Technologie/Éléments théoriques et pratiques/Théorie des mécanismes/Petits et grands problèmes de traitement des informations

Un petit jeu édifiant

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Nous vous proposons pour commencer de trouver les âges de trois frères (on suppose que ce sont des nom­bres entiers), sachant que :

  1. le produit des âges vaut 36,
  2. si l'on vous donnait seulement le pro­­duit et la somme des âges, cela ne vous suffirait pas pour les trouver,
  3. l'aîné joue aux billes.

LA solution est un unique en­sem­ble de trois nombres qui ne sau­rait échapper bien longtemps à votre sagacité.

Votre proposition :

A =
B =
C =

Pas évident ? Il n'y a pourtant aucun piège et nous n'allons évidemment pas vous donner la solution tout de suite. Entre deux séquences de réflexion, notez bien qua­tre « détails » :

  1. Le nombre des données est égal à ce­lui des inconnues. Ce problème est en quel­que sorte « carré ». De plus, les valeurs des trois incon­nues sont déterminées et les trois don­nées, indis­pensables. Nous pouvons dire, d'une certaine façon, qu'il s'agit d'un problème de rang 3.
  2. Si l'on vous demande de trouver, en plus des âges, le montant des sommes « disparues » dans le labyrinthe des circuits financiers lors de la grande « crise » de 2008 et le nombre des bénéficiaires de cette gigantesque arnaque, vous n'y arriverez pas. À moins, bien sûr, que votre service d'espionnage personnel ne vous fournisse les données ad hoc, mais cela sort du cadre de cet exposé. Toutefois, l'absence de réponse à ces deux questions supplémentaires ne vous em­pê­chera nullement de découvrir les âges. Ces derniers restent déter­minés par le sys­tème mais les deux nouvelles in­con­nues, en revan­che, sont indéterminées.
  3. Si nous ajoutons d'autres données, telles que « il y a deux jumeaux » ou « en général la somme et le produit des âges suffisent pour résoudre le pro­blème », ou encore « celui qui écrit ces lignes chausse du 42 », cela ne vous gênera pas. Ces nou­velles don­nées sont compa­tibles avec les anciennes car elles les répètent sous une autre forme ou elles ne les contredi­sent pas. En revanche, si nous ajoutons « la somme des âges vaut 97 », ou encore « les trois frères sont des triplés », le problème n'a plus de solution car chacune de ces nouvelles don­nées est incompatible avec l'ensemble des trois premières.

Encore un effort ! Avez-vous trouvé les valeurs de A, B, et C ? Non ? Essayez encore ! Comme dirait le contrepéteur fou : les chiffres vous bassinent ? Raison de plus pour renouer avec ce jeu !

 

Bon, nous n'allons pas vous laisser sécher indéfiniment : écrivez donc tous les produits de 3 nombres dont le résultat est 36, et faites toutes les sommes correspondantes. Si maintenant vous ne voyez pas, alors votre cas est grave, mais peut-être pas entièrement désespéré.

Des erreurs classiques

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Chers lecteurs ! Si, à l'occasion d'un problème de statique, vous obtenez un système tel que le nombre des incon­nues n'est pas égal à celui des équa­tions, vous êtes peut-être dans le vrai (nous ver­rons cela plus loin). Mais comme tous vos professeurs ne sont pas de dangereux sadiques, vérifiez tout de même que vous n'avez commis aucune de ces trois erreurs classiques :

  • introduire une ou plu­sieurs inconnues imagi­naires,
  • oublier de prendre en compte certaines don­nées,
  • écrire une ou plusieurs équations inutiles.

Vous avez autant d'inconnues que d'équa­tions ? Vous avez tout vérifié ? Pour autant, vous n'êtes hélas pas à l'abri d'autres erreurs ou de dif­ficultés imprévues !

Trop souvent, oubli­ant les métho­des simples et parfois le bon sens le plus élémentaire, vous pataugez dans des cal­culs aussi complexes qu'inutiles. Ou bien, vous obtenez les bonnes équations mais vous ne savez pas les uti­li­ser. Ou encore, vous entre­pre­nez la résolu­tion d'un système avant de l'avoir com­plè­tement écrit. Ne riez pas, aucune ressemblance avec des personnages vivants ou ayant vécu n'est imaginaire.

