« Grec ancien/Texte : De l'art » : différence entre les versions

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Mais l’on va m’objecter que beaucoup de malades ont été guéris sans avoir recours au médecin : je ne nie pas cela, je crois même qu’il est très possible de se rencontrer avec la médecine sans se servir de médecin ; non pas qu’on puisse discerner dans cet art ce qui est convenable de ce qui ne l’est pas, mais il peut arriver qu’on emploie les mêmes remèdes qui auraient été prescrits si on avait fait venir un médecin. Ceci est déjà une grande preuve de la réalité de l’art ; si réel et si grand que ceux mêmes qui ne croient pas à son existence lui sont redevables de leur salut. De toute nécessité, les personnes malades et guéries sans avoir eu recours au médecin, savent qu’elles ont été guéries en faisant ou en évitant telle ou telle chose, car c’est l’abstinence ou l’abondance des boissons et de la nourriture, l’usage ou le non usage des bains, la fatigue ou le repos, le sommeil ou la veille, ou le concours de toutes ces choses qui les a guéries. De plus, quand ils étaient soulagés, il leur a fallu de toute nécessité pouvoir discerner ce qui les soulageait, comme aussi ce qui leur nuisait quand ils étaient incommodés. Il n’est pas à la vérité donné à tout le monde de déterminer parfaitement ce qui nuit ou ce qui soulage ; mais le malade qui sera capable de louer ou de blâmer [avec discernement], quelque chose du régime qui l’a guéri, trouvera que tout cela est de la médecine. Les fautes mêmes n’attestent pas moins que, les succès toute la réalité de l’art : telle chose a soulagé, c’est qu’elle a été administrée à propos ; telle autre a nui, c’est qu’elle n’a pas été administrée à propos. Quand le bien et le mal ont chacun leurs limites tracées, comment cela ne constitue-t-il pas un art ? Je dis qu’il n’y a pas d’art là où il n’y a rien de bien ni rien de mal ; mais quand ces deux choses se rencontrent à la fois, il n’est pas possible que ce soit le produit de l’absence de l’art.
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Ἔτι τοίνυν εἰ μὲν ὑπὸ φαρμάκων τῶν τε καθαιρόντων καὶ τῶν ἱστάντων ἡ ἴησις τῇ τε ἰητρικῇ καὶ τοῖσιν ἰητροῖσι μοῦνον ἐγίνετο, ἀσθενὴς ἦν ἂν ὁ ἐμὸς λόγος· νῦν δὲ δὴ φαίνονται τῶν ἰητρῶν οἱ μάλιστα ἐπαινεόμενοι καὶ διαιτήμασιν ἰώμενοι καὶ ἄλλοισί γε εἴδεσιν, ἃ οὐκ ἄν τις φαίη, μὴ ὅτι ἰητρὸς, ἀλλ´ οὐδὲ ἰδιώτης ἀνεπιστήμων ἀκούσας, μὴ οὐ τῆς τέχνης εἶναι. Ὅπου οὖν οὐδὲν οὔτε ἐν τοῖς ἀγαθοῖσι τῶν ἰητρῶν οὔτε ἐν τῇ ἰητρικῇ αὐτῇ ἀχρεῖόν ἐστιν, ἀλλ´ ἐν τοῖσι πλείστοισι τῶν τε φυομένων καὶ τῶν ποιευμένων ἔνεστι τὰ εἴδεα τῶν θεραπειῶν καὶ τῶν φαρμάκων, οὐκ ἔστιν ἔτι οὐδενὶ τῶν ἄνευ ἰητροῦ ὑγιαζομένων τὸ αὐτόματον αἰτιήσασθαι ὀρθῷ λόγῳ· τὸ μὲν γὰρ αὐτόματον οὐδὲν φαίνεται ἐὸν ἐλεγχόμενον· πᾶν γὰρ τὸ γινόμενον διά τι εὑρίσκοιτ´ ἂν γινόμενον, καὶ ἐν τῷ διά τι τὸ αὐτόματον οὐ φαίνεται οὐσίην ἔχον οὐδεμίην, ἀλλ´ ἢ οὔνομα μοῦνον· ἡ δὲ ἰητρικὴ καὶ ἐν τοῖσι διά τι καὶ ἐν τοῖσι προνοουμένοισι φαίνεταί τε καὶ φανεῖται αἰεὶ οὐσίην ἔχουσα.
