Électronique/Polarisation des transistors BJT et FET

Dans ce chapitre, nous allons étudier de montages à base de transistors, de résistances et de sources de tension/courant, qui sont utilisés pour fabriquer des amplificateurs à base de transistors, mais aussi pour d'autres fonctions. Toujours est-il que nous avons besoin de parler en détail de ces montages et de la polarisation d'un transistor en général, avant de passer aux chapitres suivants.

La polarisation d'un transistor est l'état dans lequel il est tant qu'on ne lui envoie pas le moindre signal, état définit par les courants continus qui le traversent et les tensions continues à ses bornes. Polariser un transistor revient à régler les tensions et courants continus qui le traversent. C'est un processus important pour fabriquer des amplificateurs avec un transistor, en utilisant son fonctionnement en petits signaux. L'idée est que si on envoie un signal quelconque en entrée du transistor, celui-ci sera modifié d'une manière non-linéaire, ce qui ne permet pas de fabriquer des amplificateurs utilisables. Cependant, le fonctionnement en petit signal d'un transistor est linéaire, ce qui fait qu'il peut amplifier des petits signaux de manière linéaire. Les signaux amplifiés sont des déviations par rapport à une tension de base, la tension de polarisation, qui garantit que le transistor est en régime linéaire. Imposer la tension de polarisation se fait en polarisant le transistor, avec les montages que l'on va voir dans ce chapitre.

La polarisation d'un FET

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Polariser un FET demande à fixer le courant Id et la tension VDS du FET, de manière à ce que celui-ci fonctionne dans la région de saturation. Il existe plusieurs méthodes pour cela, chacune avec ses avantages et inconvénients.

La polarisation par réglage de VGS

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Polarisation par réglage de VGS d'un FET

La méthode de polarisation la plus simple demande de placer la tension VGS adéquate, pour obtenir le courant ID souhaité. La tension VGS peut être obtenue telle qu'elle, en utilisant une source de tension qu'on connecte sur la grille. On parle alors de polarisation directe, ou encore de polarisation par biais fixe. C'est la méthode la plus simple et la plus intuitive, mais elle a l’inconvénient de consommer plus de place et de circuits, pour la source de tension.

Alternativement, la tension VGS peut être obtenue à partir de la tension d'alimentation en utilisant un simple pont diviseur, ce qui élimine le besoin d'utiliser une tension supplémentaire pour VGS. Cette méthode porte le nom de polarisation par pont diviseur. C'est souvent cette solution qui est utilisée pour fabriquer la tension voulue et l'envoyer sur la grille du transistor. Elle est simple et a aussi l'avantage de faciliter le câblage du circuit, vu que la tension d'alimentation est généralement reliée au drain du transistor, par l'intermédiaire d'une résistance, et est donc toute proche de la grille.

Mais utiliser naïvement l'équation   n'est pas une solution viable. Le fait est que les transistors FET d'une même série sont certes fabriqués de la même manière, mais qu'ils n'ont pas exactement les mêmes caractéristiques. Leur capacité, leur longueur de canal, et bien d'autres paramètres varient quelque peu d'un transistor à l'autre. En clair, deux transistors sortant d'une même usine et d'un même modèle auront un coefficient K différent. Fixer une tension VGS précise donnera alors des courants de saturation Id forts différents et la polarisation obtenue ne sera pas la même d'un transistor à l'autre. Il faut donc trouver d'autres méthodes pour compenser ce genre de défauts.

La polarisation d'un BJT

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Dans cette section, nous allons étudier les montages pour polariser un BJT avec des résistances et des sources de tension. Nous allons étudier les montages de ce type qui sont les plus communs, les plus répandus. Pour détailler, nous allons voir les montages suivants :

  • le montage à biais fixe (fixed bias circuit) ;
  • le montage à biais fixe avec résistance d’émetteur (emitted-stabilized fixed bias circuit) ;
  • le montage à biais par pont diviseur ;
  • le montage à biais à rétroaction de voltage ;
  • le montage à biais collecteur-base.

