Les ressorts/Lois de comportement

Bien que le comportement linéaire soit le plus fréquemment recherché, par facilité ou pour de vrais impératifs techniques, les lois qui relient les déformations globales des ressorts aux efforts qui leur sont appliqués sont beaucoup plus variées que ce que l'on pense généralement ; tout l'art des concepteurs et des fabricants de ressorts consiste à les adapter le mieux possible aux besoins !

LES RESSORTS




Dans le cas du comportement linéaire, la courbe qui représente le résultat de sa déformation d'ensemble (translation ou rotation) en fonction de l'effort appliqué (force ou moment) est une droite. La flèche f ou la rotation θ est alors proportionnelle à la force P ou au couple C qui l'a provoquée.

La raideur d'un ressort est définie comme le quotient :

  • en N·m-1 dans le cas d'une force,
  • en N·m·rad-1 dans le cas d'un couple.

Une raideur indépendante de la charge correspond au comportement linéaire décrit par la loi de Hooke.

L'inverse de la raideur, 1/k, est la souplesse ou compliance.

Nota : ne pas confondre les deux termes raideur et rigidité. Même s'ils sont plus ou moins interchangeables dans le langage courant, du point de vue technique la raideur s'applique aux pièces tandis que la rigidité caractérise les matériaux.



Les comportements des ressorts


Comportement vraiment linéaire :
oublions les idées reçues, il est « l'exception qui confirme la règle ».
► Les ressorts les plus proches de ce modèle sont la barre de torsion et le ressort spiral à grand nombre de spires encastré aux extrémités. Ce dernier fut largement utilisé en horlogerie et pour la construction d'instruments de mesure. Sa fabrication très spéciale nécessite un savoir-faire qui relève souvent du secret industriel. Peu d'entreprises sont aujourd'hui capables de fournir des ressorts spiraux de qualité.
► Le dictionnaire dont provient la gravure date de 1883, la montre du début du XXe siècle (Tribaudeau à Besançon, spiral Breguet), sont de précieux souvenirs de famille. On notera le dispositif qui permet de modifier la fréquence des oscillations du balancier en réglant la longueur libre du ressort.

Comportement « à peu près linéaire » :
c'est celui de très nombreux ressorts industriels.
La loi de Hooke s'applique assez bien aux petits volumes élémentaires de matière qui constituent les ressorts mais, sauf exceptions, elle rend compte très mal (ou pas du tout) de leur comportement global. Ainsi, par exemple, la raideur d'un ressort de traction augmente quand le fil se redresse.
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Il existe une énorme dispersion des caractéristiques mécaniques lors des fabrications en série. Pour les ressorts hélicoïdaux, les plus courants, le simple fait de changer de botte de fil machine peut engendrer des variations considérables de la longueur, du diamètre d'enroulement et surtout de la raideur. Dans un lot de ressorts de qualité courante théoriquement identiques, il n'est pas rare de voir celle-ci varier de 20 % en plus ou en moins par rapport à la moyenne. Dans ces conditions, un défaut de linéarité de 5 % devient négligeable ...

► En fait, pour beaucoup d'applications, on n'a pas besoin d'une loi de déformation précise et par facilité on choisit la loi linéaire, qui est la plus simple, sans se poser trop de questions.




Comportement « à peu près linéaire décalé » :
il est bien illustré par le ressort hélicoïdal de traction à spires jointives : une torsion du fil lors de l'enroulement fait que les spires s'appliquent fortement les unes contre les autres, il faut donc exercer une force de traction suffisante pour que le ressort commence à s'allonger comme un ressort à spires non jointives ; cette solution permet de diminuer notablement l'encombrement.
Comportement délibérément non linéaire :
bien des ressorts présentent une raideur variable en fonction de la charge qu'on leur applique.
Ainsi, plus les ressorts tronconiques s'affaissent, plus ils « durcissent ». Les spires de plus grand diamètre sont les plus souples, elles s'écrasent les premières et dans certaines configurations, on obtient un enroulement spiralé de très faible encombrement sous la charge maximale.


