« Psychologie cognitive pour l'enseignant/Aborder une notion : définitions et exemples » : différence entre les versions
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==De la représentation mentale des concepts==
Dans ce chapitre, ainsi que dans les chapitres suivants, nous allons beaucoup nous intéresser à ce qu'on appelle les '''catégories'''. Attention : dans ce cours, nous allons faire une distinction entre catégories et concepts, qui n'est pas acceptée par tout le monde. Nous allons définir les catégories comme des concepts pour lesquels on peut donner une définition claire et non-ambiguë. Celle-ci prend la forme d'une liste de propriétés que tous les exemples possèdent (ou non, dans certains cas, l'absence d'une propriété quelconque est partagée par tous les exemples). Pour donner un exemple de catégorie, on peut prendre l'exemple du concept de carré. On peut en donner la définition suivante : "quadrilatère convexe dont les
# quadrilatère, à savoir polygone à quatre cotés ;
# dont les
# dont les quatre angles sont des angles droits.
Cependant, nous utilisons beaucoup de concepts dans la vie courante, sans pour autant en connaitre la définition exacte. Par exemple, essayez de me donner la définition du concept "Chat". Vous aurez certainement du mal : peut-être direz-vous que c'est un mammifère de l'ordre des félins, qu'il a des poils, une queue, une petite taille, etc. Mais vous ne fournirez pas une définition complète de ce qu'est un chat.
[[File:Generalization_process_using_trees_PNG_version.png|thumb|droite|Exemple de la généralisation du prototype du concept d'arbre.]]
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Si l’élève a vu peu d’exemples d'un concept, le cerveau le représentera comme un simple ensemble d’exemples qui contient les exemplaires déjà rencontrés. Lors de la catégorisation, l'entité à classer est comparée aux exemples mémorisés et classée dans la catégorie liée à l'exemple le plus similaire. Il n’y a aucune abstraction, ce qui fait que la catégorisation est peu performante.
Mais à force de voir des exemples, le cerveau va progressivement dégager leurs propriétés communes et en abstraire une catégorie. A ce stade, les catégories sont représentées par un objet idéal, qui définit à quoi doit ressembler un objet de la catégorie, appelé le '''prototype'''. Ainsi, une chaise sera un meilleur exemple de meuble qu'un rideau, vu qu'il est plus proche de ce prototype idéal. Une armoire sera assez proche du prototype et sera considérée comme un meuble, mais moins qu'une chaise. Lorsqu'on veut savoir si un objet appartient à une catégorie, on le compare à son prototype : plus celui-ci est proche, plus on
Pour donner un exemple, on peut citer l’expérience de Lupyan (2012). Dans celle-ci, il a demandé à un premier groupe de cobayes de dessiner un triangle, tandis qu'un second groupe devait dessiner une figure à trois côtés. Dans le groupe triangle, le triangle a été dessiné avec une base horizontale dans 82% des cas et il était isocèle dans 91% des cas. Mais dans le groupe "trois côtés", ces deux proportions sont de 50% seulement ! De même, les participants ont tendance à surévaluer l'inclinaison d'un triangle quand on leur dit qu'il s'agit d'un triangle, comparé à un groupe test dans lequel on dit aux participants que la figure est un polygone à trois côtés.
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Lors de l'abstraction d'un prototype, le cerveau va se baser sur la fréquence des propriétés dans les exemples présentés. Le problème est que le cerveau ne peut pas vraiment faire la différence entre les propriétés qui permettent de classer avec quasi-certitude un objet dans la catégorie et celles qui viennent d'une simple ressemblance. En effet, deux objets peuvent être très similaires sans pour autant appartenir à la même catégorie. Par exemple, un dauphin ou une baleine ont beau ressembler fortement à des poissons, ce sont des mammifères. Le cerveau n'apprend pas à faire la différence entre les '''propriétés essentielles''', partagées par tous les membres de la catégorie, et les '''propriétés facultatives''' qui sont fréquentes chez certains membres de la catégorie mais pas chez tous. Prenons l'exemple d'un élève à qui on souhaite apprendre ce qu'est un carré. D'ordinaire, on présente des exemples de carrés à l'horizontale, les carrés des exemples étant rarement penchés. Si on présente un carré penché à un élève il ne le classera pas comme un carré, vu que les exemples rencontrés n'étaient pas penchés ; l'élève considèrera que la propriété "pas penché" est une propriété essentielle du concept de carré.
