« Pour lire Platon/Études de quelques passages des dialogues » : différence entre les versions
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Cette lettre est une réflexion de Platon sur le gouvernement juste à partir de l’expérience qu’il a faite de l’injustice lors du procès de Socrate. La réflexion naît du choc de l’expérience vécue. Dans cette lettre autobiographique écrite au soir de sa vie, Platon nous raconte comment la mort de Socrate l’a détourné de la politique et poussé vers la philosophie. Le texte se compose de trois moments : dans un premier temps, Platon rappelle les faits : la mort de Socrate, une mort injuste dont la démocratie est responsable; puis dans un second moment, il entreprend une critique radicale du régime politique de toutes les Cités ; enfin dans un dernier temps, il pose par une métaphore médicale ce qui lui semble juste comme régime politique. Le texte passe ainsi du fait, ce qui s’est passé, au droit, ce qui devrait être.
Dans le second moment du texte, Platon élargit la problématique. Il n’y a pas que la démocratie qui est impuissante à penser la justice. « Toutes les cités existant à l’heure actuelle, je me dis que toutes sans exception, ont un mauvais régime. » Par cette phrase Platon manifeste une certaine radicalité : aucun régime politique n’est capable de rendre justice, à moins que, comme il le dit fort ironiquement, le hasard ne fasse bien les choses « Sous de favorables auspices. » Autant dire qu’il y a fort peu de chances qu’un tel régime existe. Il s’agit donc de repenser le régime politique capable d’instituer des lois au service de la justice. Pour Platon, il faut trouver le remède, le bon régime au sens médical du terme, car la maladie n’est que « quasi-incurable ». Le philosophe se fait médecin. Il reste donc une chance de trouver une solution, mais cette dernière doit se réfléchir avant toute action. Aristote réfutera cette thèse de Platon dans les Politiques ou l’ Ethique à Nicomaque . Pour lui, la politique n’est pas affaire de science : on peut être un grand savant sans pour autant savoir comment agir. Dans un autre ordre d’idée, on peut être un grand architecte sans savoir pour autant construire une maison. Il y a une distinction très nette chez Aristote entre la Theoria (la science) et Poiesis (savoir-faire). On n’est pas artisan parce que l’on a des connaissances. De même, dans le champ politique, ce n’est pas parce que l’on a des connaissances sur la justice, qu’on saura forcement les appliquer dans le champ pratique (Praxis). La politique pour Aristote n’est pas une affaire de connaissances (il n’aurait pas apprécié l’expression Science-Po) mais de prudence. L’homme politique est celui qui pense les moyens de l’action et non une théorie de l’action. Platon est effectivement bien loin d’une telle conception. S’il est anti-démocrate, comme nous l’avons plusieurs fois souligné, il n’en est pas moins opposé aux régimes monarchiques, aristocratiques ou oligarchiques ambiants. Le fait ne fait pas le droit. Aucun régime existant ne correspond à un régime réellement juste, faute d’avoir réfléchi le sens du mot « juste ». Le mot ne fait pas le concept.
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