« Précis d'épistémologie/Les émotions, la volonté et l'attention » : différence entre les versions

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la section supprimée, sur la construction de soi, a été réintégrée dans la maîtrise de soi
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L'accord, ou la congruence, entre le moi et son expérience (Rogers 1951), c'est à dire l'adaptation de nos croyances conscientes aux réalités extérieures et intérieures, est une condition nécessaire de la maîtrise de soi. Pour se servir au mieux de son potentiel il faut le connaître. On ne peut pas développer pleinement son potentiel si on entretient des illusions à son sujet.
 
L'activité du ça est la plus grande partie de notre activité intérieure et elle échappe au contrôle volontaire. Cela suggère que nous ne pouvons pas être maître de nous-même. Tout pourrait se décider à notre insu dans le ça. La volonté elle-même pourrait n'être que l'enregistrement des décisions du ça. Et nous ne pourrions pas décider de ce que nous devenons. Mais attribuer au ça la toute-puissance et réduire ainsi le moi à néant, ou presque néant, semble exagéré. La volonté du moi d'être maître de sa destinée, sa croyance dans ses capacités à se transformer et de se construire lui-même, semble n'être pas seulement une illusion. Il peut vouloir changer ses habitudes ou ses façons de réagir, acquérir de nouvelles capacités et du savoir. Il peut même vouloir changer sa volonté.
 
Comme nous sommes transformés par toutes nos expériences, par tout ce que nous percevons ou imaginons, toutes nos décisions volontaires à l'origine de nos expériences ont toujours pour effet de nous transformer. C'est ainsi que nous acquérons de nouvelles habitudes. Au début elles requièrent un effort volontaire, mais elles sont ensuite accomplies d'une façon automatique.
 
On agit sur soi-même dès qu'on agit parce qu'on dirige son attention. La direction de l'attention est le premier levier avec lequel on agit sur soi-même à chaque instant. Elle est l'une des premières compétences à acquérir pour apprendre à se maîtriser soi-même.
 
L'imagination, même sans action, suffit pour se transformer soi-même, parce qu'elle nous fait découvrir nos capacités. On commence par imaginer qu'on pourrait essayer quelque chose, puis on se rend compte que cela pourrait marcher. Imaginer qu'on est capable suffit souvent pour se rendre capable. Quand on résout un problème par l'imagination, on est transformé par la découverte d'une solution.
 
On peut agir sur sa propre perception et la construire, parce que nos décisions influencent la façon dont nous percevons la réalité. Les schémas qui organisent nos perceptions dépendent de ce que nous voulons. Nous pouvons choisir de nouveaux schémas, modifier ou rejeter les anciens et changer ainsi nos façons de voir le monde et nous-mêmes.
 
Nos décisions volontaires ne sont pas limitées à l'action sur le présent. Elles portent souvent sur un avenir plus ou moins lointain ou déterminé. Nous décidons par avance les objectifs que nous poursuivrons et les règles, les engagements ou les contraintes que nous respecterons. Tout se passe comme si nous écrivions dans nos têtes les contrats et les cahiers des charges pour lesquels nous nous décidons volontairement. Une telle écriture se produit automatiquement. Il suffit que nous arrêtions nos décisions pour qu'elles soient mémorisées d'une façon définitive, ou presque. Elles peuvent alors exercer leurs effets même des années ou des décennies plus tard, sauf si on les oublie. Arrêter ses décisions par avance est comme vouloir vouloir, parce qu'on se décide maintenant à vouloir ce qu'on devra décider plus tard. En déterminant sa volonté on la construit. On se transforme soi-même en prenant des décisions, la volonté s'autodétermine, elle est transformée par ses propres décisions.
 
On se construit soi-même en décidant de ce qu'on veut être, donc en se donnant un savoir éthique qui définit l'idéal du moi. Le surmoi est le principal outil avec lequel le moi peut se construire lui-même.
 
La volonté a quelque chose de magique : il suffit de vouloir lever le petit doigt pour qu'il se lève automatiquement. Il en va de même lorsque la volonté se veut elle-même, lorsqu'elle prend des engagements sur son avenir. Il suffit de vouloir déterminer sa volonté pour qu'elle soit automatiquement déterminée. Mais que ce soit pour l'action sur son environnement ou sur elle-même, la magie de la volonté a toujours des limites. La volonté à elle seule est en général insuffisante pour déplacer des montagnes. Elle ne peut pas non plus faire d'elle-même ce qu'elle ne peut pas être.
 
Nous nous construisons nous-mêmes en permanence, à chaque fois que nous prenons des décisions et que nous vivons leurs conséquences. Comme pour toute construction, le constructeur doit adapter son action aux matériaux disponibles, s'il veut un résultat viable et fiable. La réflexion, la connaissance de soi, est donc essentielle, vitale, pour se construire soi-même.
 
=== Puissance de l'inconscient ou de la conscience ? ===
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Le modèle d'administration centralisée sans administrateur central interdit l'existence d'un inconscient à la fois indépendant de la conscience et plus puissant qu'elle, mais il explique quand même pourquoi l'inconscient peut être très puissant. Lorsque la conscience se réfugie dans la fausse conscience et s'accroche à des schémas inadaptés, elle peut devenir très faible et incapable de faire son travail d'unification intérieure, elle perd le contrôle et se laisse envahir par l'agitation intérieure, d'origine inconsciente. L'inconscient acquiert de la puissance par l'intermédiaire de la conscience et à son insu, parce qu'elle s'est réfugiée dans le déni. En profitant de la faiblesse et des illusions de la conscience, l'inconscient peut avoir accès aux ressources du système exécutif en nous suggérant des croyances et des buts dont nous ne reconnaissons pas les motivations inconscientes. L'inconscient peut ainsi devenir puissant mais seulement parce que la conscience lui a cédé une part de sa puissance.
 
Un bon surmoi, adapté à la réalité, lucide, qui impose un minimum de cohérence à la vie intérieure et qui se comporte comme une bonne autorité, modératrice et apaisante, est en principe suffisant pour apprivoiser son inconscient. Il ne faut pas voir le ça comme un repaire de démons très puissants, mais plutôt comme un petit animal plein de désir de vivre, plus ou moins docilesauvage, et qui peut être apprivoisé. Il arrive que l'inconscient s'approprie les ressources d'une conscience faible et fausse et pousse à l'autodestruction, mais il ne peut le faire que si la conscience ne fait plus correctement son travail d'autoprotection.
 
=== La maîtrise des émotions ===