Recherches sur les naissances « physiologique » et « naturelle »/Questions diverses

Voici une liste de questions qui sont en jachère (fleurie). Je rêve d'une cohorte de sage-femmes s'emparant de chacune d'elles.

Y a-t-il un intérêt à accoucher dans l’eau ?

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Dans une étude randomisée et contrôlée, Auweiler & Eldering (de l'hôpital de Bensberg, Allemagne) comparent 250 femmes ayant accouché dans l'eau avec un groupe contrôle de 250 femmes. Tous les accouchements étaient eutociques dans chaque groupe. Les résultats ont montré une diminution significative du recours aux analgésiques dans le groupe eau. Iels n'ont pas noté de différence sur le temps de travail. L'étude sur les épisiotomies et déchirures de la région périnéale a montré moins de lésions périnéales dans le groupe utilisant le bain. Les autres critères étudiés n'ont pas montré de différence significative. Dans la population des accouchements dans l'eau il n' y a pas eu de complication maternelle ou fœtale. Les auteurices concluent que l'accouchement dans l'eau n'augmente pas les risques pour la mère et l'enfant. Il faudrait faire une revue systématique sur la question.

Y a-t-il vraiment 3 étapes du travail ?

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L'accouchement est considéré comme englobant trois « étapes » du travail (National Institute for Health and Care Excellence, 2014 ; OMS 2018). Ces étapes sont évidemment une construction clinique. Physiologiquement, le travail est un continuum allant de la fin de la grossesse à l'expulsion du placenta et des membranes, comme le disent Howie et Watson (2017)[1]).

Dans les quelques récits d'accouchement physiologique, les « descriptions mécaniques » des changements apportés au corps d'une femme étaient également absentes des descriptions de l'expérience subjective du travail. Dixon & al. (2013)[2] ont reconnu que, bien que les étapes du travail puissent être connues à l'approche de la naissance, elles ont peu de sens pour les femmes pendant le travail et notent que l'accent mis sur la dilatation cervicale et le temps écoulé conduit à sous-évaluer l'intuition et l'expérience des parturientes.

La phase de latence

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Davis & Pascali-Bonaro (2010)[3] écrivent page 58 que le rythme de dilatation n’est pas un indicateur de bien-être fetal ni maternel (le rythme cardiaque fetal et la surveillances des fonctions vitales de la mère, oui). La phase latente, appelée aussi pré-travail, est généralement définie comme commençant au moment où la femme perçoit des contractions utérines régulières[4]. Il ne s’agit pas de les confondre avec les contractions de Braxton Hicks (décrites par John Braxton Hicks, 1872, qui sont des contractions qui peuvent commencer vers 26 semaines de gestation et sont parfois appelées faux travail, lesquelles sont peu fréquentes, irrégulières et n'impliquent que de légères crampes. Selon les classification, on inclut ou non la phase de latence dans le travail ou non.

Par définition, la fin de la phase latente est définie par la mesure de l’effacement cervical, ou de la dilatation cervicale (l’un étant l’inverse de l’autre ? J'ai le sentiment que oui, mais...).

L’effacement s’exprime en pourcentage de 0 à 100 % (où le col est très fin). Généralement le mucus qui bouchait l’entrée est tombé (ce qu’en anglais on appelle de manière charmante le bloody show). La dilatation, elle, se mesure en centimètres, allant de 0 à 10 cm. Il me semble qu’on a abandonné l’effacement au profit de la dilatation, plus facile à mesurer, plus précise et souffrant de moins de variabilité inter-examinateurs.

Depuis le travail du Dr. Edward Bishop en 1964, on utilise le score de Bishop, qui va de 0 à 13. Un score inférieur à 3 est un pronostic très défavorable, supérieur à 9 très favorable et indiquant une forte probabilité d’induction réussie. Les paramètres sont :

  • dilatation cervicale en centimètres.
  • Consistance cervicale (une femme primipare a généralement un col plus dur et résistant à l’étirement).
  • Position cervicale (tendance à devenir plus antérieure, plus près de l'ouverture du vagin, à mesure que le travail se rapproche).
  • Station fœtale, la position de la tête fœtale par rapport à la distance des épines ischiatiques prises comme référence.

Un point est ajouté au score total pour :

  • Existence de pré-éclampsie
  • Chaque livraison précédente

Un point est soustrait du score total pour :

  • Grossesse post-date / post-terme
  • Nulliparité (aucun accouchement vaginal antérieur)
  • RPROM ; rupture prématurée (pré-travail) des membranes

Il ne semble pas la durée de cette phase soit un détail. Selon les normes très fortes de Friedman & Kroll (1967)[5] sur le management du travail, la vitesse de dilatation la plus lente est admise à 1cm par heure chez la primipare et 1,5cm par heure chez la multipare. Ces normes ont été critiquées par Peisner & al. en 1986[6], et par Neal & al.[7] qui définissent la vitesse minimale de dilatation comme se rapprochant de 0,5 cm / heure à faible risque. Les études de Zhang & al.[8] ont décrit le fait que dans la majorité des cas, la phase d’accélération commencerait à 6 cm et l’évolution de la dilatation entre 4-6 cm serait beaucoup plus lente que précédemment décrit. Des publications de l’étude de Rouse & al.[9] et celle du consensus du Collège américain des gynécologues obstétriciens (ACOG) et de la Société de médecine materno-fœtale (SMFM)[10] ont réaffirmé le fait que la phase active ne commenceraient que très rarement avant 6 cm et ont suggéré que l’arrêt de la dilatation (considérée donc comme devant être stimulée) ne devrait jamais être diagnostiqué avant 6 cm de dilatation. Avec les anciennes normes, de nombreuses dystocies seraient diagnostiquées à tort alors qu’il s’agirait de la phase de latence. Il semble donc que les normes de Friedman et Kroll ont contribué probablement à un surdiagnostic de dystocie et, par la suite, à un interventionnisme majeur.

Il semble que le respect de la phase de latence inscrit le travail dans un respect de la physiologie qui semble tendre à réduire globalement les interventions en élargissant les normes cinétiques du travail, et en questionnant le mode d’évaluation et la possible faiblesse des capacités diagnostiques des soignant·es. Ce sont des points qui sont abordés dans :

  • Cohen WR, Friedman EA. Perils of the new labor management guidelines (2015)[11] et
  • Ferrazzi E, Paganelli A. Perils of the new labor management guidelines: Should we stop asking "when" to act on delayed progression and start asking "why" the cervical dilatation is slower than the expected labor curve? (2016)[12].

mais je ne les ai pas lu profondément.

