« Mémoire/Représentations des connaissances en mémoire sémantique » : différence entre les versions

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La mémoire sémantique peut contenir une grande quantité d'informations, qu'elles soient visuelles, verbales, sémantique, ou autre. De nombreuses théories existent concernant le stockage des informations en mémoire sémantique. La plupart tombent d’accord sur un point : le cerveau humain classe les informations en '''représentations mentales''' abstraites, qu'il s'agisse de catégories ou de concepts plus élaborés. Lorsque notre cerveau perçoit des choses via la vision ou l’ouïe, il organise sa perception en fonction de ses connaissances antérieures. Cela permet aussi de faire des prédictions et des déductions : à chaque fois que je rencontre une situation, un objet, ou un concept déjà connu, je peux accéder à mes connaissances sur cette entité depuis ma mémoire à long terme, et les réutiliser. Par exemple, si je catégorise un ensemble de perceptions comme étant un homme armé, je sais que je dois décamper ou me cacher le plus rapidement possible. Cela permet d'effectuer des inférences, des raisonnements, ou de résoudre des problèmes.
 
==Réseaux et traits sémantiques==
==Catégories==
 
Au niveau psychologique, les représentations les plus étudiées sont les '''catégories''', des ensembles d'objets ou d'évènements qui ont des points communs. Divers modèles de catégories mentales existent. Certaines théories stipulent que chaque concept est stocké dans le cerveau par un regroupement de propriétés et/ou d'informations élémentaires appelées des '''traits sémantiques'''. Chacun d'entre eux stocke une information spécifique. Par exemple, l'information "le chat a des poils" est un morceau irréductibles d'information comme un autre. De même, le concept canari contiendra des traits sémantiques du genre : "couleur jaune", "peut voler", "oiseau", et ainsi de suite. Une concept est donc une liste des propriétés communes que tous ses exemples respectent. Chaque concept serait donc mémorisé comme étant une unité, qui serait reliée aux traits sémantiques qui le compose.
 
Mais la mémoire sémantique n'est pas qu'une simple armoire de concepts empilésaccolés les uns sur les autres. Si c'était le cas, se rappeler quelque chose nécessiterait de rechercher le matériel à rappeler dans toute la mémoire sémantique : cette recherche serait vraiment longue et inefficace. Or, se rappeler de quelque chose n'est pas si difficile. Les modèles actuels de la mémoire sémantique résolvent ce problème en supposant que la mémoire est structurée de manière à faciliter le rappel. Les concepts sont non seulement reliés à leurs propriétés, mais aussi aux autres concepts. La mémoire à long-terme est (au moins en partie) intégralement constituée d'un '''réseau de connaissances''', reliées entre elles par des relations. Par exemple, un mot est associé au concept qui porte ce nom, plusieurs idées sont reliées entre elles par un lien logique, etc. L'ensemble de nos connaissances est mémorisé dans un gigantesque réseau de concepts, réseau qui mémorise le sens des choses, les liens entre concepts.
===Traits sémantiques===
 
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Certaines théories stipulent que chaque concept est stocké dans le cerveau par un regroupement de propriétés et/ou d'informations élémentaires appelées des '''traits sémantiques'''. Chacun d'entre eux stocke une information spécifique. Par exemple, l'information "le chat a des poils" est un morceau irréductibles d'information comme un autre. De même, le concept canari contiendra des traits sémantiques du genre : "couleur jaune", "peut voler", "oiseau", et ainsi de suite. Une concept est donc une liste des propriétés communes que tous ses exemples respectent.
Spreading Activation Model Mental Lexicon.png|Organisation en réseau de la mémoire déclarative.
Semantic Net fr.svg|Réseau mnésique possible, simplifié.
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===PrototypesRelations taxonomiques===
 
