chercheurs du Chester Beatty Institute de Londres, venus à Floirac en janvier 1966 pour expérimenter l’appareil Priore. La rumeur a refroidi les relations entre les deux centres, au point que le Pr Haddow, directeur du Chester Beatty Institute, a arrêté toute collaboration avec Antoine Priore en septembre 1966[1], en attendant que le Pr Latarjet éclaircisse la situation.

Nous avons analysé, dans une longue note : L'affaire des souris anglaise, l’origine et le contexte de cette rumeur et nous y montrons que celle-ci est totalement fausse, sans fondement crédible. Nous en concluons à la malveillance de la part du professeur Latarjet et à la légèreté de ceux qui ont colporté des rumeurs de « on-dit » sans se soucier de leur véracité.

Références modifier

Le rayonnement Priore et l’immunologie modifier

L’affaire Priore aurait pu en rester là, en cette année 1966, si un nouveau personnage n'était entré en scène : le professeur Raymond Pautrizel. Ce chercheur avait acquis, à la Faculté de médecine de Bordeaux, une réputation internationale grâce à ses travaux dans une discipline nouvelle : l'immunologie parasitaire. Il fut désigné pour occuper la première chaire d'immunologie française. Ses travaux portaient plus spécialement sur un parasite, le trypanosome, responsable entre autres de la maladie du sommeil dans les pays tropicaux.

Lorsque le Pr Courrier avait dépêché Mme Colonge dans le laboratoire d'Antoine Priore en février 1965 pour répéter une des expériences du Pr Rivière, il s'était adressé à Raymond Pautrizel, pour lui faciliter la tâche. C'est ainsi que Raymond Pautrizel apprit l'existence de la machine de Priore.

Après avoir pris connaissance des résultats déjà publiés dans la presse scientifique, il s'intéressa de très près à ce dossier.

« Ce qui m'a stupéfait », a-t-il dit, « c'est de voir les animaux témoins mourir de leur tumeur cancéreuse en trois semaines, alors que dans le lot des animaux traités par Priore, les tumeurs fondaient. Ces animaux repartaient ensuite au laboratoire du professeur Courrier en état de parfaite santé ».

Après avoir pesé les données du problème, le Pr Pautrizel en vient à la conclusion que la machine de Priore, quel que soit son mode de fonctionnement, n'agit pas directement sur les cellules cancéreuses, mais plutôt d'une manière indirecte, en fournissant à l'organisme de nouveaux instruments de défense immunitaire qui lui permettent de mieux combattre le cancer.

Cette hypothèse va prendre corps avec une nouvelle expérimentation réalisée par le Pr Rivière et le Pr Guérin.

Ces chercheurs ont réimplanté des greffes de la tumeur LS347 sur des rats préalablement guéris de cette tumeur par le traitement de Priore. Ils ont constaté qu'aucune de ces greffes ne prenait. Les rats étaient immunisés contre ce cancer.

Par contre, le même protocole appliqué en greffant la tumeur T8 sur des rats guéris de la tumeur LS347 conduisait à la mort de tous les animaux.

Ils en concluent que l'immunité acquise par les animaux était spécifique d'un type particulier de tumeur.

Il se confirme alors dans l'esprit du Pr Pautrizel que le rayonnement émis par la machine affecte le système immunitaire des animaux. Comme il maîtrise parfaitement le sujet, il envisage l'effet de la machine de Priore sur les maladies provoquées par les trypanosomes où les défenses immunitaires sont mises en défaut.

Le 1 août 1966, le Pr Pautrizel publie un premier article dans les Comptes rendus de l'Académie des sciences, sous l'intitulé immunologie : Influence de champs électromagnétiques et magnétiques associés sur l'immunité des souris infectées par Trypanosoma equiperdum'.

Dans sa conclusion, il écrit : « L'intervention des facteurs spécifiques de la défense est révélée par l'immunité acquise... qui permet aux animaux de résister à des réinfestations par des Trypanosomes de la même souche. Si l'irradiation est commencée avant l'infestation et si le traitement est maintenu quelques jours après, l’extrême réceptivité naturelle des souris au Trypanosoma equiperdum est transformée en une résistance totale, au point que pas un seul Trypanosome ne peut être décelé dans le sang. C'est une exaltation considérable de l'immunité non spécifique de ces animaux qui arrive à bloquer complètement le développement de la trypanosomose expérimentale ».

Pour la première fois, le domaine de recherche se déplaçait du domaine étroitement spécialisé de la cancérologie, vers celui, beaucoup plus vaste, de l'immunologie.

