« Mémoire/Le modèle modal d'Atkinson et Shiffrin » : différence entre les versions

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Correction des noms des chercheurs mal orthographiés (Atkinson, Shiffrin et Peterson)
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Bien que connu depuis Ebbinghaus, l'explication des effets de récence et de primauté est longtemps resté un mystère. Murdock, dans son étude de 1962, a suggéré une hypothèse intéressante : l'existence d'une '''mémoire à court terme''' de capacité limitée, qui ne dure que quelques secondes. Cette mémoire à court-terme serait à opposer à la mémoire plus durable, celle du langage commun, appelée '''mémoire à long-terme'''. Les derniers éléments rappelés seraient accessibles depuis la mémoire à court terme, tandis que les autres doivent être repêchés depuis la mémoire à plus long terme. L'effet de récence donne une indication sur la taille de la mémoire à court-terme. L'effet de récence étant de 7 items, on en déduit facilement que la taille de la mémoire à court-terme serait de cet ordre : 7 items, plus ou moins deux. Cette interprétation est aujourd'hui nuancée, pour des raisons que nous aborderons plus tard.
 
Reste que l'existence d'une telle mémoire restait à confirmer. Ce fut fait par l'étude de Glanzer et Cunitz, datée de 1966. Dans cette expérience, deux groupes de sujets devaient apprendre une liste de mots. Cependant, le premier groupe était testé dans une tâche de rappel immédiat, alors que l'autre était testé via un rappel différé. Plus précisément, le second groupe recevait une tâche entre l'apprentissage de la liste de mots et son rappel. Les sujets devaient compter à l'envers de trois en trois, à voix haute, durant un certain temps. Une telle tache, intercalée entre rappel et apprentissage, porte le nom de '''tâche de Brown-PettersonPeterson'''. Le fait est que l'effet de récence apparaît bien en rappel immédiat, mais disparaît presque totalement en rappel différé avec tâche de Brown-PettersonPeterson. L'interprétation de ce résultat est que la tâche de Brown-PettersonPeterson a vidé la mémoire à court-terme, supprimant ainsi l'origine de l'effet de récence. Ceci dit, la tâche de Brown-PettersonPeterson ne supprime pas totalement l'effet de récence. Il est un effet de récence résiduel, extrêmement faible mais existant. Celui-ci aurait une origine indépendante de l'existence de la mémoire à court-terme, mais celle-ci est encore mal connue.
 
Par la suite, d'autres expériences ont amené à la conceptualisation d'un autre type de mémoire temporaire, encore plus bref que la MCT : la mémoire sensorielle. De cette constatation, le '''modèle modal''' d'AttkinsonAtkinson et SchiffrinShiffrin est apparu. Dans ce modèle, on retrouve aussi bien les mémoires sensorielles, que la mémoire à long terme et la mémoire à court terme. Dans ce modèle, divers processus permettent le maintien et le transfert des items entre mémoires. Ceux-ci regroupent aussi bien l'attention que la répétition mentale, que le rappel et la mémorisation.
 
[[File:Multistore model.png|centre|vignette|upright=2.0|Modèle modal d'Atkinson et SchiffrinShiffrin.]]
 
==Registre sensoriel==
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[[File:Mémoire sensorielles.png|vignette|Mémoires sensorielles]]
 
La mémoire sensorielle a été mise en évidence par diverses expériences, au début du siècle dernier. Dans les grandes lignes, elle peut retenir une quantité d'informations sensorielles impressionnante, mais la durée de rétention est très brève, inférieure à la seconde. Le contenu de cette mémoire n'est pas perçu consciemment. Un certain traitement automatique est effectué sur le contenu de ces mémoires, avant leur transfert en mémoire à court-terme. Ce peut être des processus de détection des contours d'objets pour la mémoire visuelle, des processus de détection de la tonalité ou de l’intensité sonore pour la mémoire auditive, etc. Le transfert en MCT des informations sensorielles se fonde essentiellement sur l'attention, notre capacité à nous concentrer. Celle-ci va faire un tri des items sensoriels pour n'en retirer que les informations essentielles, celle-ci passant en MCT. Le reste n'atteint pas la conscience et est oubliée. Dans la théorie originale d'Atkinson et SchiffrinShiffrin, le registre sensoriel est vu comme un système unitaire, capable de mémoriser aussi bien des informations visuelles qu'auditives. Cependant, de nos jours, les savants pensent que ce registre sensoriel serait subdivisé en registres indépendants, un par modalité. Un registre visuel complémenterait ainsi un registre tactile et un registre auditif. Dans ce qui va suivre, nous allons détailler ces différents registres.
 
