« Psychologie cognitive pour l'enseignant/Réduire la charge cognitive intrinsèque » : différence entre les versions

Contenu supprimé Contenu ajouté
mAucun résumé des modifications
Ligne 24 :
 
La logique de l'exemple précédent s’applique dans d'autres exemples similaires. Pensez par exemple à la médecine, où il est souvent nécessaire de donner des notions d'anatomie avant de parler de physiologie. Ou encore, prenez le cas d'un professeur de technologie/physique qui veut expliquer le fonctionnement d'une centrale thermique : il gagnera à expliquer ce qu'est une turbine, un condenseur et les autres composants du circuit de production d'électricité, avant de montrer comment ceux-ci interagissent lorsque la centrale fonctionne. Dans ces exemples, il y a une séparation entre le "modèle de composants" qui décrit les parties d'un système, et le "modèle causal/dynamique" qui décrit comment ces éléments interagissent entre eux lorsque le système fonctionne/évolue. Le conseil à tirer des études sur la charge cognitive est le suivant : ''lorsqu'on décrit un système, il vaut mieux d'abord présenter le modèle de composants, avant d'aborder le modèle causal/dynamique (comment le système fonctionne/évolue)''. La raison est que le modèle causal/dynamique est incompréhensible sans le modèle de composants, mais que la réciproque n'est pas vraie. Dans ces conditions, autant factoriser la présentation des parties du système, avant de passer au modèle dynamique.
 
==L'''Isolated/interacting element effect''==
 
La mémoire de travail surcharge facilement lors de l’apprentissage de concepts composés d’un grand nombre de composants/sous-concepts interagissant entre eux. Dans ce cas, la théorie de la charge cognitive recommande d’aborder chacun des composants indépendamment, avant de montrer comment ceux-ci interagissent ensemble. En faisant cela, la charge cognitive sera répartie dans le temps, améliorant l’apprentissage : on parle d’'''effet de l'isolation des éléments'''.
* Premier exemple : les démonstrations qui utilisent des lemmes. Dans certains de mes cours d'université, les professeurs commençaient la démonstration du théorème, et l'interrompait au fil de l'eau pour démontrer les lemmes dont ils avaient besoin. Au lieu de faire cela, ils auraient du démontrer les lemmes avant de commencer la démonstration.
* Autre exemple : si vous voulez expliquer le fonctionnement du circuit anatomique du réflexe du genou, il est préférable de décrire ce circuit, en voyant chaque composant indépendamment, avant de montrer comment ce circuit fonctionne lors de l'exécution du réflexe.
* Autre exemple : vous voulez enseigner comment fonctionne un processeur simple. Celui-ci contient plusieurs composants bien précis : une unité de calcul, un séquenceur, des registres, etc. Certains professeurs commencent directement leur cours par montrer comment une instruction s’exécute sur ce processeur : ils abordent chaque composant au fil de l’eau, quand ils en ont besoin. L'utilisation de l'''isolated element effect'' recommanderait de voir indépendamment chaque composant du processeur un par un, avant de montrer le déroulement de l’exécution d'une instruction avec cet ensemble de composants.
 
==Découper les procédures en sous-procédures==
Ligne 38 ⟶ 31 :
Par exemple, on peut imaginer le cas d'une procédure en 10 étapes, dont les 3 premières sont regroupées dans une sous-procédure, dont le résultat sert de base à la suite. L'étude de Catrambone, datée de 1998, montre les bienfaits qu'il y a a identifier une sous-procédure dans une procédure plus complexe. Son étude portait sur l'enseignement de procédures statistiques bien précises. Elle était basée sur un ensemble d'exemples conceptuellement similaires, mais dont la résolution se faisait un peu différemment à chaque fois. Sans mettre l'accent sur des sous-procédures, les sujets n'arrivaient pas à transférer ce qu'il avaient appris dans un exemple aux autres exemples. Mais ils y arrivaient si l'expérimentateur indiquait quelles étapes de la procédure pouvaient se regrouper. Notons que dans cette étude, les étudiants devaient regrouper par eux-même les étapes de la procédure, ils devaient extraire eux-même la sous-procédure. Mais on peut cependant imaginer le cas où la sous-procédure est enseignée seule, avant d'être utilisée comme étape d'une procédure plus complexe.
 