La recherche sur la mémoire dite sémantique (celle des concepts et des faits) a longtemps mis l'accent sur une forme d'organisation bien précise : les '''classifications'''. Les concepts seraient ainsi classés dans des hiérarchies de catégories, spécifiques à un domaine ou une discipline. On peut voir le tout comme un système de poupées russes : les catégories plus spécifiques sont incluses, emboîtées dans les catégories plus générales du niveau supérieur de la hiérarchie. Les concepts les plus concrets sont situés près de la base de la hiérarchie et les plus abstraits en haut. On peut préciser que les exemples sont intégrés dans ces hiérarchies : ils sont situés tout en bas et sont vus comme des catégories très spécialisées. Une telle hiérarchie est appelée une '''structure cognitive'''. Elle relie des concepts en faisant appel à trois types différents de '''relations taxonomiques''' :
En 1970, deux psychologues, Eleanor Rosch et George Lakoff, ont effectué diverses observations et ont sorti un article nommé "Cognitive Representation of Semantic Categories". Ces deux psychologues ont demandé à 200 étudiants de noter un ensemble d'objets sur une échelle de 1 à 5. La question déterminant la note était : est-ce que cet objet est un bon exemple de meuble. Et la liste était presque intégralement remplie de meubles. On pourrait croire que la notation des meubles variait suivant l'étudiant, suivant sa culture (les étudiants étaient de diverses nationalités), son environnement socioprofessionnel, etc. Mais en fait, on trouvait très peu de différences : les réponses étaient presque identiques, et étaient peu corrélées avec les diverses variables mentionnées plus haut.
 
* les '''hyperonymies''' vont relier les catégories à des catégories plus générales, qui englobent la catégorie de base : le concept « Cocker » sera relié au concept « Chien », le concept « Chat » sera relié au concept « Animal », etc ;
Quel que soit l'étudiant, certains objets étaient plus mis en avant et était considérés par tous comme étant plus des meubles que les autres. Il y a donc un '''effet de typicalité''' : certains objets sont considérés comme de meilleurs représentants d'une catégorie. Cela a fait naître l'idée suivante. Une nouvelle théorie de la catégorisation était née : la théorie cognitive du prototype. D'apèrs cette théorie, les catégories sont représentées par un objet idéal, le '''prototype''', qui définit à quoi doit ressembler un objet de la catégorie. Ce prototype est une sorte de représentant idéal de la catégorie, l'objet parfait. Lorsqu'on veut savoir si un autre objet appartient à cette catégorie, celui-ci est comparé au prototype : plus celui-ci est proche, plus on considérera que l'objet appartient à la catégorie. Cette comparaison peut privilégier certains attributs sur d'autres, ou ne pas mêler d'attributs du tout. Ainsi, une chaise sera un meilleur exemple de meuble qu'un rideau, vu qu'il est plus proche de ce prototype idéal. Une armoire sera assez proche du prototype et sera considérée comme un meuble, mais moins qu'une chaise.
* les '''hyponymies''' vont relier chaque catégorie à ses catégories dérivées, les catégories plus concrètes qu'on obtient en spécialisant la catégorie avec l'ajout de propriétés : la catégorie « félins » sera reliée aux concepts de « chat », « tigre », « lion », « panthère », etc ;
* les '''relations structurales''', qui relient les catégories et exemples à leurs propriétés : c'est grâce à ces relations qu'on sait qu'un oiseau peut voler, qu'un canari est jaune, et ainsi de suite.
 
Un des premiers modèles de la mémoire sémantique, le '''modèle de Collins et Quillian''' se basait exclusivement sur de telles structures cognitives. Celui-ci dit que les propriétés peuvent être communes. Par exemple, les concepts « oiseau » et « canari » partagent les propriétés suivantes : les deux peuvent voler, ont des plumes, des ailes, etc. Cela vient du fait qu'un canari est un oiseau, et qu'il hérite donc des propriétés communes à tous les oiseaux : toute sous-catégorie hérite des propriétés des catégories plus générales auxquelles elle est reliée. Le modèle gère ces propriétés héritées en ajoutant une hypothèse : l''''économie cognitive'''. Cette hypothèse dit que seules les propriétés spécifiques à un concept sont reliées à celui-ci : les propriétés héritées d'un concept plus générales sont reliées uniquement au concept le plus général, mais pas aux autres concepts. Par exemple, les propriétés « peut voler », « a des ailes », « a des plumes » seront reliées au concept « oiseau », mais pas au concept « canari ». Ce mécanisme évite les duplications inutiles de propriétés.
=== Exemplaires ===
 
[[Fichier : Hierarchical Model Mental Lexicon.png|centre|Organisation des classifications en mémoire.]]
Certains psychologues pensent toutefois qu'une catégorie est stockée sous la forme d'un rassemblement d'exemplaires. Prenons l'exemple d'un chien. La première fois qu'un enfant voit un chien, le cerveau stocke toutes les informations sur ce chien en mémoire. A chaque fois que cet enfant voit d'autres chiens, il enregistrera encore toutes les informations de ces chiens dans des compartiments séparés en mémoire à long terme. Ces chiens seront associés au mot chien, mais seront stockés indépendamment : ils forment des exemplaires de la catégorie "chien".
 
