« Psychologie cognitive pour l'enseignant/Faire des liens » : différence entre les versions

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Les recherches en compréhension de texte ont montré que l'extraction des idées générales d'un texte est un processus extrêmement important pour la compréhension. On peut le montrer avec quelques expériences assez simples. Une des expériences les plus marquantes à ce sujet fut celle sur « l'effet intégrateur du titre ». Dans celle-ci, l'expérimentateur constitua trois groupes de cobayes qui devaient tous lire un même texte compliqué : un des groupes de cobayes connaissait le titre après avoir lu le texte, tandis que l'autre avait accès au titre avant la lecture. Le groupe qui avait eu accès au titre avant le texte réussissait mieux que l'autre. Cela vient du fait que le titre donne l'idée générale du texte, idée sur laquelle les informations vont venir s'associer progressivement : cela permet de donner du sens au texte et de créer un maximum d'associations. Le fait que le titre doit être placé avant le texte pour avoir un effet le montre : il n'y a pas beaucoup d’associations retardées, à rebours.
 
 
==Les analogies et les métaphores==
 
Il existe un moyen très simple pour connecter un concept à quelque chose de connu : l'usage d''''analogies'''. L'analogie est un processus mental relativement simple, qui consiste à créer des relations entre une situation cible et une relation source. Le cas le plus simple d'analogie correspond à des problèmes du style : « trouver un A qui est à B ce que C est à D ». Ces problèmes se résolvent en plusieurs étapes :
 
* l'encodage sélectif, qui consiste à identifier les propriétés des concepts utiles pour résoudre le problème ;
* l'inférence de la relation entre C et D ;
* la mise en correspondance, la découverte de la relation entre B et D ;
* et enfin l'application, qui consiste à relier A et B par une relation analogue à celle entre C et D.
 
Par exemple, prenons l'analogie suivante : « Freud est à la psychanalyse ce que Mendel est à la génétique ». La première étape consiste à relier Freud avec Mendel, et psychanalyse avec génétique. Ensuite, la deuxième étape consiste à copier la relation entre Freud et psychanalyse sur les éléments qui correspondent, à savoir Mendel et génétique.
 
Les analogies plus complexes sont gérées par un processus identique, mais appliqué à des situations plus complexes. Ces situations sont représentées mentalement par des ensembles d’éléments reliés entre eux par des relations (logiques ou non). L'analogie met en correspondance chaque élément ou relation de la situation cible avec son équivalent dans la situation source. Pour faire une analogie parfaite, les éléments des deux situations doivent être connectés de la même manière dans les deux situations : si deux éléments d'une situation source sont reliés entre eux, alors les deux éléments correspondant dans la situation cible doivent aussi être connectés entre eux par une relation similaire. Les deux situations ont donc la même structure, elles partagent un même motif abstrait.
 
===Quand utiliser des analogies ?===
 
Utiliser une analogie demande de respecter quelques recommandations. Premièrement, l'analogie n'est utile que pour les élèves qui n'ont pas beaucoup de connaissances antérieures. En effet, les élèves ont tendance à effectuer automatiquement les analogies qui leur paraissent évidentes. Cela arrive quand les élèves reçoivent un enseignement dans des domaines qu'ils maîtrisent bien, ou qu'ils ont étudiés depuis quelques années. En clair, les analogies doivent introduire des concepts nouveaux, jamais vus auparavant. Cet effet est bien illustré par l'expérience de Donnelly et McDaniel, datée de 1993, qui a étudié la compréhension de principe de conservation du moment cinétique par des élèves de collège.
 
Ensuite, les analogies sont utiles uniquement pour les concepts complexes, difficiles à comprendre. Diverses études ont ainsi échoué à montrer un quelconque avantage de l'analogie, parce que les concepts à apprendre étaient trop simples, ce qui rendait l'analogie inutile. Dans ces conditions, l’analogie était une redondance inutile.
 