Les expériences du Pr Pautrizel en 1966 le convaincront de l’importance considérable des effets biologiques du rayonnement émis par l’appareil. Malheureusement, l’appareil qu’il utilisait tombait fréquemment en panne, il était souhaitable, comme le voulait Antoine Priore, d’en construire un plus fiable et plus puissant. Après le fiasco de l’appareil de la S.E.R.E.S.O., Antoine Priore avait rompu avec cette société. Pour construire un nouvel appareil, le Pr Pautrizel réussit à trouver des moyens financiers (dons privés, subventions de l’O.M.S. (Organisation Mondiale de la Santé), de la F.R.M.F. (Fondation pour la Recherche Médicale Française), de l'Université, etc.) pour aider Antoine Priore. L’appareil fut construit par Antoine Priore entre la fin de 1966 et la fin de 1968. C’est avec cet appareil, que nous désignons par le sigle P4, que furent faites la plupart des expériences jusqu’à 1980.

En 1969, pour prévenir une éventuelle accusation de tricherie contre Antoine Priore, comme l’avait fait en 1966 le Pr Latarjet, le Pr Courrier demande au Pr Pautrizel d’organiser une expérience très strictement contrôlée. C'est sans doute l'épisode le plus étrange de cette affaire, d'un point de vue strictement scientifique. On constitue une commission, sorte de jury d'honneur, qui est chargée d'attester la véracité des faits observés.

Cette commission disparate va rassembler : le Préfet de région, le secrétaire général du Maire de Bordeaux, un général de l'Armée de l'air, le chef de la police de Bordeaux, plusieurs responsables de la sécurité sociale, le responsable des services d'électricité de la ville, le directeur du centre anticancéreux de Bordeaux, des membres de la Faculté des sciences et de médecine de l’Université de Bordeaux, le Doyen de la Faculté de droit et un huissier de justice, responsable de l'apposition et de la levée des scellés sur les cages d’animaux et sur la porte du laboratoire où étaient gardés les animaux traités et les témoins.

Le résultat, dûment attesté et signé par les personnalités mentionnées ci-dessus, indiquait que :

- sur les 30 souris inoculées et les 29 effectivement traitées par la machine de Priore (une souris était morte quelques minutes après l’inoculation, avant traitement.), 29 étaient toujours vivantes cinq jours plus tard ;
- sur les 30 souris inoculées non traitées, 30 étaient mortes dans les cinq jours ;
- les 30 témoins qui n'avaient été ni inoculés ni traités vivaient normalement.

L'expérience est décrite en détail dans la Note La commission de 1969

Le nouvel appareil de Priore étant en état de marche, le professeur Pautrizel s'adresse alors au ministère des armées (la D.R.M.E. - Direction des Recherches et Moyens d’Essais), pour obtenir une subvention de recherche. Une subvention lui est accordée et le Pr Pautrizel entreprend une série d’expérimentations pour montrer les effets biologiques du rayonnement émis par l’appareil, en particulier l’implication dans le processus biologique de certains systèmes de défenses immunitaires. En contrepartie la D.R.M.E. veut connaître les caractéristiques physiques du rayonnement. Deux physiciens du C.N.R.S. (Centre National de Recherche Scientifique), André-Jean Berteaud et André-Marie Bottreau sont chargés d’étudier ce rayonnement et ils sont envoyés en mission à Floirac. Ils passent plus d’un an à étudier les aspects physiques du rayonnement émis par l’appareil ‘’P4’’.

La confirmation des effets biologiques et la caractérisation du rayonnement obtenue par ces chercheurs en 1970 et 1971 sont décrites en détail dans les chapitres Les observations biologiques, Les appareils d'Antoine Priore et la Note La D.R.M.E. et la D.G.R.S.T..

La débâcle modifier

Avec les résultats obtenus par le Pr Pautrizel et par MM. Berteaud et Bottreau on pouvait penser que toutes les objections qui avaient été soulevées jusqu'alors allaient enfin être écartées et que le « rayonnement Priore » apparaîtrait dans la science dite « officielle ».

Dans cette situation deux suites logiques et naturelles pouvaient être envisagées :

  • Antoine Priore se liait avec un industriel d’envergure, spécialisé dans les techniques requises pour la fabrication de ces appareils (Thomson, C.G.R., Philips, Siemens, General Electric, etc.), prenant en charge tous les frais de recherche et de développement,
  • ou, avec l’aide des subventions de l'État, il construisait un appareil de type P4, dans un laboratoire universitaire où on lui garantissait la sauvegarde de ses droits d’inventeur et la confidentialité quant à ses « secrets ». Il est effectivement d'usage pour des laboratoires universitaires de travailler avec des industriels et d’accepter des contrats de confidentialité,

L’essentiel, quelle que soit la démarche entreprise, était d’avoir un appareil neuf et fiable, sur lequel on pourrait faire varier les différents paramètres du rayonnement pour faire une exploration rationnelle des plages d’efficacité biologique.