===Relations thématiques===
A chaque fois qu'on veut savoir si un objet appartient à une catégorie, le cerveau va "ouvrir" la catégorie, et vérifier tous les exemplaires. Si il trouve un exemplaire identique à ce qu'il perçoit, alors il reconnait l'objet. Sinon, l'objet n'est pas dans la catégorie.
 
Néanmoins, il est vite apparu que cette organisation rigide ne suffisait pas à rendre compte des résultats expérimentauxdansexpérimentaux dans les tâches de '''décision lexicale'''. Le principe de ces expériences est simple : on donne une phrase à un cobaye, et il doit dire si celle-ci est vraie ou fausse. L'expérimentateur mesure le temps mis par le cobaye pour répondre : plus le temps mis à répondre est long, plus le cerveau a dû parcourir de nœuds dans la mémoire sémantique pour tomber sur le bon. De cesCe expériences, ilavaient ressortétés queutilisées pluspour unconfirmer conceptle estmodèle familier,taxonomique plusde onCollins peutet vérifierQuillians. lesCes phrasesexpériences quiavaient y rapportent rapidement, sansmontré que lales positionconcepts danssuperordonnés laavaient hiérarchieun taxonomiquetemps n'yde change quoique ce soit. Deréponse plus, lalong hiérarchieque estles violéeconcept dans certains cas spécifiquessous-ordonnés. ParMême exemple,chose ilpour estl'accès plusaux lentpropriétés de vérifier la véracité de la phrase "d'un chienconcept est: uncelles mammifère",stockées quedans pourles laconcepts phrasesuperordonnés "un chien estont un animal",temps alors que les théories hiérarchiques prédisent ld'inverse. De nombreux phénomènes similaires ont étés documentés et seraient assez fréquents. Par exemple, le mot "canari" a tendance à évoquer le mot "cage"accès plus rapidementlong que lecelles motstockées "êtreplus vivant".bas Cedans quil'arbre est difficile à expliquer avec le modèle de collins et quillianstaxonomique.
Visiblement, cette théorie prédit que la mémoire finit par se remplir à chaque fois qu'on croise un nouvel exemplaire d'un membre d'une catégorie. De plus, la catégorisation d'un objet prend énormément de temps et nécessite beaucoup de comparaisons.
 
De ces expériences, il ressort aussi que plus un concept est familier, plus on peut vérifier les phrases qui y rapportent rapidement, sans que la position dans la hiérarchie taxonomique n'y change quoique ce soit. Il semblerait que certains exemples soient plus faciles à traiter que les autres, alors que ces concepts sont au même niveau dans la hiérarchie. De plus, lorsqu'on demande à un sujet de donner un exemple d'un concept, c'est ces concepts familiers qui ressortent le plus. Certains exemples seraient ainsi plus représentatifs d'un concept que les autres.
Dans les faits, cette théorie pose quelques problèmes, mais à quelques confirmations expérimentales. Il semblerait que l'humain utilise à la fois exemplaires et prototypes. Les catégories ayant beaucoup d’éléments utilisent des prototypes, tandis que les catégories utilisant peu d’éléments se contentent d'une liste d’exemplaires. Il semblerait que l'exemplaire soit le mécanisme de catégorisation principal chez les enfants en bas-age, avant d'être supplanté par la catégorisation par prototypes au cours de la croissance.
 
EnPour 1970le prouver, les deux psychologues, Eleanor Rosch et George Lakoff, ont effectué diverses observations et ont sorti un article nommé "Cognitive Representation of Semantic Categories" (1975). Ces deux psychologues ont demandé à 200 étudiants de noter un ensemble d'objets sur une échelle de 1 à 5. La question déterminant la note était : est-ce que cet objet est un bon exemple de meuble. Et la liste était presque intégralement remplie de meubles. On pourrait croire que la notation des meubles variait suivant l'étudiant, suivant sa culture (les étudiants étaient de diverses nationalités), son environnement socioprofessionnel, etc. Mais en fait, on trouvait très peu de différences : les réponses étaient presque identiques, et étaient peu corrélées avec les diverses variables mentionnées plus haut. Quel que soit l'étudiant, certains objets étaient plus mis en avant et était considérés par tous comme étant plus des meubles que les autres.
===Théories hybrides===
 