Qu’est-ce qui déclenche la phase active ?

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Je reprends ici à mon compte les travaux d’endocrinologie d’Azure D. Grant et Elise N. Erickson dans Birth, love, and fear: Physiological networks from pregnancy to parenthood[13] :

« La progestérone inhibe la capacité de l'utérus à se contracter efficacement et aide à maintenir la structure rigide du collagène du col de l'utérus. Cette inhibition du travail persiste en moyenne 268 jours dans les gestations saines (ovulation estimée à la naissance). Le corps passe du maintien de la grossesse à l'accouchement actif via les phases de parturition (…) L'inhibition doit être supprimée ou contrecarrée pour déclencher le processus de travail et d'accouchement. Les événements caractérisés par la « phase d'activation » du travail se produisent probablement avant que les véritables symptômes du travail ne soient détectés par la mère. Contrairement aux autres mammifères, la progestérone humaine ne tombe pas en quantités absolues[14]. Au lieu de cela, les effets de la progestérone sont contrecarrés par les augmentations mesurables de l'œstriol (également fabriqué par le placenta). La production d'œstriol est directement influencée par la maturation fœtale de l'axe hypothalamo-hypophyso-surrénalien (HPA) car le placenta nécessite un précurseur (sulfate de déhydroépiandrostérone ; DHEA-S) de la glande surrénale/du foie fœtal en cours de maturation comme substrat.

De concert avec l'augmentation de l'oestriol et le retrait fonctionnel de la progestérone, le placenta, le système HPA maternel et les systèmes fœtaux (encore une fois entraînés par la maturation des surrénales et du SNC) entraînent tous une augmentation de la production de CRH (corticotrophin releasing hormone, appelée auparavant corticotropin-releasing factor). [Pour info : la CRH est le régulateur central de l'axe hypothalamo-hypophyso-surrénalien, qui est le principal organisateur de la réponse de l'organisme au stress[15]]

Ce système prédictif de la production de glucocorticoïdes maternel et fœtal à l'augmentation de la CRH placentaire est associé à la maturation pulmonaire fœtale et à la régulation à la hausse de la synthèse des prostaglandines (qui augmente la température corporelle) et des récepteurs importants pour la réceptivité utérine (récepteurs de l'ocytocine, jonctions lacunaires) au moment du travail. Ainsi, l'activation des processus de travail, lorsqu'elle se produit au cours d'une grossesse saine, a tendance à se produire lorsque le fœtus a atteint un niveau de maturation compatible avec la viabilité extra-utérine, à la fois neurologiquement et pour la transition respiratoire (les glucocorticoïdes augmentent la production de tensioactif, qui permet la dilatation alvéolaire et les échanges gazeux).

Les pouvoirs de l'état psychologique de la mère sur la progression du travail ne sont pas bien compris. Le rôle des expériences subjectives de stress sur le début du travail a fait l'objet de recherches, les chercheurs notant qu'une production plus élevée de CRH, soit par le placenta, soit par la mère, contribue à des durées de gestation plus courtes ou à une naissance prématurée ».

J'ai eu quelques contacts avec Madame Grant, qui se malheureusement arrêtés net, sans que je n'obtienne les réponses à mes questions.

mais elle m'avait recommandé le travail suivant : Psychoneuroimmunology in pregnancy: immune pathways linking stress with maternal health, adverse birth outcomes, and fetal development (2012)[16].

Je livre ici ce que je l'ai lu dans ce livresur lesquels j'ai déjà émis de fortes réserves : dans Davis & Pascali-Bonaro (2010)[3] p. 67, on y lit que le déclenchement se fait par OT, mais aussi par le Cytotec (misoprostol), alors que le déclenchement n’est pas l'indication initiale du Cytotec (qui était semble-t-il un traitement de l’ulcère à l’estomac). D'ailleurs son fabricant, la firme Serle, n’approuve pas son usage dans ce but, car le Cytotec peut faire passer du liquide amniotique dans la circulation maternelle, menant à de possibles embolies amniotiques.

Dans divers livres plus ou moins mystiques, on glâne des techniques de déclenchement qui vont des huiles de ricin et d'onagre à l'herboristerie, en passant par l'acupuncture et.. la stimulation des mamelons. Idem pour l'activité sexuelle, avec l'argument que le liquide séminal contient des prostaglandines qui ramollissent le col. Mais les données dsiponibles sont rares et limitées, et rendent l'efficacité de cette méthode incertaine[17].

Ce sont autant de sujets à creuser.

Notes éparses et non organisées sur le stress

Je crois que je prends l'essentiel de ce qui suit dans "Psychoneuroimmunology in pregnancy: immune pathways linking stress with maternal health, adverse birth outcomes, and fetal development" (2013)[18].

« Le système immunitaire change considérablement pour soutenir une grossesse saine, avec une atténuation des réponses inflammatoires et une altération de l'immunité à médiation cellulaire. Cette adaptation est postulée être utile dans la protection du fœtus du rejet par le système immunitaire maternel. Ainsi, la dérégulation immunitaire induite par le stress pendant la grossesse a des implications uniques pour la santé maternelle et fœtale, en particulier la naissance prématurée. Cependant, des recherches très limitées ont examiné les relations stress-immunité pendant la grossesse. (…) Malgré une littérature abondante établissant un lien entre le stress psychologique et les issues défavorables de la grossesse, peu d'études ont examiné les mécanismes biologiques potentiels expliquant ces associations et les études disponibles se sont concentrées presque exclusivement sur les médiateurs neuroendocriniens potentiels »[19]. Conformément à l'argument selon lequel l'inflammation est incompatible avec une grossesse saine, les élévations des cytokines pro-inflammatoires dans le sérum maternel et le liquide amniotique, y compris l'IL-6, l'IL-8 et le TNF-α, résultant d'une infection ainsi que de cas idiopathiques, sont causalement impliquées dans le risque d'accouchement prématuré[20]. Les cytokines pro-inflammatoires peuvent favoriser le travail prématuré en déclenchant des contractions prématurées, en favorisant la maturation cervicale et en provoquant la rupture des membranes[21]. »

L'inflammation peut également contribuer à l'accouchement prématuré médicalement indiqué en favorisant les troubles hypertensifs de la grossesse. L'hypertension gestationnelle et la prééclampsie sont caractérisées par des niveaux élevés de marqueurs inflammatoires circulants, dont l'IL-6 et le TNF-α[22]. À l'appui d'un rôle causal de l'inflammation dans le développement des troubles hypertensifs de la grossesse, de nombreuses caractéristiques de la prééclampsie, y compris une altération du métabolisme lipidique et un dysfonctionnement endothélial, peuvent être induites par des cytokines pro-inflammatoires (Page, 2002) et la gravité clinique de la prééclampsie a été associée à la degré de dérégulation observé dans la fonction des cytokines[23].