Antoine Priore récuse la première possibilité. Il ne veut pas perdre la maîtrise de son appareil et, dans un premier temps, il accepte la deuxième solution.

Le Pr Pautrizel est très favorable à ce choix et son laboratoire est prêt à accueillir un tel appareil. Il pense avoir convaincu Antoine Priore de l’utilité d’une telle solution. Le maire de Bordeaux, Jacques Chaban-Delmas, devenu Premier ministre, donne également son appui à cette solution. Du fait de cet appui, la D.G.R.S.T. (Délégation Général de la Recherche Scientifique et Technique) décide d’accorder une subvention de 3,5 millions de francs pour la construction d’un appareil de type P4, mais à paramètres électromagnétiques variables.

La décision de principe est annoncée officiellement dans une conférence de presse par Pierre Aigrain (Délégué général pour la recherche scientifique et technique) et Hubert Curien (directeur général du C.N.R.S.) le 5 mai 1971. Cette conférence de presse fut longuement commentée dans la presse populaire et médicale[1]. Elle alimentait largement les rancœurs du milieu de la recherche médicale, pour qui « des millions allaient partir dans les poches d’Antoine Priore pendant que la vraie recherche médicale manquait cruellement de subventions ».

La campagne de dénigrement et d’acharnement contre Antoine Priore et les biologistes qui ont travaillé avec lui commence avec la parution, le 17 mai 1971, d'un article[2] dans L'Express, avec photographies truquées et propos tendancieux. L'auteur de l’article, Gérard Bonnet, ira jusqu’à comparer les résultats publiés sur le rayonnement de la machine de Priore à ceux de Trofim Lyssenko, ce biologiste soviétique de sinistre mémoire qui prétendait avoir découvert le gène prolétarien. Il essaie, en plus, de lier le nom de Chaban-Delmas à une escroquerie scientifique. Il fallait être un lecteur très averti pour réaliser que le « patron » de l’Express, Jean-Jacques Servan-Schreiber, candidat malheureux contre Chaban-Delmas pour la mairie de Bordeaux, essayait de régler des comptes. La grande majorité des lecteurs de cet article, et parmi eux beaucoup d'universitaires et de « décideurs », prirent ces propos mensongers pour argent comptant : Antoine Priore était un escroc et il allait être subventionné par l'État grâce à la complaisance de Chaban-Delmas ! (Dans la même veine, un peu plus tard, Jacques Chaban-Delmas a été harcelé par Le Canard Enchaîné, avec la publication de sa déclaration de revenus.)

Après une réunion à l’hôtel Matignon le 24 juin 1971, la gestion de cette subvention est confiée à l’A.D.E.R.A. (Association de Développement de l’Enseignement et de la Recherche en Aquitaine) et la décision de construire l’appareil sur le domaine universitaire de Bordeaux II, sous la direction d’Antoine Priore, est prise.

Au moment de l’accord officiel de la subvention, le 8 juillet 1971, intervient une modification de dernière minute, difficilement compréhensible : la subvention de la D.G.R.S.T. était accordée exclusivement à la société Leroy-Somer pour la construction de l’appareil chez Antoine Priore et sous la direction de Paul Ribeau !

Cette étrange volte face est analysée dans les notes Leroy-Somer et La D.R.M.E. et la D.G.R.S.T..

Le déblocage effectif des fonds traîne. Le marché[3], entre la D.G.R.S.T et Leroy-Somer, sera signé le 18 avril 1972 et la société S.E.R.A.P. (Société pour l’Exploitation du Rayonnement Antoine Priore), créée par Leroy-Somer en juin 1972 avec Ribeau comme P.D.G.[4].

Les retards dans le déblocage des fonds par la D.G.R.S.T. s’expliquent facilement.

D’abord, l’histoire des relations Priore - Leroy-Somer, l’appareil destiné à l’I.R.S.C de 1966 et le non-réalisation des expériences de contrôle demandées par la D.G.R.S.T. (1966-1967), sont toujours en mémoire.

Ensuite, un contrat entre Berteaud et la D.R.M.E. pour la construction d’un « appareil Priore simplifié » était en cours.

En effet, à la suite de leur étude de l’appareil P4, MM. Berteaud et Bottreau pensaient avoir percé « le secret Priore » et ils ont proposé à la D.R.M.E. de construire un appareil simple et peu coûteux au laboratoire de Berteaud à Bellevue, dans la région parisienne. Si Berteaud parvenait à obtenir les mêmes résultats biologiques avec un appareil relativement simple et bon marché, la D.G.R.S.T. n’avait nul besoin de subventionner Leroy-Somer.