Comportement « neutre » ou « négatif » :
on l'obtient avec des bandes précontraintes enroulées très serrées et qui deviennent de moins en moins raides, ou de plus en plus souples, à mesure qu'on les déroule.
Le comportement neutre peut servir à équilibrer des charges, le ressort fournit alors un effort constant dans toutes les positions. Le comportement négatif est par essence instable ; la force de rappel donnée par un aimant permet d'en percevoir le principe.
► Si l'on veut décoller le barreau en imposant la force, rien ne se passe tant que l'on n'a pas atteint une certaine valeur, puis le décollement se produit et le mouvement devient soudain incontrôlable car l'action de l'aimant diminue très vite quand l'entrefer augmente.
► Si l'on opère au contraire en imposant le déplacement du barreau grâce à un système rigide, alors la force de rappel donnée par l'aimant devient une fonction définie de l'entrefer et l'on peut représenter sa variation.
Beaucoup de mécanismes ont un fonctionnement très différent selon qu'on leur impose une force ou un déplacement.
Comportement variable :
on peut obtenir toutes sortes de relations entre les efforts et les changements de forme.

► Les touches des claviers informatiques et les boutons des souris nous en fournissent un excellent exemple. Toute manœuvre doit provoquer un contact net et sans rebond, de manière à envoyer une impulsion électrique précise et unique. Pour cela, les touches et les boutons offrent d'abord une certaine résistance à la pression avant de céder brutalement et de s'enfoncer sans rebondir.
► On voit en haut à droite le clavier d'une calculette, constitué d'une seule pièce d'élastomère moulée ; les touches sont reliées à la plaque de base par une mince paroi élastique en forme de tronc de pyramide visible sur les différentes photos. Sur la troisième photo, on voit aussi les pastilles noires conductrices qui établissent le contact directement sur un circuit imprimé. La vue tout en bas est faite par transparence, les zones claires montrent que la paroi mince est translucide.
► Lorsque l'on presse une touche, cette paroi résiste d'abord à la manière d'une voûte, puis cède brutalement. On dit qu'elle « flambe ». Ainsi, le mouvement par lequel le contact est établi est toujours franc, l'effort qui suffit à maintenir une touche enfoncée est inférieur à celui qui provoque le flambement ; la courbe caractéristique de ce « ressort » montre d'abord un comportement « positif » qui se transforme, à partir d'un certain seuil, en comportement « négatif ».

► Loin d'être rare, ce comportement est au contraire la règle dans tous les systèmes qui ouvrent ou ferment des contacts électriques, et il existe de très nombreuses manières de l'obtenir.







Comportement irréversible : prenons pour exemple une calotte sphérique en tôle mince, de faible courbure, retenue à sa périphérie dans un montage.
► En exerçant selon son axe une force qui tend à l'aplatir, on produit un affaissement qui disparaît si l'on cesse d'agir. Le processus est alors réversible puisque le système revient à sa position première après disparition de la cause qui l'en avait écarté.
► En poussant plus fort, on atteint un seuil à partir duquel la calotte se déforme de plus en plus aisément et si l'on dépasse le point où elle devient plane, sa courbure change subitement de sens avec émission d'un claquement caractéristique. L'énergie dépensée pour aplatir la calotte est entièrement perdue lors de cette déformation très brutale. Le comportement est devenu irréversible, puisque le retour à la position initiale ne se produit plus lorsque l'on cesse d'appliquer l'effort. Nulle part, cependant, le matériau n'a atteint sa limite d'élasticité.
► Naturellement, ce phénomène peut être reproduit dans l'autre sens. Ce système possède deux configurations stables et l'on peut en imaginer de plus complexes.
► En imposant non pas l'effort, mais la flèche de la calotte, on peut tracer une courbe donnant l'effort obtenu en fonction du déplacement.
► De tels dispositifs, qui comportent presque toujours un organe élastique travaillant au flambage, sont largement utilisés dans les systèmes de régulation. La calotte peut aussi être découpée dans une bilame obtenue en soudant à pleine surface deux tôles de coefficients de dilatation très différents ; ses changements de courbure peuvent alors intervenir sous l'effet des variations de température, conjuguées ou non avec d'autres actions mécaniques.
Le fameux criquet que les troupes états-uniennes utilisaient en 1944 pour se reconnaître dans la nuit du bocage normand émettait des claquements grâce à une portion de lame élastique changeant brutalement de courbure.


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