« Théorie quantique de l'observation » : différence entre les versions

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le parallélisme du calcul quantique et la multiplicité des passés virtuels
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Les états initiaux et les états pointeurs des instruments de mesure qui définissent un observateur idéal déterminent, par produit tensoriel, les états pointeurs de l'observateur lui-même. La sélection des états pointeurs des instruments de mesure (cf. 5.4) sélectionne du même coup la base des états pointeurs de l'observateur idéal.
 
Lorsqu'un système quantique n'est pas un instrument de mesure macroscopique ou un observateur idéal, aucune base d'états pointeurs n'est a priori privilégiée (cf. 5.5). On peut quand même définir des destinées multiples en choisissant arbitrairement une de ses bases d'états. Mais il n'y a aucune raison de penser que ces destinées sont réelles, parce que les états qui les définissent ne sont pas en général des états par lesquelslequel le système passe réellement. Dans la réalité il est dans une superposition de ces états ou dans un état intriqué avec son environnement. C'est pourquoi ce livre appellent virtuelles de telles destinées quantiques.
 
Lorsque les <math>t_i</math> sont des instants du temps et les <math>|\phi_i\rangle</math>, des états d'un système S, indexés par le même indice <math>i</math>, la suite des <math>(|\phi_i\rangle, t_i)</math> est un chemin de Feynman.
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Une autre raison fondamentale empêche d'identifier les chemins de Feynman à des destinées réelles. Ils attribueraient de très nombreux passés à un même état présent. Les chemins de Feynman ne forment pas une arborescence parce qu'ils peuvent converger aussi facilement qu'ils divergent. Un état quantique sur un chemin de Feynman est un point de convergence de très nombreux chemins qui définiraient autant de passés s'ils étaient des destinées réelles.
Cette propriété de convergence des cheminsdestinées de Feynmanvirtuelles est importante pour utiliser le parallélisme du calcul quantique, mais elle semble évidemment exclue pour des destinées réelles, qui en général semblent avoir un seul passé.
 
=== Le parallélisme du calcul quantique et la multiplicité des passés virtuels ===
 
Soit un système à deux qubits. Ils interagissent de telle façon que le premier agit sur le second sans être affecté en retour, quand on raisonne dans la base {<math>|0\rangle, |1\rangle</math>}. Leur interaction est donc décrite par l'opérateur <math>U_f</math> :
 
<math>U_f |00\rangle = |0f(0)\rangle</math>
 
<math>U_f |10\rangle = |1f(1)\rangle</math>
 
<math>U_f |01\rangle = |0f(0)^c\rangle</math>
 
<math>U_f |11\rangle = |1f(1)^c\rangle</math>
 
où <math>f</math> est une fonction a priori quelconque qui décrit l'effet du premier qubit sur le second et où <math>0^c=1</math> et <math>1^c=0</math>.
 
Si le système est préparé initialement dans l'état <math>\frac{1}{2}(|0\rangle + |1\rangle)(|0\rangle - |1\rangle)</math>, on obtient :
 
<math>U_f \frac{1}{2}(|0\rangle + |1\rangle)(|0\rangle - |1\rangle) = \frac{1}{2}(|0f(0)\rangle + |1f(1)\rangle - |0f(0)^c\rangle - |1f(1)^c\rangle)</math>
 
Si <math>f(0)=f(1)</math> on obtient :
 
<math>U_f \frac{1}{2}(|0\rangle + |1\rangle)(|0\rangle - |1\rangle) = -\frac{1}{2}(|0\rangle + |1\rangle)(|f(0)\rangle + |f(0)^c\rangle)</math>
 
Si <math>f(0) \ne f(1)</math> on obtient :
 
<math>U_f \frac{1}{2}(|0\rangle + |1\rangle)(|0\rangle - |1\rangle) = \frac{1}{2}(|0\rangle - |1\rangle)(|f(0)\rangle - |f(0)^c\rangle)</math>
 
L'état final <math>|x^+\rangle</math> ou <math>|x^-\rangle</math> du premier qubit révèle donc s'il fait toujours le même effet sur son partenaire, ou si l'effet varie.
 
On peut analyser ce calcul quantique en distinguant deux destinées virtuelles du premier qubit, celle où il passe dans l'état <math>|0\rangle</math> juste après la préparation initiale, l'autre où il passe dans l'état <math>|1\rangle</math>. L'opérateur <math>U_f</math> fait évoluer ces deux destinées en parallèle. De façon imagée on peut dire que le premier qubit vit deux destinées dans lesquelles il peut faire ou non le même effet sur son partenaire. Ces deux destinées convergent finalement sur un même état <math>|x^+\rangle</math> ou <math>|x^-\rangle</math>. Si c'est <math>|x^+\rangle</math> le qubit a fait le même effet dans ses deux destinées virtuelles passées, si c'est <math>|x^-\rangle</math>, il a fait un effet différent. En ayant plusieurs passés virtuels, le premier qubit permet de récolter les fruits du parallélisme du calcul quantique.
 
Cet exemple a valeur générale (Deutsch 1985). Le calcul quantique permet toujours de calculer en une seule étape toutes les valeurs d'une fonction. Si par exemple, il dispose de 100 qubits de mémoire pour le registre de données, un ordinateur quantique peut calculer en parallèle et en une seule étape <math>2^{100} \approx 10^{30}</math> (mille milliards de millards de milliards environ) valeurs d'une fonction a priori quelconque. Mais la difficulté est de récolter les fruits de ce parallélisme. Il faut observer un état qui résulte de toutes les destinées virtuelles qui se produisent en parallèle, donc un état qui a de très nombreux passés virtuels.
 
=== Les autres destinées existent-elles ? ===
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Cohen-Tannoudji, Claude, Diu, Bernard & Laloë, Frank, ''Mécanique quantique'' (1973)
 
Deutsch, David, ''Quantum theory, the Church-Turing principle and the universal quantum computer'' (1985, Proc. R. Soc. Lond. A, pp. 400-497), ''The fabric of reality'' (1997)
 
DeWitt, Bryce S. & Graham, Neill, ''The many-worlds interpretation of quantum mechanics'' (1973)