Beaucoup de problè­mes de sta­tique ou de cinématique ont pour épilogue la résolution d'un sys­tème d'équations li­néai­res. Ce très important chapitre des ma­thé­matiques vous sera vraisembla­blement ensei­gné ... trop tard ! Remettons donc, pour une fois, les bœufs devant la charrue.

ATTENTION ! ce qui suit risque de vous inquiéter car vous n'en verrez pas tout de suite l'intérêt ...

 


Quelques révisions

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En fait, vous n'êtes probablement pas tota­lement ignares en matière d'équations linéaires. Le saviez-vous ? Vous possédez même un bon nom­­bre de prérequis ! C'est ainsi que cer­tains pédants nomment ce qui devrait être, et qui est par bonheur assez souvent, votre bagage intellectuel. Dans la Grèce antique, les prére­quis n'étaient pas encore à la mode mais on déplorait déjà la baisse du niveau des jeunes. Les pédagogues étaient les escla­ves chargés de conduire les enfants à l'école.

Venez donc avec nous ! Vous allez bientôt poser un regard neuf sur bien des choses. Exercez à fond votre curiosité, car elle est une des qua­lités de base de tout techni­cien digne de ce nom, en particulier dans le domaine de la mécanique.

C'est parti ? Pour commencer, re­trou­vez donc pour quel­ques minu­tes l'heu­reux temps de vos culot­tes courtes ! Vous séchiez alors sur la plus simple des équa­tions liné­aires :

 



À gauche du signe « égale » le pre­mier mem­bre contient l'in­­connue   et son coefficient  , à droite, le second mem­bre con­tient une constante .

Comment trouver   ? Bien sûr, cela dépend de la valeur du coefficient  .

  • si   n'est pas nul, l'équation ad­met une solution uni­que  , quelle que soit la valeur de  .
  • si   est nul, alors il faut voir de plus près la valeur de   :
. si   est nul, l'équa­tion de­vient   et   est indéterminé.
. si   n'est pas nul, alors l'équation est im­pos­sible et bien sûr aucune valeur de x ne peut convenir.


L'équation détermine la va­leur de l'inconnue si le coef­ficient   n'est pas nul.

Nous dirons donc à juste titre que ce coefficient est le DÉTERMINANT de l'équa­tion. Retenez bien cette notion car elle est fondamentale.

Matrices, séquence « vocabulaire »

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Une matrice n'est jamais qu'un tableau rectan­gulaire conte­nant, entre des crochets ou des paren­thèses, des éléments rangés en lignes et en colonnes.

La matrice la plus simple ne pos­sède qu'un élément :

 

On peut, dans certaines conditions, la confondre avec le scalaire a.


Une (p,n) matrice com­por­te p lignes et n colonnes :

 

Ses dimensions sont p et n, elle contient en tout p × n éléments.


Pour alléger l'écriture, on utilise souvent une notation indicielle :

 


Gare à l'ordre des indi­ces ! Sou­venez-vous de LICOL ! D'abord ligne, puis colonne. Nous vous en reparlerons plus tard.

Si p et n sont différents, la matrice est rectangulaire. S'ils sont égaux, elle est bien sûr carrée, et on la dira d'ordre n.

Voici deux cas particu­liers, une matri­ce-colonne :

 

et une matrice-ligne :

 


En supprimant un certain nom­bre de lignes et/ou de colon­nes on obtient un tableau plus petit ou sous-matrice.

Matrices, cas particuliers

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Tant que nous sommes sur ce sujet voici, à titre de simple information pour l'instant, quelques autres définitions :

Deux matrices A et B sont dites transposées si  

On écrit alors que B = Ã (à lire A tildé) :

 

La transposée d'une (p,n) matrice est bien sûr une (n,p) matrice.