Compte tenu des implications uniques de la dérégulation immunitaire pendant la grossesse, le manque de données concernant les effets du stress sur les processus inflammatoires chez les femmes enceintes est notable. En raison de changements substantiels dans la fonction immunitaire et neuroendocrinienne pendant la grossesse, les effets du stress sur ces paramètres peuvent différer pendant la grossesse par rapport à la non-grossesse. La traduction des modèles PNI à la grossesse est nécessaire pour élucider les effets du stress sur les résultats inflammatoires pendant la grossesse, y compris, mais sans s'y limiter : 1) l'adaptation basale des marqueurs inflammatoires sériques à mesure que la grossesse progresse, 2) les réponses inflammatoires aux défis biologiques et 3) les réponses inflammatoires aux facteurs de stress psychosociaux.

Wetzka B. & al. (2003)[24] suggèrent un rôle paracrine important de l'hormone de libération de la corticotropine placentaire (CRH) dans le contrôle de la parturition humaine (avec effets sur les macrophages et les cellules endothéliales).

Il a également été noté que le stress aigu peut initier une gestation plus courte (travail prématuré) et que les personnes vivant dans des conditions de stress chroniques (physiques et/ou psychologiques) tendent vers une gestation plus précoce. Le cas d'individus noirs ou afro-américains connaissant un début de parturition plus précoce que leurs homologues européens-américains / blancs aux États-Unis témoigne du rôle potentiel des glucocorticoïdes chroniquement plus élevés dans le déclenchement d'une maturation plus précoce du fœtus et des processus de travail en conséquence du racisme, discrimination, ou facteurs socio-économiques ou de l'environnement bâti .

Le travail est à la fois physiquement et émotionnellement intense, même dans des circonstances sociales et environnementales idéales. La naissance humaine se caractérise par le déplacement d'un corps fœtal relativement ajusté à travers le bassin, ainsi que par un site d'attache placentaire hautement vascularisé (exposant à une éventuelle hémorragie). Les défis et les peurs qui ont historiquement accompagné l'accouchement sont tempérés par le soutien social dans le processus d'accouchement (famille, sages-femmes, médecins, doulas, partenaires). La peur entraîne des niveaux de douleur plus élevés, peut inhiber la progression du travail et peut exacerber les symptômes dépressifs postnatals. L'absence de soutien social, même chez les femmes en bonne santé, est associée à un travail et à un accouchement plus problématiques Ainsi, les soins de support pourraient être une stratégie humaine adaptative pour aider le travail à progresser normalement en contrant la stimulation sympathique/adrénergique. Cela peut être particulièrement important étant donné que, la naissance, se produit souvent dans des circonstances pénibles, par exemple, en présence de violence obstétricale (maltraitance ou racisme) L'accouchement se produit également dans le contexte de la vie d'un individu, qui peut ne pas être essentiellement caractérisé par l'amour ou un enfant désiré. Le soutien social confère donc une protection par des moyens physiologiques (expression de l'ocytocine et modulation des hormones du stress). De ce point de vue, les liens entre les personnes de soutien et le parent biologique pourraient être considérés comme étant entrelacés dans la « physiologie du réseau » de la parturition elle-même et pourraient être observés avec la production autonome. Merci à Azure D. Grant pour tout ceci[25].

On lit chez Hotelling :

« Il ne suffit pas que les éducatrices à la naissance disent aux femmes que leur corps est fait pour accoucher et qu'elles fassent confiance à leur sagesse innée. (...). Les femmes doivent entendre parler de l'ocytocine qui est libérée par impulsions, se coordonnant magnifiquement avec la libération de bêta-endorphine qui rend le travail efficace, mais pas sévère. Ils doivent entendre parler des récepteurs de l'ocytocine dans le myomètre de l'utérus qui augmentent de 30 à 100 fois au cours du premier trimestre de la grossesse et jusqu'à 300 fois à terme. Ils doivent comprendre que lorsque la grossesse n'arrive pas à terme, le développement de ces récepteurs de l'ocytocine n'est pas complet et les contractions utérines sont compromises. On pense que l'ocytocine du bébé provoque le début du travail. L'ocytocine ne peut être produite que par la mère et le bébé, et lorsque l'ocytocine synthétique est introduite dans le corps, les récepteurs de l'ocytocine dans le corps de la femme en travail détectent ces niveaux synthétiques élevés et signalent au cerveau de réduire la production de sa propre ocytocine. Sans leur ocytocine naturelle, les mères courent un risque plus élevé de saignement après la naissance, et l'hormone de l'amour qui pousse la mère à protéger son bébé est arrêtée. Au lieu de simplement présenter le cycle Peur-Tension-Douleur, les éducateurs en accouchement doivent également présenter le cycle Oxytocine-Douleur-Adrénaline-Endorphine (..) . Lorsque l'ocytocine est libérée par la mère en travail et son bébé, l'intensité des contractions utérines augmente. À mesure que la douleur augmente, l'adrénaline, une hormone du stress, est libérée et inhibe la libération d'ocytocine. Dans le même temps, les endorphines de la mère montent et la douleur est modulée. L'adrénaline diminue et plus d'ocytocine est libérée. Ce cycle se répète avec des quantités de plus en plus importantes d'ocytocine et d'endorphines, travaillant pour faire avancer le processus du travail et de l'accouchement. À la fin du travail, la pression de la tête du bébé stimule les récepteurs d'étirement dans le vagin inférieur, stimulant le réflexe d'éjection fœtale qui fait sortir le bébé plus facilement et plus rapidement. »[26]

Garner (2011-2012) parle d'une sécrétion massive d'adrénaline bloquant la sécrétion d’ocytocine, d'endomorphines et de prolactine, et perturbant la libération de catécholamines (dont le taux anarchique joue un rôle avéré sur l'hémorragie de la délivrance)[27]. Cette perturbation hormonale a pour conséquence un ralentissement du travail et des contractions moins efficaces et plus douloureuses, ce qui nécessite souvent une perfusion d’ocytociques artificiels. L’accouchement devient long et douloureux, nécessitant la pose d’une péridurale qui peut induire des perturbations iatrogènes[28].

