Théorie quantique de l'observation/Exemples de mesures

L'observation des superpositions quantiques avec l'interféromètre de Mach-Zehnder modifier

 
L'interféromètre de Mach-Zehnder

Cette expérience classique est l'une des plus simples qui permette d'observer réellement des superpositions quantiques.

Un faisceau de lumière rencontre une première lame séparatrice équilibrée qui le sépare en un faisceau transmis et un faisceau réfléchi. Sur les trajectoires de ces deux faisceaux on place des miroirs afin de les faire se rencontrer sur une deuxième lame séparatrice. Sur les trajectoires des faisceaux transmis et réfléchis par cette deuxième lame, on place des détecteurs de photons.

Un modèle très simplifié d'une lame séparatrice consiste à attribuer au photon incident deux état quantiques   et   qui correspondent aux deux directions perpendiculaires selon lesquelles il peut rencontrer la lame. S'il est transmis, il conserve sa direction et reste dans le même état. S'il est est réfléchi il bascule dans l'autre état. C'est très simplifié évidemment, mais cela suffit pour rendre compte de l'expérience.

Avec cette simplification, une lame séparatrice équilibrée peut être décrite par une porte d'Hadamard. C'est une porte à un qubit définie par :

 

 

Entre les deux lames l'évolution du photon est décrite par un simple décalage de phase, qui dépend de la longueur du chemin suivi :

 

 

La propagation du photon dans l'interféromètre est donc décrite par l'opérateur :

 

Si   est l'état initial du photon son état à la sortie de la deuxième lame est :

 

Si   et   ne différent que d'un multiple de   le chemin de sortie d'un photon est toujours le même. On peut donc prédire avec certitude quel détecteur il rencontrera. Cette conclusion est surprenante parce qu'elle nous oblige à supposer qu'un photon emprunte en même temps les deux chemins intermédiaires entre les deux lames. S'il n'empruntait qu'un seul de ces chemins on ne pourrait pas prédire son chemin de sortie.

Un détecteur précédé d'une lame séparatrice est donc capable de détecter une superposition quantique. Dans l'expérience de Mach-Zehnder, l'un des détecteurs détecte les photons dont l'état intermédiaire est  , l'autre détecte les photons dont l'état intermédiaire est  . Une telle détection n'est pas une mesure idéale parce que le photon est détruit lorsqu'il est détecté.

Dans l'interféromètre de Mach-Zehnder, la première lame séparatrice prépare un photon dans une superposition quantique non-localisée, la seconde lame suivie d'un détecteur nous permet d'observer cette superposition.

Lorsque les chemins optiques optiques sont égaux, on peut ignorer l'effet de   :

 

Que la porte d'Hadamard est son propre inverse résume le principe de l'interférométrie Mach-Zehnder.

Une mesure idéale : la porte CNOT modifier

La porte CNOT est une porte quantique (Nielsen & Chuang 2010) à deux qubits déterminée par l'opérateur d'évolution suivant :

 

 

 

 

Le changement d'état du second qubit est contrôlé par l'état du premier. C'est pourquoi on les appelle qubit cible et qubit de contrôle.

  est une écriture abrégée de  .

Si l'état initial du qubit cible est   ou   (mais pas une superposition des deux) alors la porte CNOT réalise une mesure idéale du qubit de contrôle par le qubit cible. Le qubit cible d'une porte CNOT est l'exemple le plus simple de détecteur quantique. Les états-pointeurs sont les états   et   du qubit cible. Les résultats de mesure sont   et  . Si l'état initial du détecteur est   alors l'état propre du qubit détecté associé au résultat   est  .

Une mesure non-idéale : la porte SWAP modifier

La porte SWAP est une porte quantique à deux qubits déterminée par l'opérateur d'évolution suivant :

 

 

 

 

Chaque qubit passe dans l'état de l'autre. Chacun est donc sensible à l'autre. C'est pourquoi on peut interpréter la porte SWAP comme une mesure quantique d'un qubit par l'autre. Par exemple le second qubit peut être interprété comme un détecteur pour lequel on a choisi l'état initial   et les états pointeurs   et  . Les résultats de mesure sont   et   qui ont respectivement pour états propres les états   et   du premier qubit. Si l'état initial de ce qubit est  , l'état final après la mesure est :

 

La porte SWAP n'est pas une mesure idéale, parce que l'un des états propres du système observé est perturbé par la mesure.

Une réalisation expérimentale des portes quantiques modifier

L'interaction d'un atome avec une cavité nous permet de construire des portes quantiques.

On peut faire un qubit avec un atome. L'état   est par exemple un état  , fondamental ou excité, l'état   un autre état excité  . De même une cavité peut servir de qubit. L'état   est son état vide de photons, l'état   celui où elle contient un seul photon. Si l'atome passe par la cavité d'une façon telle qu'ils échangent leur énergie, on peut obtenir l'interaction suivante (Haroche & Raimond, 2006, p.282) :

 

 

 

 

Ce n'est pas la porte SWAP mais elle lui ressemble. On obtient par exemple :

 

 

L'échange d'énergie peut aussi conduire à un changement d'état :

 

 


En modifiant les paramètres de l'expérience, et avec un autre état excité   de l'atome, on peut aussi s'arranger pour que le passage de l'atome par la cavité soit décrit par (pp.320-322):

 

 

 

 

Si on redéfinit les états   et   par :

 

 

alors l'opérateur   ci-dessus détermine une porte CNOT, où la cavité est le qubit de contrôle et l'atome le qubit cible. De cette façon on est capable de détecter un photon sans le détruire.