Cristallographie géométrique/Symétrie translatoire
Groupe des translations
modifierDéfinition, propriétés
modifierConsidérons l'ensemble infini des translations t d'un réseau de dimension n. Soit une loi interne de composition • telle que la composition des translations t1 et t2, de vecteurs τ1 et τ2, produit une translation t3 de vecteur τ3=τ1+τ2 : t1•t2=t3. L'ensemble des translations du réseau muni de la loi interne • forme un groupe, noté Tn, dont les éléments sont les translations du réseau. En effet :
- la composition de deux translations t1 et t2 de vecteurs τ1 et τ2 quelconques produit une translation t3 qui est aussi un élément de Tn : le groupe est clos ;
- la loi de composition est associative : (t1•t2)•t3=t1•(t2•t3) ;
- il existe un élément neutre e tel que e•t=t•e=t : e est la translation de vecteur nul ;
- tout élément t possède un élément inverse t−1, tel que t•t−1=t−1•t=e : si t est une translation de vecteur τ, t−1 est la translation de vecteur −τ.
D'autre part, le groupe des translations Tn est un groupe abélien : pour tout couple de translations t1 et t2, t1•t2=t2•t1, c'est-à-dire que l'ordre dans lequel sont effectuées les translations ne change pas le résultat. Par simplicité de notation, on écrira par la suite t1t2 au lieu de t1•t2.
L'« ordre » d'un groupe est le nombre d'éléments qui le forment. Le groupe des translations Tn contient une infinité d'opérations de translations, son ordre est donc .
Éléments générateurs
modifierLes translations de vecteurs de base ei du réseau (avec la translation de vecteur nul qui est l'élément neutre) permettent par l'application de la loi de composition de reconstruire l'ensemble des éléments du groupe Tn. Les translations de vecteur ei forment un « jeu de générateurs » du groupe Tn. Ce jeu de générateurs contient un nombre fini d'éléments, plus précisément, le nombre d'éléments générateurs de Tn est égal à la dimension n de l'espace dans lequel ont lieu les translations. Dans l'espace bidimensionnel, les éléments générateurs de T2 sont les translations des vecteurs a et b, ta et tb. Dans l'espace tridimensionnel, les éléments générateurs de T3 sont les translations des vecteurs a, b et c, ta, tb et tc.
Sous-groupes
modifierLe groupe des translations Tn contient une infinité de sous-groupes. Les « sous-groupes triviaux » de Tn sont Tn lui-même et le groupe ne contenant que l'élément neutre, E (ceci est valable pour tous les groupes). Les autres sous-groupes de Tn sont les « sous-groupes propres » de Tn et sont formés par l'application de la loi de composition sur un jeu de générateurs contenant un nombre de translations de vecteurs de base inférieur à n, ou sur un jeu de générateurs contenant des translations de vecteurs multiples des vecteurs de base, etc. La notation U<T signifie que le groupe U est un sous-groupe de T.
Par exemple, le groupe Ta formé par les translations ta de vecteurs combinaisons linéaires de τa=a est un sous-groupe de T3 :
- la composition de deux éléments de Ta produit un élément qui appartient à Ta et T3 ;
- comme pour T3, la loi de composition est associative ;
- e est un élément de Ta ;
- pour chaque élément de Ta, il existe un élément inverse ;
- le groupe Ta n'est pas vide ;
- tous les éléments de Ta sont aussi éléments de T3 : Ta est inclus dans T3.
Les vecteurs des translations de Ta sont tous parallèles à la direction a.
De même, le groupe Ta,b+c formé par les translations ta et tb+c de vecteurs combinaisons linéaires de τa=a et τb+c=b+c est un sous-groupe de T3. Les vecteurs des translations de Ta,b+c sont tous parallèles au plan (a,b+c).
De manière générale, le groupe Tm d'un réseau de dimension m est un sous-groupe de Tn si m est inférieur ou égal à n.
Isomorphisme
modifierDeux groupes T et U d'éléments t et u sont isomorphes si il existe une application bijective f telle que pour tout élément ti de T, f(ti)=uj, et qui préserve la structure de groupe, et dont l'application réciproque f−1, telle que pour tout élément ui de U, f−1(ui)=tj, préserve aussi la structure de groupe. D'autre part, f doit vérifier les relations suivantes :
Les relations d'isomorphisme entre groupes permet de les classer en « classes d'isomorphisme » ou « groupes abstraits », qui contiennent des groupes de mêmes propriétés. En particulier, deux groupes isomorphes ont le même ordre.
Par exemple, dans l'espace unidimensionnel, soit T le groupe contenant l'ensemble des translations de réseau dont l'élément générateur est la translation ta de vecteur a. Soit U le groupe dont l'élément générateur est la translation u2a=t2a de vecteur 2a. U est un sous-groupe non trivial de T : il est inclus dans T mais il ne contient pas toutes les translations de vecteurs combinaisons linéaires impaires de a, (2n+1)a où n est un nombre entier. Soit f l'application qui associe à une translation tna de T la translation de vecteur double : t2na est un élément de U (et de T). La condition f(t1t2)=f(t1)f(t2) est vérifiée : le vecteur double de la translation t1t2 est égal à la somme des doubles des vecteurs des translations t1 et t2. L'application réciproque de f est f−1 qui associe à une translation u2na de U la translation de vecteur moitié : tna est un élément de T (mais pas forcément de U si n est impair). La condition f−1(u1u2)=f−1(u1)f−1(u2) est aussi vérifiée. Les deux groupes U et T sont donc isomorphes.
Par contre, dans le premier exemple tridimensionnel de la section précédente, le sous-groupe Ta de T3 n'est pas isomorphe à T3 : il n'existe pas d'application permettant d'associer de manière unique à tout élément de T3 un élément de Ta.