« Introduction à la sociologie/L'évolution de la pensée sociologique/L'histoire des idées sociologiques. La période classique de Comte à Weber » : différence entre les versions

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Mais au final, la pensée de Proudhon n'aura somme toute qu'un impact assez faible sur la pensée sociale européenne, et qui plus est, limité à des domaines bien précis. En revanche le courant théorique issu de la pensée de Karl Marx va avoir une influence considérable dans l'histoire de la pensée occidentale. Tous les domaines des sciences sociales sont concernés par la pensée marxiste, en particulier les sciences politiques, les sciences économiques, l'histoire et la sociologie. Il faut dire que Marx a tenté de réaliser l'une des synthèses les plus ambitieuses de la pensée européenne, en englobant une large gamme de courants de pensée : l'économie politique anglaise et française, le positivisme, le socialisme français, la philosophie historique allemande, la philosophie hégelienne, etc. Conséquence fâcheuse, sa philosophie sociale en est devenue plus ou moins hermétique, à tel point qu'il est devenu vain de chercher à l'appréhender par une lecture superficielle. Qui plus est, la complexité de sa pensée et son inconstance, rendent possible plusieurs interprétations concurrentes. La pensée de Marx opère donc une rupture radicale dans la pensée socialiste. L'étude de la société, et l'action qui doit en résulter deviennent une affaire de scientifiques, et par là même, elles se coupent de leur base sociale. Ce qui contraint à engager des actions politiques dont la finalité peut être en adéquation avec la théorie marxiste mais sans qu'on puisse les rattacher avec la totalité de la théorie, puisque pour intégrer celle-ci, il faut faire preuve d'une grande érudition et d'une certaine ténacité. Paradoxalement, Marx fait donc de la science sociale une science élitiste (bien qu'il militera activement). Autant, durant les lumières, l'élitisme de la réflexion sociale était essentiellement le fait des conditions matérielles particulières qui pouvaient régner durant cette période et qui ne laissaient la parole qu'aux plus favorisés, autant avec Marx, cet élitisme trouve une justification théorique. Par conséquent, Marx inaugure le savant mariage entre la doctrine, l'idéologie ou la science sociale, et le pouvoir politique. Car les seuls qui peuvent prétendre à modifier la société sont ceux qui en connaissent les rouages, et qui vont oeuvrer pour son bien. Le peuple se trouve donc dépossédé, comme dans le taylorisme, de sa capacité à gérer la société ou la production économique, sa compétence se trouve remise en cause par sa méconnaissance des vrais mécanismes sociaux qui créent les lois sociales. En quelque sorte, il doit renoncer à la compréhension et à l'organisation de la société qu'il laisse aux scientifiques, en échange de quoi, il peut aspirer à un monde plus juste où il ne subirait plus l'aliénation (concept qui exprime le fait que le travailleur est étranger du produit de son travail qui est saisi par l'employeur. Le travail devient alors un carcan pour l'ouvrier).
Marx appuie sa théorie sur une méthode, le matérialisme dialectique, qu'il tire de la philosophie hégelienne. Ses principaux points sont <ref>Cette partie a été approfondie et améliorée dans l'article [http://fr.wikipedia.org/wiki/Marxisme_%C3%A9conomique marxisme économique].</ref> :
''Le matérialisme historique''. Les hommes font leur propre histoire, mais sur la base de conditions données, héritées du passé. Parmi celles-ci, les conditions de la reproduction matérielle de la société sont déterminantes en première instance. L'Histoire n'est donc pas déterministe, les hommes se font eux-même en même temps qu'ils agissent. D'autre part, l'histoire humaine ne suit pas comme dans le positivisme comtien un déroulement linéaire vers le progrès. S'inspirant de Hegel, Marx considère que le devenir de toute réalité se comprend dans la triade suivante : l'affirmation (la thèse), la négation (l'antithèse), et la négation de la négation (la synthèse). Mais si pour Hegel, cette évolution se déduit de la nature de l'Esprit, pour Marx, elle doit s'inscrire dans le matérialisme dialectique. Aussi est-il amené à penser que les conditions économiques détermine l'anatomie d'une société. Mieux, la conscience des hommes ne détermine pas la réalité, c'est la réalité sociale qui détermine leur conscience. D'une certaine manière, on retrouve dans une version élargie l'idée de Comte, selon laquelle l'Esprit est déterminé par des conditions historiques et sociales. Mais Marx complexifie cette idée, et lui confère une base scientifique, c'est à dire qu'il rattache la conscience à un mode de production, ensemble composé d'une infrastructure (nature des forces productives comme les outils et le travail, et rapports techniques et sociaux de travail) et de la superstucture (religion, famille, Droit, morale, science, ...) Partant de là, l'évolution de la pensée humaine suit une course dialectique, elle voit se succéder des modes de productions (féodalisme, esclavagisme, bourgeoisie, ...) qui se succèdent en fonction des contradictions entre les institutions et les forces productives (c'est le matérialisme historique). À terme, ces contradictions doivent se réconcilier dans une synthèse : le communisme.