« La politique monétaire/La courbe de Phillips » : différence entre les versions

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: <math> \pi = \pi_0 - a \cdot (Y - \overline{Y})</math>, avec <math>Y - \overline{Y}</math> est l'écart de production.
 
AÀ tout cela, on peut aussi ajouter l'influence d'un éventuel choc d'offre, qui induit une inflation <math>S</math>.
 
: <math> \pi = \pi_0 - a \cdot (Y - \overline{Y}) + S</math>
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[[File:NAIRU.svg|vignette|Courbe de Phillips avec taux de chômage naturel.]]
 
La courbe de Phillips précédente indique qu'il existe un arbitrage entre chômage et inflation, que les gouvernements et banques centrales pourraient utiliser pour influencer l'économie. Mais une telle possibilité ne colle pas avec ce que l'on a vu dans les chapitres précédents, à savoir que l'économie finit fatalement par se stabiliser au PIB potentiel. Si la courbe de Phillips est vraie, rien ne peut empêcher la banque centrale de maintenir en permanence le PIB au-delà du PIB potentiel avec une politique monétaire adéquate, ou de stabiliser définitivement le taux de chômage en-dessous du taux de chômage naturel, chose incompatible avec les données empiriques. Cet argument a poussé divers auteurs monétaristes, comme Friedman (1968) et E. Phelps (1967), à théoriser l'absence d'un arbitrage inflation-chômage à long-terme. La seule conclusion possible est que l'arbitrage entre inflation et chômage est une relation de court-terme, qui disparaît avec le temps. AÀ long-terme, la courbe d'offre de l'économie doit être verticale, l'offre ne dépendant plus des prix.
 
Pour cela, on doit postuler que diverses forces de rappel poussent le PIB à se stabiliser à son taux potentiel, au point d'annuler l'effet de la courbe de Phillips. La force de rappel qui ramène l'économie au PIB potentiel n'est autre que les '''anticipations d'inflation''' de la part des agents économiques. En effet, les anticipations d'inflation influencent l'inflation réelle : les anticipations sont performatives. Et il y a plusieurs raisons à cela, la première étant que les agents vont tenter de se prémunir contre l'inflation qu'ils anticipent.
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: <math>\pi_t - \pi_{t-1} = a (Y_t - \overline{Y})</math>
 
Le terme de gauche n'est autre que la hausse de l'inflation sur la période étudiée. L'équation nous dit donc ce qui peut faire varier l'inflation de sa valeur passée, ce qui fait que cette version de la courbe de Phillips est appelée la '''courbe de Phillips accélérationniste'''. Elle nous dit que tout écart de production entraineentraîne un changement d'inflation. Par contre, un écart de production nul stabilise l'inflation à sa valeur actuelle. Cela a une conséquence assez importante : on ne peut pas effectuer de réduction de l'inflation sans faire passer le PIB en-dessous de sa valeur naturelle. Dit autrement, on ne peut pas faire baisser l'inflation sans passer par une période temporaire où le chômage est supérieur au chômage naturel.
 
Cette version de la courbe de Phillips permet à la politique monétaire d'avoir un effet réel sur le PIB, ce qui lui permet de le faire monter au-dessus de sa valeur potentielle, quitte à générer de l'inflation. Mais cela ne dure qu'un temps, avant que les anticipations fassent revenir le PIB à la normale. Imaginons que la banque centrale baisse ses taux, afin de réduire le PIB, quitte à générer de l'inflation. La baisse des taux réels par la banque centrale va naturellement stimuler la production et augmenter le PIB. Sur le court-terme, les anticipations d'inflation sont rigides, ce qui fait qu'elles restent assez faibles. L'inflation non-anticipée augmente, mais l'inflation anticipée reste relativement stable. Au total, la courbe de Phillips ne se déplace pas suite à l'action de la banque centrale. Mais avec le temps, les anticipations d'inflation vont augmenter progressivement, les agents anticipant l'inflation de plus en plus finement, faisant remonter l'inflation assez vite. Cela va toucher la courbe de Phillips, qui va se déplacer et devenir de plus en plus pentue. Au final, le déplacement de la courbe de Phillips va totalement annihiler l'action de la banque centrale. La courbe de Phillips va devenir verticale : le PIB potentiel sera atteint, et la banque centrale aura juste réussit à créer de l'inflation. Pour résumer, la politique monétaire a donc des effets sur les variables réelles (salaires réels, PIB, taux réels), mais seulement à court-terme, lors de la transition vers l'équilibre macroéconomique. On voit donc que la politique de ciblage de l'inflation, utilisée par les banques centrales, permet automatiquement d'amener l'économie au PIB potentiel.
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: <math>\overline{\epsilon} = a \overline{(Y - \overline{Y})} = 0</math>
 