QuelCette queexpérience soitillustre l'étudiant, certains objets étaient plus mis en avant et était considérés par tous comme étant plus des meubles que les autres. Il y a donc un '''effet de typicalité''' : certains objets sont considérés comme de meilleurs représentants d'une catégorie. Cela a fait naître l'idée suivante. Une nouvelle théorie de la catégorisation était née : la théorie cognitive du prototype. D'apèrs cette théorie, les catégories sont représentées par un objet idéal, le '''prototype''', qui définit à quoi doit ressembler un objet de la catégorie. Ce prototype est une sorte de représentant idéal de la catégorie, l'objet parfait. Lorsqu'on veut savoir si un autre objet appartient à cette catégorie, celui-ci est comparé au prototype : plus celui-ci est proche, plus on considérera que l'objet appartient à la catégorie. Cette comparaison peut privilégier certains attributs sur d'autres, ou ne pas mêler d'attributs du tout. Ainsi, une chaise sera un meilleur exemple de meuble qu'un rideau, vu qu'il est plus proche de ce prototype idéal. Une armoire sera assez proche du prototype et sera considérée comme un meuble, mais moins qu'une chaise.
D'autres théories mélangent les apports des deux théories précédentes, et supposent l'existence de plusieurs prototypes par catégories. Par exemple, la catégorie cuillère aurait deux prototypes : un pour les cuillères en bois (souvent longues), et un autre pour les "petites" et "moyennes" cuillères en métal. En tout cas, on est loin de la représentation des catégories par des règles, qui permettraient de définir si un objet appartient ou non à une catégorie. En somme, tenter de définir des catégories par des définitions, sans donner de nombreux exemples, est définitivement voué à l'échec.
 
Il est cependant possible de rendre compte de l'effet de typicalité assez facilement dans le modèle de Collins et QUillians. Il suffit d'associer une certaine force aux associations entre concepts. Plus la force d'un lien est importante, plus la traversée du lien sera rapide. Les concepts typiques sont reliés à leur super-ordonnés avec des liens très forts, très rapides. Les concepts moins typiques seraient quant à eux reliés avec des liens moins forts, moins rapides. Cela expliquerait les différence en terme de temps de réaction ou de production.
==Réseaux sémantiques==
 
===Relations thématiques===
Mais la mémoire sémantique n'est pas qu'une simple armoire de concepts empilés les uns sur les autres. Si c'était le cas, se rappeler quelque chose nécessiterait de rechercher le matériel à rappeler dans toute la mémoire sémantique : cette recherche serait vraiment longue et inefficace. Or, se rappeler de quelque chose n'est pas si difficile. Les modèles actuels de la mémoire sémantique résolvent ce problème en supposant que la mémoire est structurée de manière à faciliter le rappel. La mémoire à long-terme est (au moins en partie) intégralement constituée d'un '''réseau de connaissances''', reliées entre elles par des relations. Par exemple, un mot est associé au concept qui porte ce nom, plusieurs idées sont reliées entre elles par un lien logique, etc. L'ensemble de nos connaissances est mémorisé dans un gigantesque réseau de concepts, réseau qui mémorise le sens des choses, les liens entre concepts.
 
De plus, la hiérarchie taxonomique est violée dans certains cas spécifiques. Par exemple, il est plus lent de vérifier la véracité de la phrase "un chien est un mammifère", que pour la phrase "un chien est un animal", alors que les théories hiérarchiques prédisent l'inverse. De nombreux phénomènes similaires ont étés documentés et seraient assez fréquents. Par exemple, le mot "canari" a tendance à évoquer le mot "cage" plus rapidement que le mot "être vivant". Ce qui est difficile à expliquer avec le modèle de collins et quillians. Pour rendre compte de ce genre d'observations, on doit postuler que d’autres formes de relations existent. Par exemple, le modèle de Collins et Loftus ajoute des connexions entre catégories du même niveau (qui appartiennent au même concept superordonné), ainsi que des relations entre arbres taxonomiques. De nos jours, ces dernières relations portent le nom de sont regroupées, par convention, dans un ensemble extrêmement hétérogène appelé '''relations thématiques'''. Ces relations, avec les relations taxonomiques (catégorielles), permettent de former une représentation de situations ou d'évènements. Il peut s'agir de relations de causalité entre évènements, de relations qui permettent de localiser des objets, et bien d'autres encore.
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Spreading Activation Model Mental Lexicon.png|Organisation en réseau de la mémoire déclarative.
Semantic Net fr.svg|Réseau mnésique possible, simplifié.
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===Relations taxonomiquesExemplaires ===
 
