« Philosophie/Thalès de Milet/L'École milésienne » : différence entre les versions
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=== I. Milet et la Lydie. ===
C'est à Milet que la plus ancienne école de cosmologie scientifique eut son siège.
[39] II faut ajouter que l'alliance avec la Lydie facilita grandement les relations avec Babylone et
=== II. Son origine ===
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=== III. L’éclipse prédite par Thalès ===
L'indication de beaucoup la plus remarquable qu'Hérodote nous donne sur Thalès est qu'il prédit l'éclipse de soleil qui mit fin à la guerre entre les Lydiens et les Mèdes3. Or nous pouvons être sûrs qu'il ignorait tout à fait la vraie cause des éclipses. Anaximandre et ses successeurs l'ignoraient certainement4, et il est incroyable que l'explication juste de ce phénomène ait été donnée une fois pour être si vite oubliée. Même en supposant, toutefois, que Thalès ait connu la cause des éclipses, personne ne croira que les bribes de géométrie élémentaire qu'il avait rapportées
Il est parfaitement possible de prédire des éclipses sans en connaître la vraie cause, et il est hors de doute qu'en réalité c'est ce que faisaient les Babyloniens. Sur la base de leurs observations astronomiques, ils avaient établi un cycle de 223 mois lunaires, à l'intérieur duquel les éclipses de soleil et de lune revenaient à intervalles réguliers 2. Cela, il est vrai, ne les eût pas mis en état de prédire les éclipses de soleil pour un lieu donné de la surface de la terre ; car ces phénomènes ne sont pas visibles dans tous les lieux où le soleil est, à ce moment, au-dessus de l'horizon. Nous n'occupons pas un point au centre de la terre, et ce que les astronomes appellent la parallaxe géocentrique doit être pris en considération. Tout ce qu'il était donc possible de dire, au moyen du cycle, c'est qu'une éclipse de soleil serait visible quelque part, et qu'il valait la peine d'observer le [42]ciel. Or, si nous en pouvons juger d'après le rapport qui nous a été conservé d'un astronome chaldéen, c'était justement là la situation dans laquelle se trouvaient les Babyloniens. Ils guettaient les éclipses aux dates déterminées, et quand elles ne se produisaient pas, le fait était interprété comme un heureux présage1. Il n'en faut pas davantage pour expliquer ce que l’on nous rapporte de Thalès. Il dit simplement qu'il y aurait une éclipse, et, par un heureux hasard, elle fut visible en Asie-Mineure et dans une circonstance frappante.
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La prédiction de l'éclipse ne jette donc pas une grande lumière sur les connaissances scientifiques de Thalès ; mais si nous pouvons en fixer la date, elle nous fournira un point de départ pour essayer de déterminer l'époque à laquelle il vivait. Les astronomes modernes ont calculé qu'il y eut une éclipse de soleil, probablement visible en Asie-Mineure, le 28 mai (vieux style) de l'an 585 av. J.-C.2, et Pline, d'autre part, place l'éclipse prédite par Thalès à la quatrième année de la 48e Olympiade (585-4 av. J.-C.3). La concordance n'est, il est vrai, pas parfaitement exacte, car mai 585 appartient à l'année 586-5. Elle est suffisamment approximative, toutefois, pour que nous ayons le [43]droit d'identifier cette éclipse avec celle de Thalès, et cela nous est confirmé par Apollodore, qui fixait à la même année l’akmè du philosophe1. Une autre indication, que nous devons à Démétrius de Phalère, et suivant laquelle Thalès «reçut le nom de Sage» sous l'archontat de Damasias à Athènes, s'accorde très bien avec toutes ces données, et elle est sans doute basée sur l'histoire du trépied de Delphes, car l'archontat de Damasias est l'ère du rétablissement des jeux pythiques 2.