L’appareil de Berteaud fut un échec total, sans le moindre effet biologique ; ses rapports[5] pour la D.R.M.E. en témoignent. La D.G.R.S.T. fut donc obligée, sous la très forte pression de Chaban-Delmas, de débloquer sa subvention auprès de Leroy-Somer.

Dès le départ, la construction de l’appareil P5 a commencé à déraper...

  • Pour la D.G.R.S.T. la subvention est destinée à la construction d’un appareil expérimental, une réplique du P4, à paramètres variables, pour optimiser les effets déjà constatés et, comme explicitement cité dans le contrat, vérifier les premières expériences sur les cancers greffés[6].
  • Pour la société Leroy-Somer, le but de la subvention était d’amorcer la commercialisation rapide des appareils et la voie royale vers les retombées économiques. Leur projet délirant de développement industriel (une usine employant 5 000  personnes à Bordeaux !) est décrit dans les documents[7].
  • Pour Antoine Priore, le but était l'utilisation de son association avec Leroy-Somer et de la subvention de la D.G.R.S.T. pour construire un appareil à visée thérapeutique humaine immédiate.
  Images externes
  « La maison de Priore en 1971 »
  « La maison de Priore en 1973 »

Avec des buts aussi divergents le naufrage du projet était prévisible. Après bien des retards, ce n’est pas une réplique de l’appareil P4 qui fut construite, mais un appareil monstre, le P5. Cet appareil nécessitait un bâtiment de trois étages pour l’abriter ! Voir les quelques photographies ci-contre de l’appareil et de son environnement.

Par sa force de caractère Antoine Priore imposait son point de vue. Il était le seul à avoir une vision globale de l’appareil qu’il voulait construire. Paul Ribeau jouait un rôle plutôt administratif et les ouvriers qui travaillaient sur le chantier suivaient les directives d'Antoine Priore.

Après bien des péripéties le P5 fut construit. Les détails de cette saga sont exposés dans la note Leroy-Somer. Lors des essais en février 1975, le Pr Pautrizel a pu vérifier les effets biologiques attendus sur plus de 280 souris infestées avec des trypanosomes. Malheureusement, des fausses manœuvres lors des modifications techniques du P5 détruisirent une grande partie de l’appareil.

La société Leroy-Somer était dans une situation financière précaire et dans l’impossibilité de financer seule les frais de recherche et de développement nécessaires à la mise au point de l’appareil. La comptabilité de sa filiale, la S.E.R.A.P., montre que pendant la période du 16 avril 1972 au 15 juin 1978 Leroy-Somer a dépensé:

- Construction de l’appareil a couté 4 091 966,50 F
- Construction du bâtiment a couté 947 523,59 F
- Frais de fonctionnement a couté 1 613 715,68 F

et elle a reçu 2 480 000 F de la D.G.R.S.T. (Après maints avertissements, les termes du contrat n’ayant pas été respectés, le reliquat, 1 020 000 F de la subvention fut annulé par le délégué général, Hubert Curien[8] le 21 novembre 1975.) Au lieu de rechercher des partenaires financiers ou industriels, qui ne manquaient pas (La fondation Mérieux, Siemens, Philips, De Laage, Poncet Mimram, Stevens, etc.), la société Leroy-Somer a choisi de garder la mainmise sur l’appareil et d’attendre une hypothétique manne de l'État.

À partir de 1972, l’odeur de soufre qui entourait « l’Affaire » dans les milieux académiques et administratifs a commencé à avoir des répercussions néfastes, d’abord pour les collaborateurs scientifiques d'Antoine Priore, puis pour Priore lui-même.

Le Pr Pautrizel fit plusieurs demandes de crédits de recherche auprès du Conseil scientifique de la Faculté de médecine de Bordeaux. Toutes lui furent refusées, sans jamais d’argumentation pour critiquer ses propositions de projets de recherche. Après des demandes très insistantes auprès de ses collègues, membres du conseil scientifique, Pautrizel apprit que si ses projets étaient refusés, c’est parce qu’il travaillait avec l’appareil Priore...

Le Pr Pautrizel était aussi directeur de l’Unité 89 de l’I.N.S.E.R.M. (Unité de recherches sur l’immunologie des affections parasitaires), unité créée spécialement pour lui en 1969. Naturellement, dans les rapports d’activité de son Unité, il faisait état de ses expériences effectuées en utilisant l’appareil Priore. En conséquence de quoi, toute demande de subvention, toute demande de poste de chercheur pour son Unité furent refusées par l’I.N.S.E.R.M. L’U89 fut la seule Unité de recherche I.N.S.E.R.M. sans chercheur I.N.S.E.R.M. !

