« Pour lire Platon/Guide des dialogues/Ménon » : différence entre les versions

Contenu supprimé Contenu ajouté
Aucun résumé des modifications
Aucun résumé des modifications
Ligne 3 :
{{en travaux}}
 
Ce dialogue met en scène Ménon et Socrate, et, brièvement, Anytos, futur accusateur de Socrate, ainsi qu'un esclave de Ménon. Ménon pose à Socrate la question suivante : la vertu peut-elle s'enseigner ? Question alors classique chez [[w:les sophistesSophiste|les sophistes]] qui se présentaient comme des maîtres de vertu et l'enseignaient. Ménon est fasciné par les sophistes et les rhéteurs. Il suit les cours de [[w:Gorgias|Gorgias]], célèbre rhéteur venu de Sicile. Il a reçu une éducation aristocratique traditionnelle et est l'enfant des préjugés de l'aristocratie.
Le dialogue va très vite basculer dans une impasse, Ménon ne supportant plus Socrate qu'il compare à un "taon" qui pique. Anytos passe en coup de vent et on devine qu'il va porter aux juges l'acte d'accusation contre Socrate.
 
Ligne 12 :
== La vertu peut-elle s'enseigner ? ==
 
Socrate précise qu'il faut savoir ce qu'on enseigne, avant de savoir si la vertu peut s'enseigner. Ménon, en grec, vient de "menein" , celui qui reste sur place. C'est le "demeuré" au sens de celui qui ne comprend rien. Il a existé : noble de Thessalie originaire de Pharsale, homme de haras, mercenaire des Perses. Platon joue sur l'étymologie pour ridiculiser le personnage. C'est le type même de l'élève qu'on ne parviendra jamais à "élever".
Socrate pose tout d'abord l'hypothèse que ce qui s'enseigne c'est la science. Ainsi, si la vertu peut s'enseigner, elle doit être une science. La méthode utilisée ici consiste donc à poser une hypothèse et à en examiner les conséquences ; la conséquence est ici que la vertu est une science. Cette conséquence est-elle absurde ?
 
{|class=wikitable
Pour le savoir, Socrate identifie le bon à l'utile (ou ''avantageux''), puis soutient que l'utile est déterminé par la sagesse. En effet, on ne dit pas qu'une personne fait preuve de courage mais de témérité quand ses actes sont irréfléchis. L'absence de sagesse dans les actes est donc nuisible ; sa présence est au contraire utile. Or la sagesse consiste à placer la pensée au principe de ses actions, c'est-à-dire à agir en connaissance de cause. Par conséquent, agir de manière avantageuse c'est agir en connaissance de cause.
|+L'ironie de Socrate
|<small> Jusqu'à présent, Menon, les Thessaliens étaient renommés entre les Grecs, et admirés pour leur adresse à manier un cheval et pour leurs richesses; [70b] mais aujourd'hui ils sont renommés encore, ce me semble, pour leur sagesse, principalement les concitoyens de ton ami Aristippe de Larisse (03). C'est à Gorgias que vous en êtes redevables ; car, étant allé dans cette ville, il s'est attaché par son savoir les principaux des Aleuades (04), du nombre desquels est ton ami Aristippe, et les pins distingués d'entre les Thessaliens. Il vous a accoutumés à répondre avec assurance et d'un ton imposant aux questions qu'on vous fait, comme il est naturel que [70c] répondent des gens qui savent, d'autant plus que lui-même s'offre à tous les Grecs qui veulent l'interroger, et qu'il n'en est aucun auquel il ne réponde sur quelque sujet que ce soit. Mais ici, cher Menon, les choses ont pris une face toute contraire. Je ne sais quelle espèce de sécheresse a passé sur la science, et il paraît qu'elle a quitté [71a] ces lieux pour se retirer chez vous. Du moins si tu t'avisais d'interroger de la sorte quelqu'un d'ici, il n'est personne qui ne se mît à rire, et te dît : Étranger, tu me prends en vérité pour un heureux mortel, de croire que je sais si la vertu peut s'enseigner, ou s'il est quelque autre moyen de l'acquérir; mais tant s'en faut que je sache si la vertu est de nature à s'enseigner ou non, que j'ignore même absolument ce que c'est que la vertu. [71b] Pour moi, Menon, je me trouve dans le même cas : je suis sur ce point aussi indigent que mes concitoyens, et je me veux bien du mal de ne savoir absolument rien de la vertu. Or, comment pourrais-je connaître les qualités d'une chose dont j'ignore la nature? Te paraît-il, possible que quelqu'un qui ne connaît point du tout la personne de Menon sache s'il est beau,
riche, noble, ou tout le contraire ? Crois-tu que cela se puisse ?
 
MENON.
 
Non. Mais est-il bien vrai, Socrate, [71c] que tu ne sais pas ce que c'est que la vertu ? Est-ce là ce que nous publierons de toi à notre retour chez nous ?
 
SOCRATE.
 
Non seulement cela, mon cher ami, mais ajoute que je n'ai encore trouvé personne qui le sût, à ce qu'il me semble.
 
MENON.
 
Quoi donc ! n'as-tu point vu Gorgias lorsqu'il était ici?
 
SOCRATE.
 
Si fait.
 
MENON.
 
Tu as donc jugé qu'il ne le savait pas?
 
SOCRATE.
 
Je n'ai pas beaucoup de mémoire, Menon ; ainsi je ne saurais te dire à présent quel jugement je portai alors de lui. Mais peut-être sait-il ce que c'est que la vertu, et sais-tu toi-même ce qu'il disait. [71d] Rappelle-le-moi donc; ou, si tu l'aimes mieux, parle-moi pour ton propre compte : car tu es sans doute là-dessus du même sentiment que lui.
 
page 141
 
MENON.
 
Oui.</small>
 
|}
 
Ménon conclut alors de lui-même que la vertu peut s'enseigner, puisque la sagesse est une connaissance de l'avantageux et que cette connaissance est au principe de l'action vertueuse. Socrate n'est cependant pas d'accord et objecte le constat que l'on ne trouve pas de maîtres de vertu. Or, si la vertu s'enseigne, il devrait y en avoir.