La transposée d'une matrice carrée d'ordre n est également une matrice carrée d'ordre n. La diagonale principale qui va du coin supérieur gauche vers le coin infé­rieur droit reste inchangée :

 


Une matrice symétrique est égale à sa transposée, les éléments étant symétri­ques par rapport à la diagonale principale :

 

Déterminants, notion de rang

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Un déterminant s'écrit sous la for­me d'un tableau carré mis entre des barres. Contrairement à une matrice, il se réduit toujours à un nombre algébrique. Nous ver­rons plus loin les méthodes de calcul ad hoc.

 

Le déterminant le plus simple ne contient qu'un seul nombre. Attention ! Il ne s'agit pas ici d'une valeur absolue !

 


Reprenons maintenant l'exemple de notre équa­tion  . À titre indicatif (on n'a nul besoin ici d'un tel arsenal), les matrices du coefficient de l'in­connue dans l'équation et du second membre s'écrivent :

 


  • Si a n'est pas nul, nous pouvons calculer à partir de l'uni­que élément de la matrice [a] un déterminant ­|a| différent de zéro. Par sa dimension, ou son ordre, |a| est le plus « grand » déterminant non nul calculable à partir des éléments de la ma­trice du premier membre. On l'appelle détermi­nant princi­pal. L'équa­tion et l'in­con­­nue, qui ont un coeffi­cient dans ce déterminant principal, sont appelées équa­tion prin­ci­pale et inconnue princi­pale. Notre « système » d'une équa­tion à une incon­nue est de rang 1.
  • Si a est nul, le « système » est de rang 0. Si b n'est pas nul, il y a impossibilité, si b est nul, il y a indétermination et si nous comptions trouver la valeur de x nous ne pouvons qu'être déçus.


Vous ne vous y retrouvez pas bien pour l'instant ? C'est nor­mal. Laissez faire le temps, et surtout faites des exercices !!!

La notion de rang d'un système d'équations est très géné­rale et très importante. Elle carac­térise en quel­que sorte la « ca­pa­cité de trans­fert » d'un « système d'information ». Un rang égal à trois (par exemple) signifie qu'on se sert de trois informations indépendantes pour ob­tenir trois réponses indé­pen­dantes. Rap­pe­lez-vous notre petit problème.

Notre équation à une incon­nue est de rang un si le déterminant |a| tiré de la matrice [a] n'est pas nul : une infor­mation exprimée par une équation fournit alors une réponse. Si ce déterminant est nul le rang l'est aussi, l'équa­tion n'est plus prin­cipale, l'incon­nue non plus, le « système » ne fournit plus aucune information perti­nente.

Généralisation

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Cette notion est-elle géné­ralisable ? That is the question ! La réponse est OUI. Les mathé­maticiens vous le démontreront peut-être plus tard, pour l'instant vous pou­vez l'admettre.

Étudions maintenant, avec cet outil provisoirement mal adapté, l'équation :

 

Les matrices associées au premier et au second membre sont :sont :

 

C'est la première qui nous intéresse pour l'instant.

  • Si a et b sont différents de zéro, alors nous pouvons en tirer non plus un, mais deux déterminants d'ordre un non nuls :
 

L'un ou l'autre peut être choisi comme déterminant principal et l'équa­tion est bien sûr toujours principale. Si nous retenons par exemple la « candida­ture » de |a|, alors l'in­connue principale x devient une fonction de l'inconnue non principale y, que nous pouvons alors considérer comme un simple paramètre à transférer dans le second membre :

 

Il en résulte évidemment une équation à une inconnue ; nous ne pouvons pas obtenir le beurre et l'argent du beurre, autrement dit trouver les valeurs de deux inconnues pour le prix d'une seule ! Si par exemple x et y représentent deux forces dont l'une peut être mesu­rée, l'autre s'en déduira. Il n'y a qu'une seule inconnue indé­terminée.

  • Si un des coefficients a et b est nul, la matrice associée au premier membre s'écrit par exemple :
 

Le déterminant principal n'est autre que |a| et l'équation devient :

 

Le rang est toujours 1, x est l'incon­nue principale et y l'inconnue non principale, aussi peu déterminée par l'équa­tion que la hauteur des talonnettes présidentielles ou la couleur de vos jolis yeux...