Comme avec le Conseil scientifique de Bordeaux II, aucune critique ouverte des expériences avec l’appareil Priore ne fut formulée par les instances dirigeantes de l’I.N.S.E.R.M. Mais, progressivement, le Pr Pautrizel essuya des brimades. Son mandat de Directeur de l’Unité n’était renouvelé que pour 1 an (habituellement 5 ans), puis en décembre 1977 l’I.N.S.E.R.M. mit fin rétroactivement a son mandat et supprima l’Unité 89 ! Comme avec le Conseil scientifique, le Pr Pautrizel s’acharna afin de savoir pourquoi il y avait des sanctions à son égard. Petit à petit les langues se déliant il apprit que « c’était parce qu’il travaillait avec Antoine Priore ». Étrangement, le travail et les résultats biologiques obtenus avec l’appareil de Priore ne furent jamais critiqués !

Le fonctionnement de l’I.N.S.E.R.M. dans l’Affaire Priore est décrit dans la Note I.N.S.E.R.M..

Antoine Priore n’avait pas de diplômes universitaires. Ce fait a souvent été utilisé, par la presse et par certains « experts » qui n’ont jamais vu ses réalisations, pour le dénigrer en le traitant d’« amateur », de « bricoleur de dimanche » ou encore de « petit italien autodidacte ». Le Pr Pautrizel voulait pallier ce handicap en utilisant la possibilité offerte par l’Université de Bordeaux d’obtenir un doctorat d’université, ce qui, en effet, était possible en présentant une thèse sur des travaux personnels devant un jury, sans autre formalité. Une thèse décrivant l’appareil P4, entièrement conçu et construit par Antoine Priore, et les expériences biologiques sur les trypanosomes menées avec cet appareil méritaient très largement un tel doctorat.

Toutefois un écueil se dresse : les résultats ont été obtenus en immunologie avec des moyens purement physiques ; donc thèse de médecine ou thèse de physique ? Là encore, l’odeur de soufre et une certaine frilosité amènent les universitaires à se « passer la patate chaude ». La Faculté des sciences sort gagnante de ce petit jeu et le projet de thèse d’Antoine Priore passe sous l’égide de la Faculté de médecine ! M. le Pr Henri Bricaud, président de l’Université Bordeaux II, fut contraint et forcé de demander au Pr J. Bove (I.N.R.A.) de constituer un jury pour examiner le projet de thèse d’Antoine Priore et se prononcer à son sujet.

Tout semble bien parti. Cependant, le processus stagne ; le Pr Bricaud garde un exemplaire du projet de thèse pendant plus d’un an, sans le lire ! Divers membres du jury réclament des expériences complémentaires, proposent leurs propres hypothèses et demandent à Antoine Priore de les vérifier. À aucun moment ils ne considèrent tout simplement les faits déjà observés (comme est habituel pour un jury de thèse) et maintes fois reproduits dans des conditions expérimentales exemplaires : l’appareil P4 a produit des effets biologiques incontestables et un tel travail méritait un doctorat ! Lentement les tensions entre les protagonistes montent et en octobre 1977 le Pr Bove démissionne comme président du jury et l’Université Bordeaux II se désengage de la thèse d’Antoine Priore. La saga est décrite en détail dans la note La thèse universitaire d'Antoine Priore.

Ces facteurs humains illustrés par l’affaire Priore (luttes de pouvoir, intérêt de carrière, petites mesquineries, égoïsme etc.) sont monnaie courante dans la vie civile mais pour le grand public, la recherche médicale et scientifique avait une certaine image d’intégrité, d’honnêteté et d’objectivité. Les récents scandales de l’association A.R.C., les transfusions de sang contaminé par le virus du SIDA et l’hormone de croissance vendue par l’association France Hypophyse montrent que ces facteurs humains participent également à la vie scientifique. La situation « humaine » dans le monde scientifique en général est bien décrite par Maurice Allais (prix Nobel d'économie) dans un article[9] publié dans Le Figaro le 27 février 1999.

À la fin de l’année 1977, la situation est catastrophique :

  • le Pr Pautrizel, principal collaborateur scientifique d’Antoine Priore, est désavoué par l’I.N.S.E.R.M. ;
  • la D.G.R.S.T. a annulé la subvention accordée à la société Leroy-Somer ;
  • le projet de thèse universitaire d’Antoine Priore est abandonné ;
  • l’appareil P5 est en panne, sans moyen financier pour le réparer ;
  • Antoine Priore lui-même est sérieusement malade (diabète grave et accident vasculaire cérébral).