Sinon, on peut aussi imaginer segmenter une procédure de huit étapes en deux sous-procédures de quatre étapes. Ce faisant, on apprend les quatre étapes de chaque procédures indépendamment, puis on apprend à relier les deux sous-procédures. La charge cognitive est alors répartie dans le temps. La première expérience sur le sujet portait sur l'apprentissage des procédures de sécurité électrique, qui demandent notamment d'utiliser plusieurs instruments comme des voltmètres ou des ampèremètres. Elle était réalisée par Pollock, Chandler, et Sweller en 2002. Les résultats ont clairement montré l'efficacité de ce principe d'isolation. On peut aussi citer l’expérience de Ayres de 2006 sur l'apprentissage de l'algèbre et des développements d'équations, et l'expérience de 2010 de Blayney, Kalyuga, et Sweller, sur l'apprentissage de l'utilisation d'un tableau pour des applications de comptabilité.
 
==Séparer les connaissances théoriques et pratiques==
Ligne 45 ⟶ 38 :
 
Une expérience faites par Kester, Kirschner et van Merriënboer (2006) semble montrer que cette séparation augmentait la compréhension et la mémorisation. Leur étude a montré que, dans le cas qu'ils étudiaient, le séquencement de la théorie avant la pratique ou de la pratique après la théorie marchait mieux qu'une présentation intégrée. L'ordre n'avait pas d'importance dans ce cas précis, peut-être en a-t-il dans d'autres exemples. Le choix dépend surement de l'enseignement en question et il n'y a pas d'ordre parfait, ni même de tendance générale.
 
==L'''Isolated/interacting element effect''==
 
La mémoire de travail surcharge facilement lors de l’apprentissage de concepts composés d’un grand nombre de composants/sous-concepts interagissant entre eux. Dans ce cas, la théorie de la charge cognitive recommande d’aborder chacun des composants indépendamment, avant de montrer comment ceux-ci interagissent ensemble. En faisant cela, la charge cognitive sera répartie dans le temps, améliorant l’apprentissage : on parle d’'''effet de l'isolation des éléments'''.
* Premier exemple : les démonstrations qui utilisent des lemmes. Dans certains de mes cours d'université, les professeurs commençaient la démonstration du théorème, et l'interrompait au fil de l'eau pour démontrer les lemmes dont ils avaient besoin. Au lieu de faire cela, ils auraient du démontrer les lemmes avant de commencer la démonstration.
* Autre exemple : si vous voulez expliquer le fonctionnement du circuit anatomique du réflexe du genou, il est préférable de décrire ce circuit, en voyant chaque composant indépendamment, avant de montrer comment ce circuit fonctionne lors de l'exécution du réflexe.
* Autre exemple : vous voulez enseigner comment fonctionne un processeur simple. Celui-ci contient plusieurs composants bien précis : une unité de calcul, un séquenceur, des registres, etc. Certains professeurs commencent directement leur cours par montrer comment une instruction s’exécute sur ce processeur : ils abordent chaque composant au fil de l’eau, quand ils en ont besoin. L'utilisation de l'''isolated element effect'' recommanderait de voir indépendamment chaque composant du processeur un par un, avant de montrer le déroulement de l’exécution d'une instruction avec cet ensemble de composants.
 
Notons que cet effet marche non seulement pour les connaissances, mais aussi pour les procédures. La première expérience sur le sujet portait sur l'apprentissage des procédures de sécurité électrique, qui demandent notamment d'utiliser plusieurs instruments comme des voltmètres ou des ampèremètres. Elle était réalisée par Pollock, Chandler, et Sweller en 2002. Les résultats ont clairement montré l'efficacité de ce principe d'isolation. On peut aussi citer l’expérience de Ayres de 2006 sur l'apprentissage de l'algèbre et des développements d'équations, et l'expérience de 2010 de Blayney, Kalyuga, et Sweller, sur l'apprentissage de l'utilisation d'un tableur pour des applications de comptabilité.
 
==Références==