===Comment utiliser des analogies ?===
 
En plus de savoir quand utiliser les analogies, il faut savoir comment bien les utiliser. Pour faire une analogie parfaite, les éléments des deux situations doivent être connectés de la même manière dans les deux situations : si deux éléments d'une situation source sont reliés entre eux, alors les deux éléments correspondant dans la situation cible doivent aussi être connectés entre eux par une relation similaire. Cependant, cette mise en correspondance n’est pas toujours parfaite. Par exemple, certains éléments ne peuvent pas être mis en correspondance. De même, la structure des deux situations n’est pas forcément identique : les deux structures sont partiellement analogues. Dans ces conditions, il est important d’expliciter les différences entre situation cible et source. Sans cela, les élèves vont croire que les deux situations ont la même structure, et vont mal transférer.
 
Prenons un exemple bien connu : l'analogie entre intensité d'un courant électrique et débit hydraulique. Il est courant de comparer courant électrique et écoulement d'eau : le débit de l'écoulement est à l'eau ce que le courant électrique est aux charges électriques. De nombreux aspects des courants électriques suivent des lois physiques similaires ou identiques à celles qui gouvernent les écoulements hydrauliques. Dans une étude de 1983, Gentner a étudié les effets de cette analogie sur des élèves de collège. Son étude a montré que l'analogie permettait aux élèves de mieux comprendre les phénomènes électriques à l’œuvre dans une batterie. Mais cette analogie ne fonctionnait pas pour la compréhension des montages avec des résistances en série ou en parallèle. Cela provenait du fait que les élèves qui avaient reçu l'analogie pensaient que le courant fournit par le générateur restait constant quelle que soit la disposition des résistances, de la même manière que le débit fourni par un réservoir reste constant. En réalité, le courant émis par un générateur dépend de la disposition des résistances : le courant n'est pas le même si le montage utilise des résistances en série ou en parallèle
 
==Les histoires==
 
Raconter des histoires en classe peut sembler relativement incongru mais il s'agit pourtant d'une technique qui semble faire ses preuves. Il se trouve que les histoires ont des avantages pédagogiques intéressants. Elles sont plus intéressantes, plus faciles à comprendre qu'un texte explicatif, et plus faciles à mémoriser<ref>Graesser et al., 1994</ref>. Ces trois avantages proviennent d'une raison commune : la structure narrative force l'auditeur à relier les divers évènements de l'histoire suivant des liens de cause à effet<ref>Meyers & Duffy, 1990</ref>. Il faut dire que les évènements d'une histoire ne surviennent pas par hasard et les auditeurs s'attendent à ce qu'ils soient causés par d'autres. Lors de l'écoute ou de la lecture, les auditeurs vont naturellement chercher les relations de cause à effet entre évènements, favorisant l'élaboration, et donc la compréhension, la mémorisation de l'histoire, mais aussi l'intérêt de l'auditeur. En comparaison, les auditeurs d'un discours explicatif ne s'attendent pas forcément à ce que les connaissances évoquées soient reliées par des relations de cause à effet, celles-ci n'étant saillantes que si les explications sont correctement formulées ou que l'élève essaie de comprendre au mieux ce qu'on lui raconte. La structure narrative elle-même favorise de telles attentes et donc un traitement élaboratif du matériel lu/énoncé.
 
Ce conseil peut sembler limité, les contenus n'étant pas tous adaptés à une exposition narrative. Certes, les leçons d'Histoire (la matière) pourraient suivre une telle approche. Certaines leçons de sciences peuvent aussi suivre une approche historique qui explique comment les connaissances ont été découvertes, en illustrant les expériences réalisées par les savants qui ont fait l'histoire. Mais au-delà de ces exemples, ce conseil semble peu avisé.
 
Pour ceux qui veulent en savoir plus, je conseille la lecture de l’article suivant, écrit par Daniel Willingham, spécialiste en psychologie cognitive et sciences de l'éducation américain : '''[http://www.aft.org/periodical/american-educator/summer-2004/ask-cognitive-scientist Why people love and remember stories]'''.
 
==L'usage du support visuel pour présenter les associations entre idées==