« Psychologie cognitive pour l'enseignant/Élaboration : quelques techniques » : différence entre les versions

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==La prise de notes==
 
Aussi bizarre que cela puisse paraitreparaître, la méthode utilisée pour prendre des notes influence l'élaboration du matériel reçu, que ce soit en bien ou en mal. Toutes les prises de notes ne se valent pas. La prise de notes usuelle, qui consiste à recopier ''verbatim'' ce que raconte le professeur, est ainsi peu utile. Il s'agit en effet d'une situation de double tâche où le sujet doit faire deux choses à la fois : écouter et recopier demande d'analyser la forme, pas le fond. Les traitements sur cette forme utilisent des ressources cognitives qui auraient pu servir pour la compréhension. L'élève devant se concentrer sur les aspects orthographiques et phonétiques du discours ne pourra pas traiter en même temps le sens de ce qui est dit.
 
Cela explique que la prise de notes sur ordinateur est moins efficace que la prise de notes manuscrite chez la majorité des élèves. L'ordinateur permet de noter rapidement, ce qui fait que les élèves ont tendance à noter tout ce que raconte le professeur. En comparaison, noter à la main est nettement plus lent, ce qui fait que les élèves ne peuvent noter tout le cours, mais seulement ce qui est important. Ils doivent donc faire un résumé de ce que raconte le professeur, ce qui demande d'analyser ce que le professeur raconte pour en dégager les idées générales et les principes importants. Et cela entraineentraîne de facto une élaboration du matériel écouté. La prise de notes sur ordinateur est donc une prise de notes ''verbatim'', contrairement à la prise de note écrite. Pour éviter les défauts de la recopie manuscrite ''verbatim'', il est possible de prendre des notes sous la forme de cartes mentales ou d'autres supports visuels.
 
==L'interrogation élaborative : l'art de poser les bonnes questions==
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Il y a plusieurs raisons qui font que c'est le cas, mais celles-ci sont assez liées les unes avec les autres. La première, certainement la plus importante, est que l'apprentissage actif impose une charge cognitive plus forte, c'est à dire qu'elle demande à l'élève de maintenir plus d'items dans sa mémoire de travail. Dans le document nommé « Why Minimal Guidance During Instruction Does Not Work: An Analysis of the Failure of Constructivist, Discovery, Problem-Based, Experiential, and Inquiry-Based Teaching », Sweller, Clark et Kirschner prétendent que l'apprentissage basé sur des problèmes serait incompatible avec la limitation de la mémoire de travail, en utilisant des arguments provenant de la théorie de la charge cognitive.
 
Ensuite, l'apprentissage par découverte ne convient pas du tout à des élèves novices, du fait de leur manque de connaissances antérieures. C'est ce qui fait qu'une grande majorité d'élève n'arrive tout simplement pas à découvrir ce qu'il faut par lui-même, et ce d'autant plus quand les tâches données aux élèves sont complexes, difficiles, inadaptées aux élèves. Ce n'est pas pour rien que la majorité des découvertes scientifiques ont mis des années ou des siècles à être découvertes par certains savants. L'intelligence ne fonctionne pas à vide et elle est d'autant plus efficace qu'elle est guidée par un savoir maitrisémaîtrisé. Ce manque de connaissances entraineentraîne de plus une mauvaise utilisation de la mémoire de travail, ce qui est à mettre en lien avec ce qui a été dis au paragraphe précédent.
 
AÀ l'appui de cette affirmation, on peut citer l'expérience réalisée par Tuovinen et Sweller en 1999<ref>A comparison of cognitive load associated with discovery learning and worked examples, Tuovinen et Sweller, 1999.</ref>, dans laquelle quatre groupes sont comparés. L'expérience utilise deux groupes de novices et deux autres composés d'élèves dotés de connaissances antérieures. Dans ces deux groupes, le premier subit un enseignement par découverte (résolution autonome de problèmes), alors que l'autre subit un enseignement instructionniste (à base d'exemples guidés). Le résultat est que le groupe novice qui subit un enseignement par découverte a les pires résultats de tous les groupes, les résultats étant inférieurs à la moitié de la moyenne des trois autres sous-groupes ! Par contre, les étudiants disposant de connaissances antérieures arrivaient à se débrouiller correctement dans la tâche d'enseignement par découverte. En somme, l'enseignement par découverte est utile pour des élèves doués, disposant d'une base solide de connaissances qui leur permettent de faire leurs propres déductions. Mais pour des élèves novices, qui découvrent une matière ou un concept, l'enseignement par découverte est à bannir.
 
Enfin, un dernier défaut est que le professeur a peu d'emprise sur la réflexion des élèves. Un élève libre de réfléchir par lui-même peut parfaitement se perdre dans sa réflexion, suivre de fausses pistes, faire des déductions fausses, et ainsi de suite. L'élève peut parfaitement déduire un grand nombre d'informations fausses ou erronées, qui s'accumulent en mémoire et perturbent les apprentissages futurs par interférence. Alors certes, le professeur peut, dans les pédagogies guidées, corriger ces erreurs, ce qui atténue le problème. Mais encore faut-il que le professeur puisse vérifier la manière dont les élèves ont réfléchi, et quels sont les résultats qu'ils ont obtenus. Ce qui n'est pas possible pour toutes les matières. Pour illustrer ce genre de cas de figure, imaginez un élève disséquer une grenouille sans instructions, de manière totalement libre...
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Des comparaisons expérimentales entre ces deux types de pédagogies par découverte donnent des résultats très nettement en faveur des pédagogies par découverte guidée. Par exemple, les études de Fay et Mayer (1994) et de Lee et Thompson (1997) montrent que les pédagogies par découvertes guidées donnent de meilleurs résultats que les pédagogies par découverte non-guidée pour l'apprentissage de la programmation. Un autre exemple vient de l'étude de l'apprentissage basé sur des problèmes, une forme de pédagogie active. Une revue de la littérature, effectuée par Hattie dans son ouvrage Visible Learning montre que l'apprentissage basé sur des problèmes n'est pas efficace que prévu. L'efficacité est mesurée par ce qu'on appelle une taille d'effet, qui vaut 0.15 dans le cas de l'apprentissage basé sur des problèmes. Un effet inférieur à 0.20 est tellement faible qu'on le considère comme quasiment inefficace.
 
Pour résumer, l'usage d'un minimum de pédagogie active guidée peut être bénéfique dans des situations bien maitriséesmaîtrisées. Mais demander aux élèves de tout redécouvrir par eux-mêmes est une erreur. Rendre les élèves actifs demande de la parcimonie, et une certaine maitrisemaîtrise de sa classe et de la gestion de la séance.
 
==Références==