En clair, l'économie peut dévier de son état d'équilibre, mais seulement si les agents font des erreurs de prédiction. Ces erreurs étant supposées non-systématiques (leur moyenne dans le temps est nulle), l'économie oscille aléatoirement autour de son état d'équilibre. Si les agents peuvent se tromper sur le court-terme, leurs anticipations donnent des résultats "parfaits" sur le long-terme vu que les erreurs se moyennent. Cela implique une inefficacité totale de la banque centrale à garder un PIB sous le PIB potentiel. Elle aura beau créer autant de monnaie qu'elle veut, les agents anticiperont de l'inflation et réagiront en conséquence. Ce qui va totalement annihiler l'effet de la politique monétaire sur le PIB, ne laissant que son effet sur l'inflation. L'efficacité de la politique monétaire sur le PIB n'apparaitn’apparaît que si la politique menée n'a pas été anticipée, ou alors pas totalement. Ce résultat est appelé la '''proposition d'inefficacité de la politique monétaire''' (''Monetary Policy Ineffectiveness Proposition'').
 
Outre ce résultat, cette version de la Courbe de Phillips possède quelques défauts. Le premier est qu'elle donne aussi quelques résultats contra-factuels assez importants. Le plus connu est celui identifié par Ball, dans son article de 1994. Il montra qu'avec cette courbe de Phillips, toute désinflation soutenue permet d'augmenter la production au-delà de sa valeur potentielle. Ce résultat est assez contre-intuitif, mais il se comprend assez facilement. Pour cela, il faut que la banque centrale décide de changer ses règles de politique monétaire et souhaite passer à une politique plus stricte. Cependant, elle doit prévenir à l'avance du changement, avant que celui-ci ait lieu. Dans ce cas, le résultat est une baisse de l'inflation suivie par une hausse de la production. Le résultat provient de la logique suivante : les entreprises s'attendent à une réduction de la masse monétaire dans le futur et vont adapter leurs prix en conséquence. Si les prix sont rigides, ils ne le sont pas totalement et une petite baisse des prix s'enclenche suite à l'annonce de la banque centrale, avant même que la politique stricte soit en place. Les consommateurs voyant la baisse des prix, ils en profitent pour augmenter leur consommation, ce qui stimule la production et le PIB. Le fait est que toute politique de désinflation continue pourrait alors maintenir le PIB au-delà de sa valeur potentielle de manière permanente. Chose qui ne respecte pas la fameuse critique de Mc Callum : il n'existe pas de politique monétaire permettant de maintenir le PIB au-delà de sa valeur potentielle.
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L'équation précédente nous dit que si un pays étranger augmente ses taux d'intérêt, alors notre pays voit son inflation augmenter (en raison des variations de taux de change associées). Et inversement : une baisse des taux étrangers entraîne naturellement une relance domestique de l'inflation. Un résultat intéressant surgit quand on pousse le résultat plus loin, en prenant en compte la réaction de la banque centrale domestique. Si des banques centrales étrangères baissent leurs taux, l'inflation nationale va baisser et la banque centrale domestique doit assouplir la politique monétaire pour relancer l'inflation nationale. Toutes les banques centrales, nationale et étrangères, baissent leurs taux de concert, l'une en réaction aux autres. Et inversement en cas de hausse des taux : la hausse des taux étrangers stimule l'inflation nationale, ce qui force la banque centrale nationale à monter ses taux. Les politiques monétaires nationales et étrangères sont donc corrélées et tendent à réagir dans le même sens. Évidemment, cette corrélation n'est pas parfaite, vu que les pays ont des systèmes fiscaux différents, des inflations différentes, etc.
 
Un résultat similaire est que les difficultés d'un pays tendent à se propager aux pays étrangers. Imaginons qu'un pays subisse une crise et que son inflation diminue fortement. La banque centrale étrangère va devoir baisser ses taux pour relancer son économie et son inflation. AAu vu de l'équation précédente, l'inflation domestique va aussi chuter : la crise de demande s'est propagée dans notre pays, alors qu'elle provenait de l'étranger. En clair, la corrélation des politiques monétaires n'est qu'un revers de la médaille. L'autre revers est la corrélation des économies, au niveau de l'inflation. Si un pays entre en crise, dans le sens où son économie ralentit (chômage qui augmente et inflation en baisse), alors sa crise se propage aux pays étrangers.
 
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