===Mémoire iconique===
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===Durée de rétention===
 
Il est évident que le contenu de la MCT semble s'effacer avec le temps. Pour mesurer cette vitesse d'effacement, les chercheurs doivent tenir compte du fait que le cobaye peut répéter mentalement les informations à mémoriser, augmentant la durée de rétention en MCT. Pour supprimer ce biais, ils utilisent une tâche de Brown-PettersonPeterson, dont ils contrôlent la durée. Dans cette situation, plus la durée de la tâche de Brown-Perterson est longue, plus l'empan diminue. Le rappel est d'environ 90 % quand le délai entre les deux est inférieur à 1/2 seconde. il tombe à 50 % après 3 secondes, 40 % après 6 secondes, 20 % après 9 secondes, et il tombe à 10/8 % après. la durée de conservation semble donc proche de la dizaine de secondes, un peu plus ou un peu moins suivant les personnes. L'origine de cet oubli n'est pas encore bien élucidée et deux théories s'affrontent : une qui dit que les informations s'effacent progressivement, et une autre qui dit que les informations interférent entre elles. Nous reviendrons sur ce débat dans le chapitre sur l'oubli en mémoire déclarative.
 
===Capacité===
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La mémoire à court terme ne peut pas retenir un nombre illimité d'informations du fait de sa capacité finie. On peut tenter d'estimer la capacité de la MCT en se basant sur l'effet de récence. Puisque la mémoire à court terme est à l'origine du rappel des derniers éléments, on peut en estimer sa capacité en regardant le nombre d’éléments concernés par l'effet de récence. Celui-ci tombe rapidement au-delà d'un certain seuil : ce seuil est appelé l''''empan mnésique'''. Dans les expériences faites sur des adultes, ce nombre ne dépasse pas 10, et a une moyenne de 7 +/- 2.
 
Pour obtenir une estimation de votre empan mnésique, vous pouvez passer le test suivant, connu sous le nom de '''digit span task'''. Lisez chaque séquence de chiffres comme s'il s'agissait d'un numéro de téléphone, fermez les yeux et essayez de répéter celle-ci. Si vous avez réussi à répéter celle-ci sans faute, passez à la séquence suivante. Arrêtez-vous à la première séquence où vous faites une erreur. La capacité de votre empan mnésique est égal à la longueur de la chainechaîne de chiffrechiffres, moins un item.
 
* 0215 ;
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Cela vient du fait que ces chunks sont des connaissances mémorisées en mémoire à long terme : les regroupements doivent être mémorisés avant d'être utilisables. Les différences de performances entre experts et novices proviennent en partie de la mémorisation d’un grand nombre de regroupements spécifiques à ce domaine : on observe ce phénomène dans des domaines très divers, comme la programmation, la conception de circuits électroniques, les échecs, etc. Comme le dit Mislevy : « […] comparés aux novices, les experts dominent plus de faits et établissent plus d’interconnexions ou de relations entre eux. Ces interconnexions permettent de surmonter les limitations de la mémoire à court terme. Alors que le novice ne peut travailler qu’avec au maximum sept éléments simples, l’expert travaille avec sept constellations incarnant une multitude de relations entre de nombreux éléments ». C'est ainsi : un novice ne dispose pas de motifs ou de catégories familières qu'il peut utiliser pour regrouper de grandes quantités d'informations, et doit se débrouiller avec des informations élémentaires qu'il doit traiter individuellement.
 