=== V. Thalès en
L'introduction de la géométrie égyptienne en Grèce est universellement attribuée à Thalès, et il est extrêmement probable qu'il visita
=== VI. Thalès et la géométrie ===
Quant à la nature et à l'étendue des connaissances mathématiques rapportées
=== VII. Thalès comme homme politique ===
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=== IX. Exposé conjectural de la cosmologie de
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Aristote et Théophraste, suivis de Simplicius et des doxographes, suggèrent plusieurs explications de cette réponse. Ces explications, Aristote les donne comme conjecturales ; seuls, les écrivains postérieurs les reproduisent comme tout à fait certaines1. Le plus probable semble être qu'Aristote attribua simplement à Thalès les arguments dont se servit plus tard Hippon de Samos pour défendre une thèse analogue2. Ainsi s'expliquerait leur caractère physiologique. Le développement de la médecine scientifique avait rendu les arguments biologiques très populaires au Ve siècle ; mais, à l'époque de Thalès, ce à quoi l'on s'intéressait surtout, ce n'était pas la physiologie, mais bien plutôt ce que nous appellerions la météorologie, et c'est par conséquent de ce point de vue que nous devons essayer de comprendre la théorie.
Or, il n'est pas très difficile de se rendre compte comment [50] des considérations de nature météorologique conduisirent Thalès à adopter l'opinion qu'il soutint. De toutes les choses que nous connaissons, c'est l'eau qui paraît prendre les formes les plus variées. Elle nous est familière à l'état solide, à l'état liquide et à l'état de vapeur, de sorte que Thalès peut fort bien s'être imaginé voir se dérouler devant ses yeux le processus du monde, partant de l'eau pour revenir à l'eau. Le phénomène de l'évaporation éveille naturellement partout l'idée que le feu des corps célestes est entretenu par l'humidité qu'ils tirent de la mer. Même de nos jours, quand les rayons du soleil deviennent visibles, les gens des campagnes disent que «le soleil pompe l'eau». L'eau retombe sur la terre sous forme de pluie, et finalement, à ce que pensaient les premiers cosmologues elle se transforme en terre. Cela nous paraît étrange, mais peut avoir paru plus naturel à des hommes familiers avec le fleuve
=== XI. Théologie ===
De l'avis d'Aristote lui-même, la troisième des propositions énoncées plus haut implique que Thalès croyait à une « âme du monde », mais le Stagirite a bien soin de faire [51]remarquer que ce n'est là qu'une inférence1. La doctrine de l'âme du monde est ensuite attribuée à Thalès d'une manière tout à fait positive par Aétius ; celui-ci l'exprime1 dans la phraséologie stoïcienne qu'il trouva dans sa source immédiate, et identifie le monde-intellect avec Dieu2. Cicéron trouva un exposé analogue de la question dans le manuel épicurien dont il se servait, mais il fait un pas de plus.
Nous ne devons pas attacher trop d'importance non plus à cette déclaration que « toutes choses sont pleines de dieux». On l'interprète souvent en ce sens que Thalès attribuait une «vie plastique» à la matière, ou qu'il était «hylozoïste». Nous avons déjà vu à quels malentendus cette manière de parler pouvait prêter4, et nous ferons bien de l'éviter. Il serait dangereux de considérer un apophtegme de ce genre comme preuve de quoi que ce soit ; il y a des chances pour que Thalès l’ait prononcé en sa qualité de [52]« Sage » plutôt qu'en sa qualité de fondateur de l'école milésienne. D'ailleurs, des maximes comme celle-là sont la plupart du temps anonymes au début, et sont attribuées tantôt à un Sage, tantôt à l'autre1. D'autre part, Thalès a très probablement dit que l'aimant et l'ambre avaient des âmes. Ce n'est pas là un
Thalès est allé à l'école milésienne
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1 Herod. I, 29. Quelques autres points peuvent être relevés en confirmation de ce qui a été dit de 1' «hellénisme» des Mermnades. Alyatte eut deux femmes, dont l'une, la mère de Crésus, était Carienne ; l'autre était Ionienne, et il eut d'elle un fils qui reçut le nom grec de Pantaléon (ib. 92). Les offrandes de Gygès étaient exposées dans le trésor de Kypsélos à Delphes (ib. 14) et celles d'Atyatte étaient une des curiosités de la ville (ib. 25). Crésus, lui aussi, fit preuve d'une grande libéralité envers Delphes (ib. 50) et envers plusieurs autres sanctuaires grecs (ib. 92). Il donna la plupart des colonnes du grand temple
2 Herod. I, 75. Il se refuse à le croire parce qu'il avait entendu parler, probablement par les Grecs de Sinope, de la haute antiquité du pont de la route royale entre Ancyre et Pteria (Ramsay, Asia Minor, p. 29). Xanthos rapportait une tradition d'après laquelle ce fut Thalès qui engagea Crésus à monter sur son bûcher seulement quand il sut qu'une averse arrivait.
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