Je n’ai pas eu le temps de documenter ce point, mais j’ai l’impression que l’hypothèse que l’adrénaline vient contrrarier les récepteurs à OT tient la route, et la sensation de danger submerge la parturition. Si tel est le cas, alors tout ce qui stresse les femmes en couche, les inquiète, si elles ont froid ou que quelqu’un stress à côté d’elles perturbe l’accouchement (le rend plus long, plus douloureux, nécessitant de l’aide extérieure).

La phase active du travail a-t-elle des définitions topiques ?

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La phase active du travail semble avoir des définitions géographiquement différentes. L'Organisation mondiale de la santé décrit la première étape active comme « une période de temps caractérisée par des contractions utérines douloureuses régulières, un degré substantiel d'effacement cervical et une dilatation cervicale plus rapide de 5 cm jusqu'à la dilatation complète pour le premier accouchement et les suivants ». Aux États-Unis, la définition du travail actif est passée de 3 à 4 cm, à 5 cm de dilatation cervicale pour les femmes multipares, les mères ayant déjà accouché, et à 6 cm pour les femmes nullipares, celles qui n'avaient jamais accouché. » Cela a été fait dans le but d'augmenter les taux d'accouchement vaginal[29].

Ce qui suit sont mes notes éparses

«  Les niveaux hormonaux augment pour stimuler des vagues d’activité utérine suffisamment fortes pour initier la dilatation. Si le col n’est pas déjà mou, il le devient au cours d’un processus nommé effacement (lequel) est facilité par la prostaglandine F2et par la pression qu’exerce la tête du bébé (ou ses fesses) ». (Davis & Pascali-Bonaro (2010)[3], p.28).

Le pré-travail devient actif quand norme 4 centimètres ? A ce stade, il paraît que les contractions se produisent toutes les 5 mn et durent une minute environ..

Ce qui suit vient également de S. St-Amant p. 144[30] et après : Je n’ai pas eu le temps d’absorber son contenu, mais c'est très riche.

Le Protocole de Dublin (1969)

On doit aux années 1950 les premiers « partogrammes » issus des travaux d’Emmanuel Friedman sur la durée du travail. À partir des observations de l’obstétricien, on développa la fameuse« courbe de Friedman » – une moyenne – qui devint le modèle universel que tout accouchement « normal » finira par devoir suivre (des études récentes [Zhang et al., 2002, 2010] ont d’ailleurs décrit le partogramme de Friedman comme un « idéal » plutôt qu’une moyenne).

«  S’appuyant sur les travaux de Friedman, le médecin Kieran O’Driscoll[2] à Dublin stipula que le caractère pathologique d’un travail résidait dans sa durée : il établit alors la notion de « travail prolongé », qu’il fixa à plus de 12 heures. Au-delà de cette limite, un travail devenait immédiatement pathologique. C’est ainsi qu’à Dublin en 1969 fut élaborée la première version du protocole de « gestion active du travail », là où la logique performative fera montre de ses plus subtils raffinements. Il proposa donc d’agir en amont, pour s’assurer que le premier stade de l’accouchement (le stade des contractions, le deuxième stade étant l’expulsion du bébé ou phase de la poussée et le troisième stade, celui de la délivrance placentaire) ne dure amais plus de 12 heures. Onze ans plus tard, le temps imparti au premier stade pour être dit « eutocique » était encore raccourci.».

O’Driscoll admettait que les contractions stimulées par l’ocytocine de synthèse sont plus douloureuses (et pour cette raison il se disait contre l’induction, du moins en 1986), mais en même temps, selon lui, la perspective pour les femmes d’« en finir plus rapidement » en « accélérant » le travail justifiait l’emploi des ocytociques[31], sorte de facteur de réconfort suffisant. Néanmoins, comme expliqué auparavant, qui dit contractions plus longues, plus rapprochées et plus douloureuses ne dit pas « accouchement plus expéditif »... Je lis dans Le partogramme de Friedman est-il toujours adapté à la gestion du travail des primipares? par Marion DE MOT et Anne MIGNON[32] :

« les résultats récents montrent que le travail physiologique peut s’étendre jusqu’à 5h au-delà de ce que proposait la courbe de Friedman pour les primipares. Les auteurs soulignent également qu’un outil adapté permettrait de diminuer les interventions trop précoces, et, dès lors, de ne pas induire la pathologie malgré nous. »

Conclusion :

« la majorité des auteurs concluent que la courbe de Friedman n’est plus adaptée à la société actuelle, tant en ce qui concerne les caractéristiques de la population que les méthodes utilisées dans la gestion du travail. La courbe proposée par Zhang & al., bien qu’elle n’ait pas encore été validée par tous, semble être la plus proche du travail physiologique tel qu’il est rencontré actuellement. De plus, elle est déjà d’application dans certaines institutions ».

St-Amant, p. 142 :

« On détermina que la dilatation du col utérin devait se faire au rythme constant d’un centimètre à l’heure. De là se construisit l’entreprise de faire se conformer le fonctionnement du corps à une charte, charte dont les paramètres se resserreront au fil des décennies, rentabilité, contrôle du processus et gestion des effectifs obligent. ».