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Toutefois, s’il n’y avait dans la médecine et entre les mains des médecins d’autre mode de traitement que l’usage des remèdes purgatifs et resserrants, mes paroles auraient très peu de poids ; mais on voit les médecins les plus renommés guérir, soit par le régime, soit par d’autres moyens tels, qu’il n’est, je ne dis pas un médecin, mais pas même un individu quelconque, si ignorant qu’il soit de la médecine, qui ose soutenir que là il n’y ait point d’art. Si donc il n’est rien d’inutile entre les mains des médecins habiles et dans la médecine elle-même, si dans la plupart des plantes et des préparations artificielles on rencontre des espèces de remèdes et des moyens de traitement, il n’est plus possible aux malades guéris sans médecins de croire raisonnablement leur guérison spontanée : car alléguer la spontanéité, c’est ne rien dire ; en effet, dans tout ce qui arrive on trouvera qu’il y a un pourquoi cela arrive, et que c’est dans son pourquoi qu’existe la chose elle-même. Ce qu’on appelle spontané n’a aucune réalité substantielle, mais seulement un nom. La médecine, au contraire, consiste réellement dans le pourquoi et dans la prévoyance des effets : aussi apparaît-elle et apparaîtra-t-elle toujours comme ayant une réalité. Voilà ce qu’on pourrait répondre à ceux qui disputent les guérisons à l’art pour les attribuer à la fortune.
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Ainsi, pour les maladies externes, l’art doit être riche en ressources ; cependant dans celles qui sont moins évidentes il ne doit pas en manquer complètement ; ces dernières maladies sont celles qui ont rapport aux os et aux cavités, et le corps n’en a pas seulement une, mais plusieurs. Deux de ces cavités reçoivent et rendent les aliments. Un plus grand nombre d’autres ne sont connues que de ceux qui en ont fait un objet d’études spéciales. Tout membre entouré de chair arrondie, appelée muscle, renferme une cavité. Toute partie qui n’est pas d’adhérence naturelle, qu’elle soit recouverte de chair ou de peau, est creuse et remplie de pneuma dans l’état de santé, d’ichor dans l’état de maladie. Les bras ont une chair semblable, les jambes en ont également, et les cuisses aussi. On démontre l’existence de ces interstices aussi bien sur les parties dépourvues de chair que sur les parties charnues. Tels sont le thorax, qui recouvre le foie ; le globe de la tête, où réside l’encéphale ; le dos, qui répond au poumon. Il n’est pas une seule de ces parties qui n’ait un vide, divisé par une multitude de cloisons presque semblables à des vaisseaux et contenant des matières utiles ou nuisibles. Il y a d’ailleurs une infinité de vaisseaux et de nerfs qui n’étant point au milieu des chairs, mais étendus le long des os, forment les ligaments des articulations. Or les articulations [sont des espaces] dans lesquels se meuvent des têtes d’os jointes ensemble ; il n’en est aucune qui n’offre une apparence écumeuse, qui ne présente dans son intérieur des anfractuosités que l’ichor (synovie) rend évidentes ; lorsque ces articulations sont ouvertes, l’ichor s’échappe avec abondance et en causant de vives douleurs.