C’est dans ce contexte très morose, et avec un certain désespoir, que le Pr Courrier, secrétaire perpétuel de l’Académie des sciences, décide qu’il faut tenter le tout pour le tout : traiter certains cancers humains. Depuis 1966, pour éviter toute polémique, aucun malade n’a été traité avec l’appareil. Sous l’égide de Pr Courrier, les professeurs Dubourg, Pautrizel et Courty (futur président de l’ordre des médecins d’Aquitaine) commencent à traiter une dizaine de malades du cancer, au stade terminal de leur maladie. Traiter des malades d’environ 50 kg avec un appareil conçu pour traiter des petits animaux (souris, rats, lapins) peut sembler frôler l’inconscience, mais la décision n’est pas prise à la légère. Comme on pouvait s’y attendre, vu l’état des malades, les résultats furent modestes, mais encourageants : une patiente fut complètement guérie de son cancer et deux ou trois patients eurent une qualité de vie améliorée avec un report de l’issue fatale. Un compte rendu de cet essai clinique fut refusé par l’Académie de médecine[10] en décembre 1980.

En janvier, puis en mai 1980, le quotidien bordelais Sud-Ouest publie deux longs articles[11] sur l’Affaire Priore et les passions sont encore une fois relancées.

En février 1981, le Pr Pautrizel réussit à attirer l’attention du Président de la république V. Giscard d’Estaing sur l’importance potentielle de l’effet Priore. Le Président charge son conseilleur scientifique, l’amiral Pierre Emeury de s’occuper de la question. Celui-ci suggère que l’Académie des sciences propose un protocole expérimental au-dessus de tout soupçon, protocole que la C.R.E.S.S.A. (Centre de Recherches et d'Études du Service de Santé des Armées) serait chargé d’appliquer.

Cependant, l’Académie des sciences laisse traîner... et, les élections de mai 1981 amenant un changement politique en France, l'action prévue par l'amiral Emeury ne va pas aboutir.

En effet, le nouveau ministre de la recherche, Jean-Pierre Chevènement, alerté par les consignes laissées par l’amiral Emeury exige une réponse de l’Académie des sciences, mais au lieu d’une réponse à la demande initiale il reçoit, en mars 1982, un rapport sur l’Affaire Priore écrit par MM. Bernard et Latarjet, le même Pr Latarjet qui colporte depuis 1966 la rumeur qu’Antoine Priore est un escroc. La conclusion de ce rapport, dont les lacunes et les déficiences sont mises en exergue dans la note Le rapport Bernard-Latarjet, est étonnante. Les auteurs admettent que les effets biologiques constatés par le Pr Pautrizel sont bien réels, mais ils recommandent au ministre de ne pas subventionner cette recherche !

Le contenu de ce rapport fut communiqué au Pr Pautrizel par le cabinet du ministre le 2 mai 1983[12].

Antoine Priore est mort le 9 mai 1983, non d'un cancer, comme prétendaient certains priorephobes avec un sourire cynique, mais des séquelles d’un diabète et d’un accident vasculaire cérébral[13]. Il a emporté son « secret » avec lui.

Références modifier

  1. Aurore du 6 mai, « Recherche fondamental »
    Figaro du 6 mai, « La machine de M. Priore ouvre, peut-être une voie nouvelle »
    Sud-Ouest du 6 mai, « Des crédits seront débloqués pour test la machine de M. Priore »
    Monde du 7 mai, « Des organismes officiels de recherche pour financer des études avec la machine de M. Priore »
    Monde du 9 mai, « Trypanosomes et ondes de hautes fréquences »
    Le Meilleur du 8 mai, « L'énorme scandale de la machine à guérir le cancer »
    France-Soir du 7 mai, « Des experts vont tester la machine essayée sur des souris cancéreuses »
    Paris-Jour du 7 mai, « La science s'intéresse au canon ant-cancer »
    Sud-Ouest du 9 mai, « La mystérieuse machine de Priore »
    La Montagne du 14 mai, « La machine Priore : un roman assassin »
    New-Scientist du 20 mai, « An a priori case for investigation »
    La Recherche de juillet, « L'étrange affaire Priore »
  2. L'Express du 17 mai, « L'étrange machine de M. Priore »
  3. D.G.R.S.T., « Contrat avec la S.E.R.A.P. »
  4. La Recherch juin 1972, « Variations sur le sonnet d'Arvers »
    La Charente-Libre du 18 août, « Cancer:Le troisième machine du bordelais Priore »
    Sud-Ouest du 18 août 1972, « À Bordeaux constitution d'une société pour la fabrication de la machine de Priore »
    La Nouvelle-République d 19 août 1972, « Le rayonnement d'Antoine Priore (lutte contre le cancer) »
    Le Meilleur du 26 août 1972, « Le triomphe du petit chercheur de Bordeaux »
    La Médecine Practicienne d'octobre 1971, « Quelques réfexions sur l'affaire Priore »
    La Médecine Practicienne de 1972, « Remède miracle ou supercherie ? »
  5. A-J. Berteaud et A-M. Bottreau, « Réalisation d'un appareil Priore simplifié (I) »
    A-J. Berteaud et A-M. Bottreau, « Réalisation d'un appareil Priore simplifié (II) »
  6. D.G.R.S.T., « Contrat avec la S.E.R.A.P. »
  7. S.E.R.A.P., « Développement industriel prévisionnel de l'invention A. Priore »
    S.E.R.A.P., « Unité relais de la société SERAP »
  8. H. Curien, « Lettre adressée à G. Chavanes le 21 novembre 1975 »
  9. Le Figaro du 27 février 1999, « Réflexion sur les vérités établies »
  10. Pr. Lemaire, « Lettre adressée au Pr. Dubourg »
  11. Sud-Ouest du 27 janvier 1980, « Santé: La découverte maudite de Bordeaux »
    Sud-Ouest du 25 mai 1980, « Affaire Priore : Le point... »
  12. G. Potier de Courcy, « Lettre adressée à R. Pautrizel le 2 mai 1983 »
  13. J-M. Orgogozo, « Bilan médical du 21 octobre 1981 »