Certains psychologues pensent toutefois qu'une catégorie est stockée sous la forme d'un rassemblement d'exemplaires. Prenons l'exemple d'un chien. La première fois qu'un enfant voit un chien, le cerveau stocke toutes les informations sur ce chien en mémoire. A chaque fois que cet enfant voit d'autres chiens, il enregistrera encore toutes les informations de ces chiens dans des compartiments séparés en mémoire à long terme. Ces chiens seront associés au mot chien, mais seront stockés indépendamment : ils forment des exemplaires de la catégorie "chien".
La recherche sur la mémoire dite sémantique (celle des concepts et des faits) a longtemps mis l'accent sur une forme d'organisation bien précise : les '''classifications'''. Les concepts seraient ainsi classés dans des hiérarchies de catégories, spécifiques à un domaine ou une discipline. On peut voir le tout comme un système de poupées russes : les catégories plus spécifiques sont incluses, emboîtées dans les catégories plus générales du niveau supérieur de la hiérarchie. Les concepts les plus concrets sont situés près de la base de la hiérarchie et les plus abstraits en haut. On peut préciser que les exemples sont intégrés dans ces hiérarchies : ils sont situés tout en bas et sont vus comme des catégories très spécialisées. Une telle hiérarchie est appelée une '''structure cognitive'''. Elle relie des concepts en faisant appel à trois types différents de relations :
 
A chaque fois qu'on veut savoir si un objet appartient à une catégorie, le cerveau va "ouvrir" la catégorie, et vérifier tous les exemplaires. Si il trouve un exemplaire identique à ce qu'il perçoit, alors il reconnait l'objet. Sinon, l'objet n'est pas dans la catégorie.
* les '''hyperonymies''' vont relier les catégories à des catégories plus générales, qui englobent la catégorie de base : le concept « Cocker » sera relié au concept « Chien », le concept « Chat » sera relié au concept « Animal », etc ;
* les '''hyponymies''' vont relier chaque catégorie à ses catégories dérivées, les catégories plus concrètes qu'on obtient en spécialisant la catégorie avec l'ajout de propriétés : la catégorie « félins » sera reliée aux concepts de « chat », « tigre », « lion », « panthère », etc ;
* les '''relations structurales''', qui relient les catégories et exemples à leurs propriétés : c'est grâce à ces relations qu'on sait qu'un oiseau peut voler, qu'un canari est jaune, et ainsi de suite.
 
Visiblement, cette théorie prédit que la mémoire finit par se remplir à chaque fois qu'on croise un nouvel exemplaire d'un membre d'une catégorie. De plus, la catégorisation d'un objet prend énormément de temps et nécessite beaucoup de comparaisons.
Un des premiers modèles de la mémoire sémantique, le '''modèle de Collins et Quillian''' se basait exclusivement sur de telles structures cognitives. Celui-ci dit que les propriétés peuvent être communes. Par exemple, les concepts « oiseau » et « canari » partagent les propriétés suivantes : les deux peuvent voler, ont des plumes, des ailes, etc. Cela vient du fait qu'un canari est un oiseau, et qu'il hérite donc des propriétés communes à tous les oiseaux : toute sous-catégorie hérite des propriétés des catégories plus générales auxquelles elle est reliée. Le modèle gère ces propriétés héritées en ajoutant une hypothèse : l''''économie cognitive'''. Cette hypothèse dit que seules les propriétés spécifiques à un concept sont reliées à celui-ci : les propriétés héritées d'un concept plus générales sont reliées uniquement au concept le plus général, mais pas aux autres concepts. Par exemple, les propriétés « peut voler », « a des ailes », « a des plumes » seront reliées au concept « oiseau », mais pas au concept « canari ». Ce mécanisme évite les duplications inutiles de propriétés.
 