Elle ajoute en note que la détermination temporelle de l’issue des accouchements est devenue aujourd’hui un élément incontournable de la gestion du personnel médicohospitalier et de l’occupation des lieux, étant donné que, partout en Europe et en Amérique du Nord, et même ailleurs, on centralise les naissances : les maternités de proximités sont fermées au profit de grands centres hospitaliers. Des logiciels ont été mis au point pour gérer le travail des femmes en couches (stimulation hormonale augmentée ou diminuée et autres actions mécaniques ou chirurgicales réalisées en fonction de la disponibilité du personnel et des différents espaces) afin d’arriver à une prévisibilité optimale du « temps de parturition » de chacune. Dans ce secteur des soins de santé, les impératifs managériaux et médicolégaux ont davantage de poids que les nécessités et observations cliniques (les refs données sont O’Driscoll, Stronge et Minogue (1973); O’Regan (1998); Hodges et Goer (2004); Tew (1998, chap. 1 : « The Revolution in Maternity Care : The Diverse Strands of a Complicated Tapestry »); DeVries et al. (2001); Wagner (1996); Murphy-Lawless (1998, chap. 5 : « The Production of Norms in Labour : Active Management », pp. 197-228)). Elle cite O'Discroll et Meager[33] :

The degree of dilation of the cervix is recorded on a simple graph and plotted against hours after admission. Full dilation is equated with 10 cm because this is the diameter of a baby’s head. The maximum time allotted is 10 hours. It follows that the slowest rate of dilation accepted is 1 cm per hour. [...] An unsatisfactory rate of dilation of the cervix during the early hours of labour is a clear and unequivoqual expression of inefficient uterine action. This should be corrected in due time.

J’ai souligné des expressions dans cet extrait pour illustrer le caractère normatif et moraliste du langage utilisé : la dilatation est scénarisée (un sens implicite au verbe plotted ici employé), une limitation de temps est prescrite (allotted), une vitesse minimale et constante est imposée (comme s’il s’agissait de la circulation sur une autoroute); l’épreuve de la mesure de la dilatation doit être « satisfaisante » sinon la sentence de l’« inefficacité de l’action utérine » tombe, sans appel (clear and unequivoqual), ce qui doit être « corrigé ». Ce n’est pas étonnant non plus que la procédure de la « gestion active du travail » ait été assortie de prescriptions comportementales : la femme doit savoir se tenir (8 000 femmes annuellement donnaient naissance à l’époque au National Maternity Hospital d’Irlande) et se retenir de toute « scène dégradante », car il en allait du bien de son enfant et de son propre bien autant que du respect du personnel (Adams, 1994, p. 53). La nouvelle disponibilité de l’anesthésie péridurale vint régler le problème des « débordements maternels ».

On constate donc ici que le concept de pathologie dans le contexte obstétrical acquiert avec le protocole de Dublin une détermination fondamentalement temporelle. Or, les observations de Friedman dont O’Driscoll fit une application normative comportaient au départ des biais importants : d’une part, elles ne portaient que sur les femmes une fois rendues à l’hôpital (il n’a donc pas observé le travail dès son enclenchement; comme quoi ce qui n’est pas observable dans le contexte clinique n’est pas... [voir chap. IV]), et, d’autre part, les femmes observées n’étaient pas encore sous péridurale, alors que l’on sait aujourd’hui que celle-ci rallonge substantiellement le premier stade (Par exemple, l’étude de Zhang et al. (2002), portant sur presque trois fois plus de nullipares (1 392) que celle de Friedman à l’époque (500), est arrivée à une durée moyenne de 5,5 heures pour la phase active (de 4 cm à 10 cm), contrairement à 2,5 pour Friedman, et a également constaté que, avant le stade de 7 cm, il est fréquent qu’il n’y ait aucun changement cervical perceptible durant plus de deux heures. Sur l’effet de la péridurale quant au prolongement du travail : Zhang et al. (2001).) . En outre, le protocole O’Driscoll impliquait toute une série de gestes obstétricaux : rupture artificielle des membres amniotiques dès l’admission à l’hôpital et surveillance du rythme de la dilatation; en cas de dilatation en deçà de la vitesse prescrite de 1 cm/h : administration d’ocytocine de synthèse progressivement augmentée jusqu’à obtention de 5 à 7 contractions par 15 minutes. Il faut quand même remarquer que, à l’origine, le démarrage du protocole de gestion active ne pouvait se faire sans assurer à la parturiente soutien et assistance continues une à une. Force est de constater que la présence humaine constante est l’élément qui en a le plus vite été soustrait.

Toujours prévalent (c’est encore la méthode enseignée en obstétrique), le modèle de la « gestion active du travail » s’appuie sur logique mécaniste, incompatible avec la variabilité des phénomènes biologiques, mais avant tout simpliste : plus de contractions = travail plus efficace. Or, l’utérus qui se contracte doit pouvoir ensuite se rétracter, car c’est la rétraction qui, diminuant la taille du muscle utérin, expulse le bébé. La multiplication des contractions – en plus d’augmenter la douleur (en durée et en intensité) et de diminuer l’oxygénation fœtale – amenuise le temps de rétraction de l’utérus (de Gasquet), donc n’est pas un critère d’efficacité du travail.

Dès les premières années de mise en place du protocole O’Driscoll, le taux de césarienne passa de 4 % à 9 %, alors que son application était destinée au départ à sa réduction (l’incidence de la césarienne avoisine ou dépasse les 30 % aujourd’hui partout en Amérique du Nord) en « prévenant » – selon la prémisse sur laquelle il reposait – l’accouchement prolongé. Néanmoins, le modèle a fait école partout. Au fur et à mesure que la gestion active du travail se généralisait, la fenêtre de durée dite « normale » d’accouchement rétrécissait d’autant : établie à 36 heures en 1950, elle passa à 24 heures en 1960, à 12 heures en 1972 (Wagner, 1996), et était estimée à 8 heures en 2004 (temps des services intrapartum alloués selon les plus récents modèles managériaux hospitaliers) . La gestion active du travail est devenue un standard universel de pratique, étalon de la logique performative. Sous sa gouverne, le corps féminin est littéralement « mis en incapacitation » : l’amniotomie – rupture artificielle des membranes (RAM) – oblige d’entrée de jeu la femme à rester en observation même si le travail stagne; la perfusion et le moniteur fœtal restreignent la mobilité; l’ocytocine de synthèse inhibe la production d’ocytocine naturelle (elle n’agit pas de la même manière d’ailleurs), bouleversant ainsi la synergie avec les autres hormones de la parturition (endorphines, prolactine, œstrogènes, progestérone et adrénaline); l’anesthésie péridurale immobilise en position couchée, ce qui nuit à l’engagement et à la rotation du bébé dans le bassin, et cause des dystocies de progression (malposition et coincement du fœtus).

La passivité de la femme n’est plus tant acquise « par voie de remontrance » : elle est chimiquement assurée.