L’après-Priore modifier

La mort d’Antoine Priore provoqua un grand malaise parmi les divers protagonistes priorephiles. Ils avaient la certitude qu’une découverte de la première importance avait été faite, et que personne n’était capable ni de construire un appareil Priore, ni de faire fonctionner les deux appareils existants.

Une première réaction, viscérale et émotive, fut la création, en mai 1983, de l’association « Comité National de soutien pour la découverte d’Antoine Priore » par Daniel Mourgues, l’abbé Jacques Ducrot, Michel Chauvin, le Dr Henri Dagréou, le Dr Philippe Monnier et d’autres personnalités de la ville de Gujan-Mestras (Gironde).

Cette association a joué le rôle d’aiguillon auprès des pouvoirs publics et des responsables scientifiques. Elle a organisé des réunions d’information, une pétition nationale (avec 140 000  signatures !) adressée au Président de la république, donné des informations sur l’effet Priore à chaque député et sénateur, distribué périodiquement des plaquettes d’information, etc.

Malheureusement, les membres du comité n’avaient pas accès à l’ensemble du dossier. Les propos exprimés ont été parfois exagérés avec des erreurs historiques se sont glissées dans certains de leurs tracts. Cependant ils ont agi selon leur conscience et avec leur cœur en utilisant les moyens à leur disposition. L’action détaillée du Comité de Soutien est décrite dans la Note Le Comité de soutien de Gujan-Mestras.

En mars 1984, deux livres sur l'affaire Priore furent publiés :

  • Le Cas Priore : Prix Nobel ou Imposture par Jean-Pierre Bader, éditions J.C. Lattès
  • Dossier Priore : Une Nouvelle Affaire Pasteur par Jean-Michel Graille, Denoël.

Jean-Pierre Bader, professeur de médecine, directeur de l'I.N.S.E.R.M., conseiller scientifique auprès de Pierre Aigrain et de Simone Veil, avait la possibilité d'avoir en mains tous les éléments du dossier. Il aurait donc pu exprimer une opinion (favorable ou défavorable) sur les travaux réalisés avec les appareils d'Antoine Priore. Malheureusement, le Pr Bader élude beaucoup de détails, seuls les 111 premières pages sur les 223 que compte le livre concernent directement le « cas Priore ». L'auteur, comme il le dit lui-même à la page 100, reste dans l'ambiguïté. Cependant, il est très probable que Bader pensait que l'effet Priore était bien réel : il était assez catégorique, pour la promotion de son livre, dans ses entretiens avec des journalistes de la radio, de la télévision[1] ou de la presse écrite[2]. Ce genre de comportement de wait and see, où « au nom de l'objectivité scientifique » on reste dans l'ambiguïté, n'est pas rare parmi les « décideurs ».

Jean-Michel Graille, journaliste réputé à Sud-Ouest, a enquêté pendant plusieurs années sur l'affaire Priore et a rassemblé une documentation très volumineuse. Dans son livre il n'hésite pas à exposer des faits historiques et à exprimer ses opinions, en les justifiant par référence aux documents archivés. N'ayant pas de formation scientifique, son livre présente quelques faiblesses sur des questions techniques, mais Jean-Michel Graille a agi en honnête homme. Il était scandalisé par l'attitude du monde scientifique face à un découvreur qui n'étant pas du sérail, et ce d'autant plus que des vies humaines sont étaient concernées.

Du côté de Leroy-Somer, le président de son directoire, Géorges Chavanes, dans diverses déclarations, indique que sa société, et en particulier Paul Ribeau, est en mesure de redémarrer l’appareil Priore si on lui accorde des crédits... Selon son interlocuteur, la somme nécessaire évoquée par G. Chavanes était de 20 MF[3], ou 7 MF[4], ou 9 MF ! Ce dernier montant apparaît dans une demande de subvention[5] auprès de Laurent Fabius, ministre de la recherche, datée du 6 septembre 1983. Le ministre émet un refus le 9 janvier 1984[6] en évoquant la recommandation du rapport de MM. Bernard et Latarjet.