Dans les faits, cette théorie pose quelques problèmes, mais à quelques confirmations expérimentales. Il semblerait que l'humain utilise à la fois exemplaires et prototypes. Les catégories ayant beaucoup d’éléments utilisent des prototypes, tandis que les catégories utilisant peu d’éléments se contentent d'une liste d’exemplaires. Il semblerait que l'exemplaire soit le mécanisme de catégorisation principal chez les enfants en bas-age, avant d'être supplanté par la catégorisation par prototypes au cours de la croissance.
[[Fichier : Hierarchical Model Mental Lexicon.png|centre|Organisation des classifications en mémoire.]]
 
===RelationsThéories taxonomiqueshybrides===
 
D'autres théories mélangent les apports des deux théories précédentes, et supposent l'existence de plusieurs prototypes par catégories. Par exemple, la catégorie cuillère aurait deux prototypes : un pour les cuillères en bois (souvent longues), et un autre pour les "petites" et "moyennes" cuillères en métal. En tout cas, on est loin de la représentation des catégories par des règles, qui permettraient de définir si un objet appartient ou non à une catégorie. En somme, tenter de définir des catégories par des définitions, sans donner de nombreux exemples, est définitivement voué à l'échec.
Néanmoins, il est vite apparu que cette organisation rigide ne suffisait pas à rendre compte des résultats expérimentauxdans les tâches de '''décision lexicale'''. Le principe de ces expériences est simple : on donne une phrase à un cobaye, et il doit dire si celle-ci est vraie ou fausse. L'expérimentateur mesure le temps mis par le cobaye pour répondre : plus le temps mis à répondre est long, plus le cerveau a dû parcourir de nœuds dans la mémoire sémantique pour tomber sur le bon. De ces expériences, il ressort que plus un concept est familier, plus on peut vérifier les phrases qui y rapportent rapidement, sans que la position dans la hiérarchie taxonomique n'y change quoique ce soit. De plus, la hiérarchie est violée dans certains cas spécifiques. Par exemple, il est plus lent de vérifier la véracité de la phrase "un chien est un mammifère", que pour la phrase "un chien est un animal", alors que les théories hiérarchiques prédisent l'inverse. De nombreux phénomènes similaires ont étés documentés et seraient assez fréquents. Par exemple, le mot "canari" a tendance à évoquer le mot "cage" plus rapidement que le mot "être vivant". Ce qui est difficile à expliquer avec le modèle de collins et quillians.
 
Pour rendre compte de ce genre d'observations, on doit postuler que d’autres formes de relations existent. Par exemple, le modèle de Collins et Loftus ajoute des connexions entre catégories du même niveau (qui appartiennent au même concept superordonné), ainsi que des relations entre arbres taxonomiques. De nos jours, ces dernières relations portent le nom de sont regroupées, par convention, dans un ensemble extrêmement hétérogène appelé '''relations thématiques'''. Ces relations, avec les relations taxonomiques (catégorielles), permettent de former une représentation de situations ou d'évènements. Il peut s'agir de relations de causalité entre évènements, de relations qui permettent de localiser des objets, et bien d'autres encore.
 
===Double codage===
 
De plus, certains chercheurs considèrent que ce réseau conceptuel doit être complété par d'autres réseaux complémentaires, qui mémorisent non pas des connaissances, mais des informations sensorielles, visuelles, auditives, etc. Par exemple, la '''théorie du double-codage''' stipule que la mémoire contiendrait un réseau verbal, qui mémorise des concepts et des faits, et un réseau visuel, qui mémoriserait des images mentales ou des représentations visuelles. Cette théorie a été inventée pour expliquer les différences de mémorisation entre concepts concrets et abstraits. Expérimentalement, il est observé que les concepts concrets sont plus faciles à retenir que les concepts abstraits. Cela viendrait du fait que les concepts concrets sont généralement visualisables, contrairement aux concepts abstraits. On peut s'imaginer mentalement à quoi ressemble un chat, alors qu'il est plus difficile de donner une representation des concepts de liberté ou de justice (sauf par métaphore ou analogie). Ainsi, les concepts concrets seraient représentés dans les deux sous-réseaux, tandis que les concepts abstraits le seraient uniquement dans le réseau verbal. La redondance des concepts concrets/imaginables les rendrait plus mémorables. Nous verrons quelles sont les conséquences pédagogiques dans le chapitre sur les supports pédagogiques.