Dernière considération, linguistique cette fois. Concurremment au déploiement et à la généralisation des mesures de stimulation du travail s’est développée une terminologie de la défaillance physiologique du corps féminin pour les appuyer et les justifier. Ainsi parle-t-on d’« incompétence du col », d’« échec de progression (de la dilatation) », d’« inertie » voire de « paresse utérine » ou encore de « contractions inadéquates ». Il est à remarquer que, au-delà de celle d’inaptitude physique, ces expressions transportent toutes l’idée d’un manque de volonté, de force morale, de réticence à l’effort caractérisant les femmes elles-mêmes, comme si l’accouchement était un contrôle scolaire auquel seul un très petit nombre d’entre elles peut prétendre réussir. Cette terminologie s’est également trouvée réunie sous le vocable parapluie de « dystocie », du grec dus-difficile et tokos-parturition, introduit dans la langue anglaise au début du 18e siècle. La portée symbolique de ce terme est particulière forte, d’abord par sa consonance nosologique, et ensuite par la valeur de sentence (ou point de non-retour) qu’on lui accorde dès qu’il est prononcé, et enfin parce qu’il recouvre dans le champ lexical de l’obstétrique toute une panoplie d’observations dans le déroulement de l’accouchement considérées comme autant de complications : dystocie de progression, dystocie de la dilatation, dystocie contractile, dystocie des épaules, etc., lors même qu’elles ne sont pas comparables sur le plan de la sévérité et que les tenants-es du paradigme holistique de l’enfantement leur attribuent plus ou moins de réalité (hormis la dystocie des épaules, correspondant à une situation clinique précise, qui n’est pas vague et arbitraire comme les autres formes de dystocie, mais dont les causes sont souvent néanmoins iatrogènes...).

La dystocie intrapartum d’aujourd’hui correspond tout à fait à ces pauses dans le cours du travail que même un Joseph DeLee (du moins le Joseph DeLee tardif) considérait comme nécessaires à éviter un « streamlined labor », situation qu’il redoutait tant. Or, de nos jours, le travail une fois enclenché doit précisément s’effectuer en progression constante – « filer en droite ligne » – pour être déclaré « normal » (voir Wagner, 1996). Qui plus est, le morcèlement du concept de dystocie en toutes sortes de sous-dystocies peut être corrélé avec le revirement sémantique notable qu’a connu ce terme il y a trente ans, lors de la première vague de la montée constante des taux de césariennes aux États-Unis, époque où l’intervention dépassa pour la première fois le seuil critique des 15 % au-delà duquel les effets adverses de l’opération dépassent ses bénéfices espérés (Childbirth Connection, 2010).

En d’autres mots, comme en témoignent les éditions successives du Williams Obstetrics (la « bible » du domaine), le concept de dystocie s’est calqué sur les nouvelles modélisations statistiques du travail qui se substituaient alors à l’ancien mode anatomomécanique de construction des entraves à la naissance, et ce afin de conférer le justificatif scientifique à ce qui était en train de se produire :

[L]a dimensionnalité de l’anormalité changea; le motif principal d’une première césarienne, « dystocie » ou échec de la progression efficace du travail, a été subdivisé en plusieurs différentes causes de dystocie. En 1980, alors qu’on tenait la dystocie responsable du tiers des césariennes à l’époque où l’intervention connaissait une hausse spectaculaire, un changement de compréhension du terme se produisit. Ce changement « correspondait au passage d’une considération anatomique à une approche plus fonctionnelle du travail – à savoir moins de pelvimétrie et plus de graphiques du travail (Arney, 1985, p. 146).

Il importe également de saisir la composante psychologique du mot dystocie : on peut y déceler un jugement implicite quant à la résistance et à l’incompétence de la femme/du corps féminin, avec traitement à la clé; la prolifération des formes de dystocies obstétricales oïncide précisément avec l’explosion de la taxonomie des troubles comportementaux dans la bible de la psychiatrie – le DSM (Diagnostic and Statistical Manual) – qui passèrent de 100 en 1950 à plus de 400 dans les années 2000. On peut facilement extrapoler à l’obstétrique les propos du psychanalyste et professeur de psychopathologie Roland Gori, critiquant une psychiatrie moderne « sous l’empire des “dys” : dysthymique, dysphorique, dyslexique » : comme tous les individus sont aujourd’hui potentiellement porteurs d’un trouble, cela « étend à l’infini le champ de la médicalisation de l’existence et la possibilité de surveillance sanitaire des comportements », une surveillance établie « en liaison permanente avec l’industrie pharmacologique » . On voit bien comment le concept de dystocie obstétricale sert la double visée du contrôle normatif du comportement de la femme par le contrôle performatif du corps maternel, tout en garantissant la perpétuation de ce contrôle.

Une fois l’accouchement puis le travail performés et pathologisés, l’étape qui allait logiquement suivre fut celle de la détermination du moment opportun du déclenchement du travail. L’ocytocine de synthèse a grandement facilité la chose et propulsé la procédure au rang de routine en raison de son taux élevé de succès, mais elle n’est pas la seule méthode employée et encore moins la première. Bien que la connaissance de substances favorables au déclenchement de l’accouchement (ergot de seigle ou huile de ricin, par exemple) remonte à des temps immémoriaux, l’idée de faire naître l’enfant prématurément germa dans les années 1800 pour les cas de bassins difformes, afin d’éviter une symphyséotomie ou la césarienne, ou pour les cas de prééclampsie et éclampsie (un désordre hypertensif dangereux causé par la grossesse et qui demeure largement incompris aujourd’hui). Par la suite, toutes sortes d’expérimentations ont été menées aux 19 e et 20 e siècles : dilatation mécanique du col utérin avec des objets divers, des ballons ou en y suspendant des poids, dilatation manuelle, lavements, jeûnes, injection de lipides par intraveineuse, d’air ou d’acide carbonique dans l’utérus. On tenta même l’électricité dans les années 1800... De nos jours, l’induction par ntraveineuse n’est d’ordinaire tentée que sur un « col favorable », c’est-à-dire mou, en partie effacé. Si tel n’est pas le cas, on a d’abord recours aux méthodes de dilatation mécanique ou, plus rarement, manuelle, mais d’ordinaire à l’application locale d’un gel pour faire « mûrir » le col, composé de prostaglandines provenant du sperme porcin. Selon une approche plus holistique, l’activité coïtale est souvent « prescrite » en fin de grossesse pour favoriser le déclenchement, d’une part parce qu’elle provoque des contractions utérines et d’autre part pour les prostaglandines du sperme humain (ce que certaines personnes nomment avec humour « déclenchement à l’italienne » (voir quelques occurrences dans Rondeau [2005]). Il existe aussi un médicament terriblement efficace pour déclencher l’accouchement, le misoprostol (Cytotec), dont l’utilisation reste extrêmement controversée, celui-ci n’ayant jamais été commercialisé pour cet usage par le fabriquant et qui est associé à de graves complications : hypertonie utérine, syndrome d’hyperstimulation, naissances trop rapides et taux élevé de rupture utérine (5 %) dans les cas d’utérus cicatriciels (césarienne antérieure).

