Mémoire/Mémoires sensorielles
Mémoire échoïque
modifierÀ côté de la mémoire iconique, on trouve la mémoire échoïque, qui stocke temporairement les sons que l'on entend. Son nom vient de "écho", qui a un rapport avec le "son".
Mise en évidence
modifierLa mise en évidence de la mémoire échoïque a nécessité quelques expériences assez simples. Les premières expériences sont des expériences dichotiques, qui se basent sur l'écoute simultanée de deux bandes sonores. On fait écouter à des cobayes deux bandes sonores différentes, une dans chaque oreille, et on leur demande de se concentrer sur une seule des deux bandes. Dans ces conditions, les cobayes arrivent à filtrer les informations, et arrivent à ne garder que la bande sonore voulue.
Toutefois, si jamais un mot familier ou vraiment différent du contenu de la bande est prononcé sur la bande sonore à ne pas écouter, le cobaye s'en rendra compte et son attention se focalisera sur la bande sonore à rejeter. C'est le fameux effet cocktail party : vous arrivez à suivre une conversation dans un endroit bruyant, mais votre cerveau reste malgré tout sensible aux bruits extérieurs. Si on appelle votre nom dans un brouhaha (pas trop fort), votre attention pourra alors être détournée de la conversation que vous tenez vous voir si vous êtes concerné par l'appel.
Tout se passe comme si les informations étaient stockées dans une mémoire sensorielle de faible durée, totalement inconsciente. L'attention se charge alors de faire le tri des informations sensorielles dans cette mémoire pré-attentive et fait remonter les informations pertinentes à la conscience.
Capacité
modifierAutre expérience : découpez un message audio, et répartissez les morceaux sur les deux bandes sonores de telle sorte que : lorsque l'une contient une portion du message, l'autre contient tout autre chose. Les cobayes seront capables de reconstituer le message dans son intégralité. Cette mémoire ne contient donc pas les sons complets, assemblés par le système auditif linéairement, mais de vrais segments de sons, qui auraient plus ou moins une signification.
Cette mémoire échoïque a donc une certaine capacité, tout comme la mémoire visuelle. Différents tests ont été effectués pour tester cette capacité, et il semblerait qu'elle puisse mémoriser plus d'une dizaine de "morceaux", de segments de sons.
Contenu
modifierSi on reprend les expériences du dessus, mais cette fois-ci en superposant les sons du message oral, on constate que les cobayes ont beaucoup plus de mal à reproduire le message initial. Tout se passe comme si les deux segments interféraient. Cela pousse certains à penser que les informations dans la mémoire échoïque contiendraient des informations sur le sens de ce qui est entendu.
Certains pensent toutefois que cette mémoire contient des informations sonores plutôt brutes, sans signification. La preuve a été apportée par les expériences dichotiques. Prenez un cobaye, auquel vous faite écouter une bande sonore différente sur les deux oreilles. Cette bande sonore contient des mots, des lettres, des chiffres. Ces mots, chiffres, lettres sont prononcés les uns à la suite des autres, séparés par un intervalle de temps bien précis. Ensuite, on interrompt la bande sonore, et on demande au cobaye des informations sur le dernier son entendu sur une des deux bandes. Les taux de rappels sont plus élevés quand on demande la localisation du son (oreille droite ou gauche) que quand on interroge sur cobaye sur la catégorie (chiffre, lettre, mot).
Ce phénomène d'interférence a aussi été observé pour des sons similaires acoustiquement, mais sans grande signification. Pour mettre en évidence ce phénomène d'interférence, il suffit d'effectuer des expériences dichotiques avec des segments de sons sans signification : du bruit blanc, par exemple. Les cobayes ont alors beaucoup plus de mal à se rappeler les sons similaires s'ils sont écoutés au même moment, même si ces sons ne sont pas suffisamment proches pour générer des confusions. Mieux : plus les sons sont proches, plus le rappel simultané des deux sons est difficile.
Durée de rétention
modifierSa durée de rétention est nettement plus longue que pour la mémoire iconique. On peut estimer celle-ci avec les expériences dichotiques. Pour cela, il suffit de faire varier l'intervalle entre deux présentations d'un mot/chiffre/lettre sur chaque bande. Suivant les expériences, la durée de rétention varie entre deux et quatre secondes.
Une autre série d'expériences consiste à demander à deux cobayes de dire si deux voyelles prononcées consécutivement sont identiques ou différentes. Plus le temps entre la prononciation des deux voyelles est long, plus les cobayes ont du mal à faire la différence. Dans ces conditions, on remarque que les voyelles séparées par moins d'une seconde ont un taux de rappel identique. Le taux de rappel diminue ensuite, pour se stabiliser après quatre secondes de séparation.
Cette durée de rétention varie suivant les personnes. De plus, elle augmente progressivement lors de l'enfance, et finit par se stabiliser assez rapidement vers six ans. Par la suite, elle reste stable, même chez les personnes âgées.
La mémoire échoïque est donc très utile dans la compréhension de la parole. Quand votre interlocuteur parle, celui-ci va émettre des sons à un certain rythme, plus ou moins rapide. Pour identifier tous les sons qui forment un mot, ces sons doivent être assemblés ensemble : la mémoire échoïque permet de conserver les sons prononcés durant un temps suffisamment long pour permettre leur assemblage.
D'ailleurs, cette durée de rétention joue un rôle dans l'apprentissage du langage : une faible durée de rétention chez les enfants est corrélée à de faibles capacités d'apprentissage de la langue maternelle.