Ce phénomène de regroupement a souvent lieu directement lors de la perception : plusieurs stimuli simples sont regroupés en un seul stimulus complexe. Ces regroupements perceptifs sont aussi appelés des chunks. On peut par exemple citer l'exemple des joueurs d'échec auxquels on demande de mémoriser une configuration de jeu : les novices doivent mémoriser des pièces indépendantes, tandis que les experts les regroupent en blocs de 3 à 5 pièces. Mieux : ces regroupements permettent de catégoriser des ensembles de pièces suivant leur sens stratégique, chaque regroupement étant associé au meilleur coup à jouer associée à cette configuration. Ce phénomène de regroupement est aussi utile en géométrie (Koedinger et Anderson, 1990) : les élèves qui ont de bonnes performances en géométrie ont acquis des regroupement visuels qui leur permettent de reconnaître des figures géométriques particulières (triangles, carrés, angles alternes-internes, etc), et d’accéder aux informations associées à ces figures. Ainsi, la capacité à résoudre certains exercices de géométrie dépend en partie de cette capacité à reconnaitrereconnaître des figures, comme des angles alternes-internes, des figures géométriques, et ainsi de suite.
 
Mais certains regroupements sont des regroupements non pas perceptifs, mais conceptuels. Ces concepts relationnels, formés par interconnexion de concepts plus élémentaires, sont appelés des schémas. Ces schémas, de par leur caractère conceptuel, vont mémoriser des informations abstraites, commune à une classe d'objets ou de situations. Il s'agit là d'un point commun avec les catégories, à savoir la mémorisation des informations communes à une classe d'instances. Cependant, ces schémas sont plus flexibles, dans le sens où ceux-ci ne stockent pas que les points communs, les constantes, mais peuvent aussi mémoriser à la volée des informations variables. On peut se représenter ces schémas par des ensembles de cases, chaque case représentant un élément de l'objet ou du système. Certaines cases ont un contenu constant et invariable, alors que les autres stockent des détails qui peuvent varier suivant la situation.
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==La mémoire à long-terme==
 
La '''mémoire à long-terme''', abréviée MLT, est la mémoire au sens commun, celle qui nous permet de mémoriser des faits, connaissances et souvenirs. Celle-ci est sous-spécifiée dans la théorie d'Atkinson et SchiffrinShiffrin, si ce n'est qu'il s'agit d'une mémoire de longue durée, dont la capacité est très importante. Il faut dire que la théorie s'intéresse seulement au transfert des informations de la MCT vers la MLT, à savoir la mémorisation, aussi appelée '''encodage'''. L'idée est notamment que l'encodage dépend essentiellement du temps que l'item à mémoriser passe dans la MCT. Plus ce temps est long, plus l'encodage a de chances d'avoir lieu. La répétition mentale, en permettant de rafraichir les items en MCT, favoriserait l'encodage. Pour résumer, l'utilisation de la mémoire déclarative se fonde sur trois capacités :
 
* premièrement, le matériel à apprendre est encodé : il est traduit en une trace mnésique stockée dans le cerveau ;
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===Le processus d'encodage===
 
Le modèle modal d'Atkinson et SchiffrinShiffrin est fondé sur diverses hypothèses concernant l'encodage des informations, leur passage de la MCT à la MLT. Ce modèle ne postule qu'un seul mécanisme de mémorisation : la répétition. Plus précisémmentprécisément, le modèle suppose que la qualité de l'encodage dépend uniquement du temps passé par l'item en MCT. La répétition mentale, en augmentant le temps passé en MCT par l'item, favorise donc l'encodage. Mais les expériences faites sur le sujet ont montrées que la répétition avait non seulement un effet relativement faible, mais aussi que d'autres mécanismes favorisent un encodage de qualité. Dans les grandes lignes, donner du sens aux items, les relier à des connaissances antérieures, ou organiser/classer les items favorise leur encodage. Chose que le modèle modal ne peut pas permettre de rendre compte.
 
===Unité de la mémoire à court-terme===