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Ἰητρικὴ δὲ, τοῦτο μὲν τῶν ἐμπύων, τοῦτο δὲ τῶν τὸ ἧπαρ ἢ τοὺς νεφροὺς, τοῦτο δὲ τῶν ξυμπάντων ἐν τῇ νηδύϊ νοσεύντων ἀπεστερημένη τι ἰδεῖν ὄψει, ᾗ τὰ πάντα πάντες ἱκανωτάτως ὁρῶσιν, ὅμως ἄλλας εὐπορίας συνεργοὺς ἐφεῦρε, φωνῆς τε γὰρ λαμπρότητι καὶ τρηχύτητι, καὶ πνεύματος ταχυτῆτι καὶ βραδυτῆτι, καὶ ῥευμάτων, ἃ διαῤῥεῖν εἴωθεν, ἑκάστοισι, δι´ ὧν ἔξοδοι δέδονται, ὧν τὰ μὲν ὀδμῇσι, τὰ δὲ χροίῃσι, τὰ δὲ λεπτότητι καὶ παχύτητι διασταθμωμένη τεκμαίρεται, ὧν τε σημεῖα ταῦτα, ἅ τε πεπονθότων, ἅ τε παθεῖν δυναμένων. Ὅταν δὲ ταῦτα [μὴ] μηνύωνται, μηδ´ αὐτὴ ἡ φύσις ἑκοῦσα ἀφίῃ, ἀνάγκας εὕρηκεν, ᾗσιν ἡ φύσις ἀζήμιος βιασθεῖσα μεθίησιν· ἀνεθεῖσα δὲ δηλοῖ τοῖσι τὰ τῆς τέχνης εἰδόσιν, ἃ ποιητέα. Βιάζεται δὲ τοῦτο μὲν πῦρ τὸ σύντροφον φλέγμα διαχέειν σιτίων δριμύτητι καὶ πομάτων, ὅκως τεκμαρεῖταί τι ὀφθὲν περὶ ἐκείνων, ὧν αὐτῇ ἐν ἀμηχάνῳ τὸ ὀφθῆναι ἦν· τοῦτο δ´ αὖ πνεῦμα ὧν κατήγορον, ὁδοῖσί τε προσάντεσι καὶ δρόμοις ἐκβιᾶται κατηγορέειν· ἱδρῶτάς τε τούτοισι τοῖσι προειρημένοισιν ἄγουσα, ὑδάτων θερμῶν ἀποπνοίῃσι πυρὶ ὅσα τεκμαίρονται, τεκμαίρεται. Ἔστι δὲ ἃ καὶ διὰ τῆς κύστιος διελθόντα ἱκανώτερα τὴν νοῦσον δηλῶσαί ἐστιν, ἢ διὰ τῆς σαρκὸς ἐξιόντα. Ἐξεύρηκεν οὖν καὶ τοιαῦτα πόματα καὶ βρώματα, ἃ τῶν θερμαινόντων θερμότερα γιγνόμενα τήκει τε ἐκεῖνα καὶ διαῤῥεῖν ποιέει, ἃ οὐκ ἂν διεῤῥύη μὴ τοῦτο παθόντα. Ἕτερα μὲν οὖν πρὸς ἑτέρων, καὶ ἄλλα δι´ ἄλλων ἐστὶ τά τε διιόντα τά τ´ ἐξαγγέλλοντα, ὥστ´ οὐ θαυμάσιον αὐτῶν τάς τε ἀπιστίας χρονιωτέρας γίνεσθαι τάς τ´ ἐγχειρήσιας βραχυτέρας, οὕτω δι´ ἀλλοτρίων ἑρμηνειῶν πρὸς τὴν θεραπεύουσαν ξύνεσιν ἑρμηνευομένων.
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Quant à la médecine, dans les empyèmes, dans les maladies du foie ou dans celles des reins et dans toutes celles des cavités, ne pouvant faire d’observations directes (et cela est très évident pour tous), elle appelle en aide d’autres ressources ; elle interroge la clarté et la rudesse de la parole, la lenteur ou la célérité de la respiration, la nature des flux qui sont habituels à chacun et qui s’échappent par telle ou telle voie ; elle les étudie par l’odeur, la couleur, la ténuité, la consistance ; elle pèse la valeur de ces signes qui lui font reconnaître les parties déjà lésées et deviner celles qui pourront le devenir. Quand ces signes ne se montrent pas et que la nature ne les manifeste pas d’elle-même, le médecin a trouvé des moyens de contrainte à l’aide desquels la nature innocemment violentée produit ces signes. Ainsi excitée, elle montre au médecin habile dans son art ce qu’il doit faire. Tantôt, par l’acrimonie des aliments solides et des boissons, il force la chaleur innée à dissiper au dehors une humeur phlegmatique, en sorte qu’il distingue quelqu’une des choses qu’il s’efforçait de reconnaître ; tantôt, par des marches dans des chemins escarpés ou par des courses, il force la respiration de lui fournir des indices certains des maladies ; enfin en provoquant la sueur il jugera la nature de la maladie par celle des humeurs chaudes exhalées. Les matières excrétées par la vessie donnent plus de lumières sur les maladies que les matières excrétées par les chairs. La médecine a aussi découvert certains aliments et certaines boissons qui développant plus de chaleur que les matières dont le corps est échauffé, en déterminent la fonte et l’écoulement, ce qui n’aurait pas lieu si elles n’étaient pas soumises à l’action [de ces aliments et de ces boissons]. Toutes ces choses, qui réagissent les unes sur les autres et les unes par les autres, traversent le corps et dévoilent la maladie. Ne vous étonnez donc pas que le médecin apporte tant de lenteur à asseoir son jugement sur une maladie, tant de circonspection pour en entreprendre le traitement, puisqu’il n’arrive que par des voies si éloignées et si étrangères à la connaissance parfaite de la thérapeutique.
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