17 % des médecins en France rapportaient y avoir tout de même recours en 2006 (EGN, 2006). Bien que l’administration de misoprostol pour déclencher l’accouchement ne soit pas approuvée par la Food and Drug Administration, son usage reste très répandu aux États-Unis également (Wagner, 2004, p. 225-226), de même qu’au Canada et au Québec, en raison de son très faible coût.

Autre méthode prisée : l’amniotomie, ou « rupture artificielle des membranes », pratiquée en principe lorsque la tête du bébé est engagée afin d’induire ou accélérer le travail. Cette intervention est réalisée lors de 65 % des accouchements aux États-Unis (d’après LTMII) 88 n geste qui fait souvent partie de la routine dès l’admission à l’hôpital. L’amniotomie favorise les contractions en augmentant l’appui de la tête du bébé sur le col, mais a en même temps pour effet de créer un travail « à sec », ressenti généralement comme plus douloureux. Cependant, aussitôt que cette intervention est réalisée, une femme ne pourra plus retourner chez elle dans le cas où le travail ne s’enclencherait pas ou stagnerait : n’étant plus protégé par le sac amniotique, le bébé se trouve à risque d’infection; la stimulation hormonale sera donc nécessairement entreprise si les contractions s’espacent sensiblement ou s’interrompent.

Qui plus est, une règle en vigueur depuis les années 1960 stipule qu’une fois les membranes rompues, ou bien spontanément ou bien artificiellement, la naissance doit avoir lieu dans les 24 h, et un nombre grandissant de praticiens-nes ou d’établissements n’accordent plus, selon leurs protocoles, qu’un délai de 12 h, 8 h, voire moins. Pour les femmes, cela correspond à un ultimatum : elles feront face rapidement à la stimulation hormonale et, en définitive, à la césarienne si rien ne se passe. Dans cette optique, l’amniotomie ne devrait pas être présentée comme un geste banal et sans conséquence. Sa pratique routinière ne figure d’ailleurs pas dans la liste des pratiques fondées sur des données probantes. La fenêtre des 24 h et le risque infectieux associé aux membranes rompues ont pourtant été remis en question par plusieurs travaux, dont une étude canadienne de 1996 (Hannah et al.) portant sur 5 000 femmes, laquelle n’a pas démontré de risques supplémentaires d’infection néonatale jusqu’à 4 jours après la rupture spontanée des membranes, dans la mesure où les touchers vaginaux, reconnus comme l’un des principaux vecteurs infectieux, ont été évités (Block, 2007, p. 12). Sachant que les consensus cliniques (peer review) prévalent d’ordinaire sur les données probantes (scientific evidence) dans les procès pour responsabilité professionnelle, on comprend la mesure de l’impasse dans laquelle se retrouvent les femmes une fois posé le délai à respecter pour entrer en travail actif et accoucher une fois le sac amniotique brisé ou fissuré.

Voilà qui nous amène à quelques considérations sur le toucher vaginal. Pour mémoire, on impute en grande partie à ce geste clinique les hécatombes des épidémies de fièvres puerpérales qui sévirent du 17e au 19e siècles (la triste histoire du médecin viennois Ignaz Semmelweiss nous est connue, mort interné, en paria de la profession, dont les thèses sur l’importance du lavage des mains et la responsabilité des soignants dans l’étiologie et la propagation des infections puerpérales furent accréditées bien après sa mort...). De nos jours, le toucher vaginal est vu comme un élément essentiel du suivi ante et intrapartum; il est pratiqué de façon extrêmement libérale en Amérique du Nord, en France, et en fait partout où prévaut le modèle interventionniste de l’obstétrique, souvent par différentes personnes au cours de l’accouchement et parfois à intervalles rapprochés (à des fins de formation notamment). À l’opposé, aux Pays-Bas – un des pays affichant les meilleures statistiques périnatales du monde –, une philosophie différente s’est maintenue : ce geste invasif, peu apprécié des femmes, n’est pas utile ou nécessaire en tant que source d’information sur le déroulement de l’accouchement; d’autres signes sont privilégiés, ceux émis par la parturiente : sons, postures, souffle, sensations exprimées. Bien que la valeur sémiotique attribuée à l’évaluation ponctuelle et répétée de la dilatation lui soit antérieure, la généralisation de l’épidurale l’a rendue pratiquement incontournable, puisque la femme « ne sent plus » ce qui se passe dans son corps et ne peut plus, ou presque plus, bouger. Il faut donc pouvoir se baser sur cette information afin de savoir quand appeler le ou la médecin de garde lorsque vient le temps de l’expulsion et aussi quand demander à la femme de commencer les efforts expulsifs. Parmi les autres pratiques communes de déclenchement de l’accouchement figure enfin le décollement (stripping ou sweeping) des membranes, qui consiste à détacher manuellement les membranes du col afin de stimuler la production de prostaglandines et faire entrer en travail dans un avenir rapproché. Cette pratique est le plus souvent effectuée lors de l’examen gynécologique de la dernière consultation du suivi prénatal. Les témoignages des femmes ont fait apparaître qu’elle est fréquemment réalisée sans avertissement et sans consentement, ainsi s’étonnent-elles : « Lors de mon dernier rendez-vous, le médecin/la sage-femme m’a fait tellement mal! », pour découvrir plus tard qu’il s’agissait en effet d’une tentative de stripping.

Pourquoi induire? Les indications médicales à « provoquer » l’accouchement, comme le dit le langage populaire, sont notamment : la crainte de « postmaturité » ou le dépassement de terme, la suspicion de « macrosomie » (gros bébé), le manque de liquide amniotique, le retard de croissance intra-utérin ou une autre détresse fœtale suspectée, et enfin une condition de santé maternelle préoccupante. Ces indications sont néanmoins pour la plupart controversées.