La polarisation à biais fixe

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Pour commencer, nous allons étudier le circuit illustré ci-contre. Comme on le voit, la base et le collecteur sont reliés à la même source de tension, à travers des résistances différentes, judicieusement nommées   et  . L'émetteur est connecté à la masse. Ce circuit est souvent représenté avec des condensateurs sur son entrée et sa sortie, qui servent à filtrer les tensions continues. Ils servent quand le transistor est utilisé comme amplificateur, ce qui est leur utilisation principale. Lorsqu'on envoie un signal à amplifier au transistor, sa composante continue doit être supprimée, seule la composante alternative devant être amplifiée. Pour être plus précis, la composante continue est remplacée par la tension de polarisation, générée par le montage que l'on va voir. Pour cela, les deux condensateurs sont utilisés pour éliminer la composante continue tout en laissant passer le signal alternatif. Le circuit avec et sans condensateurs est illustré ci-dessous.

 
Polarisation à biais fixe
 
Polarisation à biais fixe, avec condensateurs de découplage.

On peut résumer le fonctionnement de ce montage sur un graphique avec la tension VCE en abscisse et le courant IC en ordonnée, graphique qui est illustré ci-dessous. Sur ce graphique, on peut tracer les deux équations ci-dessous.

La première est tout simplement tirée de l'application de la loi des mailles dans le circuit. Elle donne un segment de droite décroissant, de pente égale ) -1/Rc.

 

La seconde décrit la relation entre IC et VCE pour un transistor BJT et nous l'avons déjà rencontrée dans le chapitre sur les BJTs. Elle donne une courbe en forme de marche, avec une montée rapide suivie d'un plateau.

 

Ces deux équations doivent être respectées simultanément, ce qui fait que le point d'intersection des deux courbes donne les valeurs exactes de IC et VCE.

 
Graphique IC-VCE pour un BJT polarisé.

Le circuit précédent a quelques qualités, mais aussi quelques défauts qui ne se voient pas au premier abord. Au niveau des qualités, il utilise peu de composants (quelques résistances) et est très simple à fabriquer. On peut configurer la tension de polarisation facilement en réglant les valeurs des résistances. Mais les défauts sont nombreux. En premier lieu, le courant de collecteur est assez instable et varie assez fortement avec la température, ce qui se répercute sur la tension de polarisation. Ensuite, le moindre changement dans la tension VBE entraine des variations dans le courant de collecteur, ce qui pose problème quand on veut utiliser VBE comme tension d'entrée dans un amplificateur. Enfin, le béta varie pas mal selon le transistor : changez-le par un autre de même modèle, mais d'une série différente, et le bêta sera totalement différent. Bref, ce montage n'est presque jamais utilisé tel quel, sans optimisations destinée à régler ces problèmes.

La polarisation à biais fixe, avec résistance d'émetteur

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Pour résoudre les problèmes du montage précédent, il est possible d'ajouter une résistance entre l'émetteur et la masse. Le circuit obtenu est illustré ci-dessous. Le fonctionnement du montage n'est pas beaucoup changé et les équations ressemblent beaucoup à celles du montage précédent.

 
Polarisation à biais fixe, avec résistance d'émetteur.
 
Polarisation à biais fixe, avec résistance d'émetteur et condensateurs de découplage.

L'application de la loi des mailles dans le premier chemin donne cette équation.

 

Sachant qu'on a  , on a :

 

La loi des mailles dans l'autre boucle donne ceci :

 

En injectant   et en faisant quelques modifications, on trouve :

 

Et donc, on peut trouver le IC qui correspond en multipliant par le bêta.

 

Si on choisit les résistances tel que  , on obtient l'équation suivante :

 

Le courant de collecteur devient donc assez insensible au bêta. Le résultat est que le circuit est plus stable : la tension de polarisation change un peu moins suite à une variation de température, un changement de VBE ou toute autre modification.

Si on trace les deux équations obtenues sur un graphe IC-VCE, on trouve à peu-près la même chose que pour le circuit précédent. L'équation   donne une droite décroissante, alors que l'autre donne une courbe croissante en forme de marche "logarithmique". La différence est que la droite est plus pentue, et que la marche est un peu plus pentue.

La polarisation à pont diviseur

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Le montage à pont diviseur est une amélioration du montage précédent, auquel on a rajouté une résistance entre la base et la masse. Son nom vient du fait que la tension sur la base est établie par un pont diviseur. Son avantage est que la tension de polarisation est encore plus indépendante du bêta et que le circuit est bien plus stable que les précédents.

 
Polarisation à pont diviseur, avec résistance d'émetteur.
 
Polarisation à pont diviseur, avec résistance d'émetteur et condensateurs de découplage.