  • Si a et b sont tous les deux nuls, la matrice du pre­mier membre s'écrit alors :
 

Le rang du système est nul, il n'y a plus ni déterminant principal, ni équation principale, ni inconnue principale et la situa­tion est bien connue :

- si c est nul, les in­con­nues sont toutes deux indéterminées,
- sinon, il y a impossibilité.

On passe aux systèmes

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Et si j'ai maintenant deux équa­tions à une inconnue ?

 



En travaux 

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Le texte ci-dessous est récupéré sous forme brute depuis un polycopié de l'auteur, il est inutilisable tel quel.


A ce système j'associe les matrices-colonnes des deux membres :

µ §

Le système est de rang 1 si l'un au moins des déterminants d'ordre 1 que je peux "extraire" de la matrice n'est pas nul :

| a | ou | a' |

l Si aucun de ces déter­minants n'est nul je peux consi­dérer l'une ou l'autre des équa­tions comme principale : - ou bien le système "radote", les deux équations donnent la même valeur de x, il y a simple redon­dance, - ou bien j'ai deux valeurs distinctes de x et le sys­tème, noyé dans ses contra­dictions, est impossible.

Existerait-il par hasard une valeur qui pourrait servir de test ? Si le système radote, il doit me donner deux fois la même valeur de x :

(1) à x = b / a (2) à x = b' / a'

Ce sera le cas si µ §

ou encore a b' - a' b = 0

Je reconnais ici la tech­nique de calcul appelée "pro­duit en croixEX "produit en croix"§". Bon sang mais c'est bien sûr ! Si ça n'est pas un déter­minant d'ordre 2, alors c'est bien imité :

µ §


& ? Cette quantité DOIT être nulle pour que le système ait une solution. C'est un déterminant caractéristiqueEX "déterminant caractéristique"§.

Pour l'équation à une inconnue, ce déterminant n'était autre que | b | = b. Sa devait en effet être nulle pour que l'équation soit possible.

Comment cons­truire le déterminant caractéristique de notre système de deux équations à une inconnue ? Je pars du déterminant principal :

µ §

Je le "borde" en-dessous par la ligne des coefficients des inconnues princi­pales (il n'y en a qu'une ici) dans l'équation non principale dont je dois vérifier la com­pa­tibilité : µ §

Je "borde" le résultat , à droite, par la colonne des seconds membres :

µ §

Au passage, je viens de vous rappe­ler comment on calcule les déterminants d'ordre 2. Pour chaque équation du même type que je pourrais avoir en plus je devrais naturellement écrire un autre déter­minant carac­té­risti­que. En effet, à partir du moment où j'ai utilisé une équa­tion pour obtenir une valeur de x, toute donnée supplémentaire peut se révé­ler incompatible avec les autres et je dois vérifier indivi­duellement que ce n'est pas le cas.

l Si un seul des deux déterminants est différent de zéro, par exemple | a |, la matrice associée au premier membre prend la forme : µ §

Comme précédemment, le détermi­nant caractéris­ti­que doit être nul :

µ §

b' doit être nul puisque a ne l'est pas. Sinon, le sys­tème serait impossible.

l Si les deux déterminants sont simultanément nuls, le rang est nul. On n'a pas besoin de tout écrire pour affirmer que : - si b ET b' ne sont pas tous deux nuls, le sys­tème est impossible. - si b ET b' sont tous deux nuls, x ne figure même pas dans le système dont les deux équations sont identiquement nulles. L'in­con­nue peut prendre n'im­porte quelle valeur, elle est indéterminée.


Mais quel rapport tout cela peut-il avoir avec la mé­canique ? ? ? ? ? Patience ! Conso­lez-vous en vous disant que pour l'étude d'un système méca­nique composé de cinq pièces en équilibre dans l'espace vous devrez écrire au moins TRENTE EQUATIONS et bien sûr un nombre d'inconnues en rapport ...