D’abord, la macrosomie. Selon la croyance populaire (qui court également chez de nombreux praticiens-nes), plus un bébé reste longtemps dans le sein maternel, plus il sera gros. Or, statistiquement, la grosseur fœtale paraît se stabiliser après 40 semaines de gestation (Block, 2007, p. 9). La culture obstétricale occidentale redoute toujours le « gros bébé », et cette peur est à la base de bon nombre de décisions d’induction. Elle est aussi bien implantée chez les femmes. (…) ».

Navré, j'ai mis ce bloc, éclairant mais méritant investigation.

Concernant la mécanique obstétricale, il serait intéressant de comparer la méthode De Gasquet (basée sur des modèles théoriques illustrés) avec les animations et simulations basées sur l'imagerie moderne (IRM et scanner) du Dr. Renner[34][35][36]. La thèse du Dr. David Desseauve offre également une base solide pour aborder les différents thèmes[37] , tout comme les publications d’Olivier Ami et al. sur les contraintes subies par le crâne du bébé[38][39]. Les contraintes exercées sur le périnée peuvent aussi être visualisées grâce à la publication de Nikhil Sindhwani et al.[40]. Ces éléments permettent d'apporter une analyse critique sur les quelques facettes du dilemme obstétrical[41] et serait susceptible de permettre à la parturiente de percevoir les différentes options dont elle disposerait pour gérer son accouchement.

Est-il exact qu’on accepte désormais de donner à manger et boire pendant le travail, et non en France ?

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Un jeûne strict (ni solides, ni liquides, ce que les anglophones nomment NPO, nil per os, rien par la bouche) a été et reste imposé aux femmes en travail d'accouchement depuis 1946 et la publication du Dr Curtis Lester Mendelson[42]. La raison ? Prévenir le syndrome de Mendelson, le risque d'inhalation bronchique du liquide gastrique, ou pneumonie d’inhalation, pendant une éventuelle anesthésie générale.

Or ce risque est rare, de plus en plus, il est évalué à moins de 1 % chez les patientes sans risque élevé. Par ailleurs il existe des méta-analyses depuis longtemps (par exemple Myriam Rège-Walther & al 2010[43]) qui montrent que boire ou manger durant l’accouchement, comparé à l’accouchement à jeun ou glaçons à sucer, n’augmente pas : le risque de césarienne ; le risque d’accouchement assisté (ventouse ou forceps par voie basse)  ; la durée du travail ; le risque de vomissements ; le risque d’un score Apgar.

Dans une autre revue systématique sur le sujet, en 2010 toujours (et refait en 2013[44]), Singata & al. écrivent :

« Étant donné que les preuves ne montrent aucun avantage ou inconvénient, rien ne justifie la restriction des liquides et de la nourriture pendant le travail pour les femmes à faible risque de complications. Aucune étude n'a porté spécifiquement sur les femmes présentant un risque accru de complications, il n'y a donc aucune preuve à l'appui des restrictions dans ce groupe de femmes. »[45]

Je note tout de même que les recommandations françaises de la HAS[46] autorisent les boissons (ce qu’un bon nombre de maternités françaises n’ont pas l’air de suivre). Pour l’alimentation solide, c’est plus nuancé : en cas de malaise grave ou d’anesthésie générale urgente il existe un risque, faible, d’inhalation de sucs gastriques.

Donc là encore, il s’agit d’une balance bénéfice / inconvénient qui est tranchée en France de manière générale dans le sens de la prévention maximisée d’un risque très faible

Quelle est l’utilité réelle du monitoring pendant l’accouchement ?

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A-t-il amélioré les statistiques périnatales ou juste fait augmenter le nombre de césarienne en cours de travail sans améliorations statistiques pour les bébés ? Quels sont ses effets délétères ?

Je n'ai pas travaillé cette question.

Quelle est l’utilité réelle du toucher vaginal et du décollement de membranes ?

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Y a-t-il des effets néfastes sur le processus et sur le vécu des femmes ?

Je n'ai pas travaillé cette question.

Que sait-on sur les conséquences de la montée des chiffres de césarienne ?

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Je n'ai pas travaillé cette question.

Que sait-on des effets de la péridurale sur le bébé / la mère ?

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Je n'ai pas travaillé cette question.

Délivrance

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On me rapporte qu' « au moment de la sortie du bébé, une femme sécrète un pic d’ocytocine, plus haut que ce qu’elle n’a secrété jusque-là, qui va induire de puissantes contractions de l’utérus permettant de décrocher le placenta avec pertes minimales de sang. Ce pic d’ocytocine est notamment induit par la rencontre avec son bébé, le fait de sentir sa peau, le voir, voir ses yeux et sentir son odeur. Tout ce qui perturbe ce moment fait courir un risque à la femme de perdre du sang. L’hémorragie du post-partum est l’un des deux grands risques pour la femme, avec l’éclampsie. »

Odent déclare (2003[47]) que « le meilleur moyen de protéger le périnée, d'éviter une déchirure grave et d'éliminer les motifs d'épisiotomie est de s'écarter le moins que possible à partir du modèle physiologique. En d'autres termes, la meilleure façon est de créer les conditions d'un authentique réflexe d'éjection du fœtus »

Je n’ai pas étudié ces points, mais St-Amant n’y va pas de main morte :

« Comme « tout bien portant est un malade qui s’ignore[48] », l’accouchement eutocique ne l’est que jusqu’à la survenue de l’inévitable complication… Pourtant, les complications « surprises » les plus redoutées – procidence du cordon, dystocie des épaules, hémorragie maternelle ou apnée néonatale – ont toutes une étiologie dont la prévalence iatrogène, on le verra, est assez facile à identifier : pour la procidence, la rupture artificielle des membranes du sac amniotique; pour la dystocie des épaules, l’immobilité de la mère, la position sur le dos et les manœuvres usuelles de dégagement de la tête; pour l’hémorragie, la gestion active du travail, les hormones de synthèse et la traction exercée sur le cordon ombilical durant la phase de la délivrance placentaire; et l’apnée néonatale, encore une fois la gestion active et le décubitus dorsal, ainsi que le clampage intempestif du cordon ombilical ». (St-Amant[30], p. 51).

La richesse du lait maternel a-t-elle changé au cours du temps ?

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Je n’ai pas étudié ce point
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