De plus, il arrive que deux élèves construisent des compréhensions différentes d'un même concept à partir d'exemples identiques. Par exemple, essayez de déduire quelle est la règle à partir des exemples suivant : 1, 3, 7, 5, 9, etc. Vous avez certainement pensé qu'il s'agissait des nombres impairs, mais cette suite est aussi
==Du bon usage des exemples==
Pour éviter ces problèmes, il existe diverses techniques qui visent à diminuer l'
===Varier les exemples===
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Dans une de ses expériences datée de 1979, John Bransford et ses collègues de la Vanderbilt University au Tennessee ont cherché à savoir si varier les exemples avait un effet sur la capacité à transférer la catégorie dans de nouvelles situations. Un premier groupe devait apprendre des concepts avec des exemples similaires, tandis que l'autre groupe recevait des exemples très différents. Dans un test ultérieur, portant sur un contexte d'utilisation jamais vu auparavant lors des exemples, les chercheurs ont vérifié quel était le pourcentage de réussite des deux groupes : 84% dans le second groupe contre 64% dans le premier.
Une autre méthode pour varier l'apprentissage est d''''utiliser des contre-exemples'''. Ceux-ci permettent de réfuter les règles ou prototypes
===Distribuer les exemples===
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Mais outre le fait de varier les exemples, il faut aussi les voir dans un certain ordre. Durant longtemps, les scientifiques pensaient cependant qu'amasser les exemples était une bonne solution, dans le sens où cela permettait de juxtaposer des exemples similaires, facilitant ainsi l'extraction de leurs similarités/points communs. Par exemple, supposons que je dispose de neuf exemples d’une même catégorie, qui peuvent être groupés en trois paquets A, B et C selon leurs similarités. Intuitivement, on pourrait penser qu’il vaut mieux présenter les exemples dans cet ordre : A1, A2, A3, B1, B2, B3, C1, C2, C3.
Mais dans le chapitre précédent, on a vu que l'apprentissage des concepts devait mettre l'accent sur leurs différences, ce que le séquencement vu plus haut ne permet pas de faire, car il met l'accent sur les similarités entre exemples. De plus, on a vu au chapitre précédent que la distribution de l'apprentissage permettait un meilleur apprentissage. Or, dans le type de séquencement précédent, les exemples similaires sont amassés les uns après les autres et non distribués. Cela va plutôt dans le sens d'une distribution des exemples, des exemples similaires devant être le plus éloignés possibles (dit autrement, des exemples consécutifs soient les plus dissemblables possibles). Par exemple, dans l'exemple ci-dessus, il vaudrait mieux utiliser un ordre du style A1, B1, C1, A2, B2, C2, A3, B3, C3. Tout l'enjeu est de mettre l'accent sur les différences entre exemples, pour faciliter l'induction d'une catégorie.
Quelques études
Quand on fait intervenir des contre-exemples, les choses deviennent plus compliquées. Il est ainsi déconseillé de voir tous les exemples ensembles, suivis par les contre-exemples : les prototypes ou règles mal induits seront alors réfutés plus tôt ou n'auront pas le temps de se former. Plutôt que de présenter les exemples par blocs, suivis des contres-exemples, il vaut mieux alterner exemples et contre-exemples, intercaler chaque contre-exemple entre deux exemples : il ne faut pas que les contre-exemples soient regroupés. De plus, chaque contre-exemple doit être le plus semblable aux exemples qui l'entourent : cela permet à l'élève de nettement mieux distinguer les propriétés essentielles des propriétés facultatives.
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* présenter une série d'exemples les uns à la suite des autres à un rythme assez rapide ;
* varier le plus possible les exemples présentés ;
* rendre
* intercaler des contre-exemples entre les exemples ;
* utiliser des contre-exemples très similaires au concept à apprendre ;
* rendre
* construire une suite d'exemples/contre-exemples qui n'a qu'une seule interprétation possible et ne peut permettre d'induire qu'une seule et unique règle ;
* faire précéder les exemples par une définition, une règle ou une procédure quand c'est possible : celle-ci permet de donner des indications sur ce qui est pertinent dans la série d'exemples, ce qui est commun aux différents exemples, facilitant l'abstraction d'une règle.
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===L'usage de définitions alternatives===
Notons qu'une catégorie peut se définir de plusieurs manières. Dit autrement, on peut donner plusieurs définitions équivalentes d'un même concept, d'une même catégorie. Par exemple, un carré peut être
: ''Un concept peut souvent s'expliquer de plusieurs manières différentes compréhensibles par les élèves. Ces explications ne sont pas exclusives, mais complémentaires et il est préférable, si le temps et les conditions le permettent, d'aborder un concept de plusieurs manières au lieu d'en choisir une bien précise.''
===Les définitions demandent des
Dans l'exemple du carré, on peut remarquer que la définition fait appel à d'autres concepts. Par exemple, la définition "Quadrilatère dont les
Techniquement, les concepts utilisés dans la définition sont des ''
Notons qu'il est techniquement possible d'expliquer de tels concepts en présentant la définition, ou en utilisant des exemples. Pour le concept de carré, on peut en fournir la définition, mais on peut aussi présenter des rectangles quelconques et des carrés et demander aux élèves de les classer en deux types distincts : ceux-ci vont alors remarquer qu'il y a une différence entre les carrés et les rectangles quelconque, et
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