En juin 1984 le Pr Bader intervient[7] auprès du ministre, qui promet une aide de 2,5 MF sous certaines conditions, mais Fabius fait volte-face[8] et refuse de subventionner Leroy-Somer.

L’équipe de Leroy-Somer ne parviendra jamais à trouver les fonds nécessaires pour remettre le P5 en état de marche mais elle gardera jalousement la mainmise sur les appareils qui se trouvent à Floirac en entretenant le mythe de son savoir-faire pour la construction et le fonctionnement des appareils d’Antoine Priore.

Les rapports entre Antoine Priore et la société Leroy-Somer sont analysés dans la Note Leroy-Somer où nous concluons qu’Antoine Priore n’a jamais mis Paul Ribeau dans la confidence.

Du côté des universitaires, le Pr Pautrizel a essayé, avec l’aide du Pr Adolphe Pacault (Faculté des sciences de Bordeaux), de constituer une équipe, mais le Pr Pacault a rapidement renoncé.

Finalement en 1984, sous l’impulsion[9] du conseil régional d’Aquitaine (Philippe Madrelle, Alain Rousset, Gilles Savary), une équipe universitaire s’est constituée sous l’égide du Pr Jacques Joussot-Dubien, à l’époque directeur de l’E.N.S.C.B. (École Nationale Supérieure de Chimie de Bordeaux). Cette équipe était formée de: André-Marie Bottreau (physicien), Jacques-Marie Moreau (physicien), Alfred Caristan (chimiste), Bernard Veyret (chimiste), le Pr Pautrizel (biologiste), Pierrette Chateaureynaud (biologiste). Elle s’est donné comme but l’étude « scientifique » de l’appareil Priore. Après quelques années de travail sans obtenir de résultats ce groupe abandonne le projet. Voir le Note : Le laboratoire P.I.O.M..

Références modifier

Conclusion modifier

Tout port à croire qu'Antoine Priore voulait à tout prix garder à son profit le privilège d'une découverte et d'une thérapeutique contre le cancer : d'abord, pour la gloire qui rejaillirait sur lui, ensuite pour le bénéfice financier éventuel qu'il en tirerait.

On ne peut lui dénier de grandes qualités : une intuition certaine, des compétences techniques et un esprit d’invention hors normes, un acharnement à atteindre son but et, sur le tard, un réel désintéressement.

Mais ces qualités avaient de fâcheuses contreparties : il était mégalomaniaque, irritable, obstiné et cachottier.

Il n'aurait jamais dû se retrancher derrière une espèce de « secret d’usine » qui le rendit suspect à tous les administrateurs de la science. Quand on est l'auteur d'une découverte, on ne peut la taire pendant des années.

Antoine Priore a voulu aller trop vite et il voyait trop grand, en particulier pour tout ce qui concerne les applications à l'homme.

Il s'obstinait à vouloir appliquer immédiatement son appareillage aux tumeurs humaines.

Il aurait dû par contre refaire le montage qui avait donné les premiers résultats et laisser d’autres que lui le manipuler.

Les expériences faites par le Pr Pautrizel prouvent qu’Antoine Priore n’était pas un charlatan. Il n’en est pas moins vrai qu’à maintes reprises le comportement de ce dernier pouvait prêter à confusion, ce qui l’a énormément desservi.

À la décharge d’Antoine Priore, il faut dire qu'il était entouré par trois sortes de personnes :

  • celles qui essayaient de le piller,
  • celles qui le vilipendaient
  • celles qui le mettaient sur un piédestal.

Il n’est pas étonnant que son psychisme en ait été affecté. Antoine Priore fut la première victime de « l’affaire Priore ».

Finalement, des décennies ont été perdues, alors qu'elles auraient peut-être apporté un nouveau procédé de lutte contre certaines maladies graves par une stimulation des défenses immunologiques.

Que reste-t-il de la découverte ?

  • Un appareil a été mis au point par Antoine Priore, peu importe comment.
Il émet des rayonnements qui ont la propriété de stimuler les défenses immunitaires de l'organisme.
  • Ces propriétés ont été mises en évidence au cours de nombreuses séries d'expériences menées sur des animaux.
  • Ces expériences étaient reproductibles.
  • L'appareil a été répliqué au moins cinq fois par Antoine Priore.

Nous avons là, toutes les étapes de la preuve scientifique d'un effet biologique spectaculaire, sauf pour une (absolument capitale) : l'appareil n'a pas été reproduit par un tiers.