Cosmologie/L'évolution du rayonnement

La majorité du rayonnement dans l'univers forme un gaz de photons homogène et isotrope (nous détaillerons cette remarque quand nous aborderons le rayonnement de fond diffus cosmologique). Autrement dit, c'est un rayonnement de corps noir. Ce gaz de photons possède diverses propriétés, qui sont affectées par l'expansion : il possède une densité d'énergie, une température, et bien d'autres paramètres. Formellement, le rayonnement forme un gaz parfait, ce qui fait qu'on peut réutiliser les équations du chapitre précédent. Pour un gaz de photons, on peut prouver que . Les équations du chapitre précédent donnent alors :

(énergie par particule)
(densité d'énergie)

Pour les équations qui dépendent du facteur d'échelle, on a :

Dans la suite de ce chapitre, nous allons expliquer plus en détail d'où proviennent ces équations, ce qu'elles signifient physiquement et en donner des démonstrations alternatives.

L'évolution de la température du rayonnement avec l'expansion modifier

L'équation principale de ce chapitre dit que la température du rayonnement diminue au même rythme que l'augmentation du facteur d'échelle. Ainsi, le rayonnement né dans les premiers instants de l'univers, refroidit progressivement au fur et à mesure que l'univers s'étend.

 

Malheureusement, l'équation est rarement utilisable telle quelle. En effet, les facteurs d'échelle   et   ne sont pas connus et ne peuvent pas se mesurer. L'idéal est de remplacer les facteurs d'échelle par une grandeur qui se mesure. Le redshift fonctionne à merveille, d'autant qu'on sait qu'il est relié au facteur d'échelle par les équations vues il y a quelques chapitres. Dans ce qui suit, on suppose que   est l'instant d'émission de la lumière, alors que l'observation a lieu à l'instant  . Avec cette convention, on sait que  . En faisant le remplacement dans l'équation précédente, on trouve :

 

Précisons que cette équation vient de la convention  . Mais avec la convention inverse, à savoir  , on trouverait l'équation inverse, à savoir :

 

L'évolution de la densité d'énergie d'un gaz de photons avec l'expansion modifier

 
Illustration de la loi de Planck.

Un gaz de photons est formellement décrit par la fameuse équation de Planck, que nous ne détaillerons pas ici. Celle-ci donne tout simplement la densité d'énergie des photons qui possèdent une fréquence f, dans un gaz de photons de température T. Et cette équation contient un terme, la fréquence, sensible au facteur d'échelle. Voici cette équation de Planck :

 

La distribution des photons suivant leur fréquence est illustrée par le schéma de droite. Celui-ci montre que le pic d'intensité, à savoir la fréquence où le nombre de photons est maximal. Or, ce pic est proportionnel à la température moyenne du gaz de photon, d'après la relation suivante :  .

En intégrant l'équation précédente sur toutes les fréquences, on trouve la fameuse loi de Stephan, qui donne la densité d'énergie d'un gaz de photons en fonction de sa température. Voici cette loi, avec   une constante, la constante de Stephan, et   la température :

 

On peut la reformuler comme suit :

 

Sachant que l'on a  , on a :

 

Dans ce qui suit, nous noterons la quantité   comme suit :  . L'équation précédente s'écrit alors, d'une manière plus formelle :

 

Au passage, on aurait pu avoir l'intuition de ce résultat dès le début du chapitre, quand j'ai dit que pour le rayonnement, on a :  . Vu que la pression est proportionnelle à la densité d'énergie, on aurait du en déduire que celle-ci évoluait en  .

L'évolution du nombre de particules d'un gaz de photons modifier

Des équations précédentes, il est possible de déterminer le nombre de photons par unité de volume, appelée la densité de photons par analogie avec la densité de matière, et la manière dont elle évolue avec le facteur d'échelle. Pour la calculer, il suffit de diviser la densité d'énergie par l'énergie moyenne d'un photon. On obtient alors :

 

En simplifiant, on a :

 

Ce qui se reformule comme suit :

 

Sachant que l'on a  , on a :

 

L'interprétation physique de la variation de densité énergétique du rayonnement modifier

On a vu que la densité d'énergie du rayonnement varie selon la puissance quatrième du facteur d'échelle :

 

On peut donner un sens physique à cette équation. Premièrement, l'énergie du rayonnement est diluée dans un volume plus grand, égal à la puissance troisième du volume initial. La densité est donc divisée par la puissance troisième. À cela, il faut ajouter la diminution de la longueur d'onde causée par le facteur d'échelle. La somme de ces deux contributions donne la formule précédente. Pour nous en rendre compte, on peut partir de la définition de la densité d'énergie du rayonnement :

 

La variation de la densité d'énergie provient de deux sources : l'une est la variation de   et l'autre est la diminution de  . La première varie comme  , car le nombre de photons reste globalement constant et que l'expansion fait augmenter le volume en  . Cela sera justifié dans la section suivante, mais le résultat est le même que celui vu dans le chapitre précédent. Si l'énergie par particule demeurait constante lors de l'expansion, on aurait l'équation  . On le voit, il manque un facteur   pour obtenir l'équation finale. On peut facilement deviner son origine quand on sait que l'énergie moyenne d'un photon dans un gaz de photons est approximativement de :

 

On applique alors l'équation  

 

En posant  , on a :

 

En clair, la densité d'énergie diminue avec le facteur d'échelle pour deux raisons : l'expansion dilue le rayonnement dans un volume plus élevé, et l'expansion réduit la température du rayonnement.

Un autre argument qualitatif (et peu rigoureux) nous permet de justifier pourquoi l'expansion réduit l'énergie par particule. Rappelons qu'un photon de fréquence f a une énergie égale à  , avec h la constante de Planck. Or, on a vu que la fréquence varie avec l'inverse du facteur d'échelle, l'énergie par photon doit faire de même, ce qui donne : math>{E \over N} \propto f \propto a^{-1}</math>. En clair, l'expansion étire la longueur d'onde des photons, ce qui leur fait perdre de l'énergie. Cependant, cette dérivation n'est pas parfaite, vu qu'on mélange la fréquence d'un photon unique avec la température d'un gaz de plusieurs photons. Ce qui nuit à la généralité de l'argument.

Cela a une conséquence assez importante : l'énergie de l'univers ne se conserve pas, mais diminue avec le temps ! Et ce n'est pas un problème qui serait réglé en relativité générale : il y a réellement une perte d'énergie quel que soit le modèle utilisé. À l'heure actuelle, on ne sait pas comment résoudre ce problème (si tant est que ce soit vraiment un problème).