Habitation éconologique/Isolation
Isolation des bâtiments
modifierLa question du choix de l'isolant et de sa mise en œuvre est délicate. Les remarques qui suivent sont des propos personnels qui ne reflètent pas l'opinion générale des mouvements écologiques.
La première raison d'isoler (bien) un bâtiment est d'arrêter de foutre la planète en l'air. Les autres sont bien sûr de bénéficier d'un confort correct et de ne pas payer trop cher en énergie.
Un peu de théorie thermique
modifierL'isolation d'une paroi sert à bloquer au maximum le transfert de chaleur de la partie chaude (intérieur) vers la partie froide (extérieur). On va parler de résistance thermique (symbolisé par la lettre R) ou de coefficient de conduction thermique (symbolisée par la lettre U) qui est l'inverse de la résistance (U = 1/R). Plus une paroi est résistante, plus son chiffre R est élevé et moins elle laisse passer de chaleur (le U sera d'autant plus faible). Un plafond bien isolé a un R=5, un mur a un R=2,5 etc.
La résistance thermique d'une paroi va être la somme de la résistance thermique des différents composants qui structurent la paroi + une constante qui varie selon l'inclinaison du flux de chaleur. La résistance thermique d'une paroi dépend de son épaisseur (en mètre) et de sa conductivité thermique (symbolisé par la lettre lambda) : R = épaisseur / conductivité. Plus le lambda est faible, meilleur est l'isolant. Donc pour augmenter la résistance, il faut soit augmenter l'épaisseur de l'isolant, soit sa qualité (diminuer le lambda). Aujourd'hui, la plupart des matériaux qui font office d'isolant sur le marché ont des lambda entre 0,03 et 0,05.
Le coefficient de conduction thermique U est exprimé en W/m2 x K. Si on a une résistance de 2, le U sera de 0,5 : ce qui signifie que la paroi laissera passer un demi watt par m2 et par degré d'écart entre l'intérieur et l'extérieur de la paroi. Ce mur de 60 m2 par une température de extérieure de 9°c versus 19°C intérieure laissera donc passer 300 watts (0,5 x 60 x 10). Ce qui en fait une ampoule halogène !
Épaisseur
modifierPour bien isoler aujourd'hui, on a pas le choix, il faut de l'épaisseur [1] [2] [3] , et avec un matériau le moins conducteur possible (tous se trouvent dans une fourchette assez étroite, lambda de 0.029 à 0.050). La plupart du temps, les particuliers ou les professionnels mettent une épaisseur modérée du matériau qui leur plaît. Or cette épaisseur « raisonnable » est choisie en fonction des habitudes, et évaluée sur une rentabilité économique « raisonnable ». Une isolation va durer entre 30 et 50 ans ; il faudrait en toute logique calculer la rentabilité sur un prix médian des énergies sur cette période (mais personne ne sait prévoir, donc on ne prévoit pas). Dans des pays un peu à l'est, on met jusqu'à 60 cm en toit et jusqu'à 40 cm en murs. Certes il y fait plus froid, mais les prévisions pour chez nous (baisse du Gulf Stream) vont peut-être changer la donne.
Matériaux
modifierIl y a les matériaux plutôt High Tech comme des mousses de synthèse (PSE, PU) ou de verre à fort pouvoir isolant (0.029). Des matériaux classiques (PSE, laines minérales) ou dits « Bio » (laines de lin, de chanvre, panneaux de fibres de bois, panneaux de laine de bois, cellulose en vrac) avec des niveau de l'ordre de 0.040. Des matériaux moins classiques comme la laine de mouton, le liège, … ou en neuf des solutions techniques plus ou moins isolantes (bois massif + feutre de bois, monomurs de briques, de béton cellulaire, monomurs de ballots de paille. [4] ....). Les solutions comme la bauge ou autres ne sont pas des solutions d'isolation, mais de régulation et de confort et nécessiteraient un matériau complémentaire pour obtenir une isolation correcte.
De ce qui précède, on peut déduire que dans beaucoup de cas on a des solutions très variables et que le choix (outre le bon choix de mise en œuvre) devra être fait sur les paramètres coût environnemental et coût financier. J'ai eu plusieurs fois à faire à des maîtres d'ouvrage qui voulaient des matériaux « naturels » [5] mais qui, face au prix, ont choisi de mettre des épaisseurs minimales (souvent en deçà des RT2000 au autres). D'autres ont, qui plus est, choisi le liège, matière rare et chère qui manque déjà pour des usages plus nobles.
Alors, à ta question j'aurais tendance à répondre qu'il faut choisir d'abord un niveau d'isolation qui est fonction de la place disponible, du choix en mode de chauffage [6] , et qu'ensuite tu choisisses le produit en fonction de ce que tu peux te payer, en restant, je me répète, très vigilante à la mise en œuvre (pare-vapeur, ponts, ...). Si ton budget est limité, ou que tu préfères l'optimiser, la laine de roche (basalte + énergie + résine), PAS la laine de verre dans laquelle certains se sont amusé à mettre des déchets radioactifs, me paraît être le compromis le plus intéressant dans l'existant en sous toiture.
Notes
modifier- ↑ Il y a bien sûr d'autres paramètres comme la température des parois (le confort thermique est entre autres une résultante de la température de l'air et celle des parois), l'inertie, la gestion de l'hygrométrie (qui joue bien moins sur le confort qu'on ne le croit sauf en températures très élevées), les micros courants d'air (un déplacement d'air de 10 cm/seconde impose une température de 2°C supérieure pour obtenir un même confort).
- ↑ Exemple : le plancher chauffant basse température ; pour un même confort la pièce est moins chauffée et donc les déperditions sont moindres (on commence en Allemagne à faire des bâtiments avec plancher chauffant plus murs chauffants dans les mêmes pièces), conséquence une baissée de consommation de 15 à 25% ou mieux).
- ↑ D'autres produits sont en phase d'étude, mais ne sont pas encore au point complètement, il s'agit de Panneaux Isolants sous Vide (P.I.V.). Ils pourraient réduire d'un facteur 3 ou 4 l'épaisseur équivalente, produits d'un futur proche, mais pas compétitifs sur le plan économique avant un bon moment.
- ↑ le monomur est en général réservé au neuf, mais il y a au niveau de l'isolation de grandes différences ; un mur de 40 cm en ballots de paille (R >= 6) isole 3 à 4 fois plus qu'un monomur en briques spéciales alvéolées de la même épaisseur (Ru=1,87 ; Ks=0,48). D'autre part la fabrication du mur en brique aura produit pas mal de CO2 alors que le mur en paille (qui est presque toujours associé à une ossature bois) va au contraire en immobiliser (puit de carbone).
- ↑ des guillemets car le mot naturel comme le mot bio sont parfois discutables, par exemple le matériau de base de la laine de roche (basalte) est aussi naturel que le lin ou le chanvre, mais les quantités de résines synthétiques ajoutées aux laines végétales (15 à 25 %) sont bien supérieures à celles des laines minérales (env 5 %). Autre exemple, une des briques pour monomurs s'appelle « biobrique », mais a subi une cuisson industrielle classique).
- ↑ si tu chauffes uniquement au bois, l'impact de ton choix affectera surtout ton porte-monnaie (presque neutre sur le plan CO2), le travail que tu auras et le potentiel énergétique de ta propriété ou de ta région, mais si tu chauffes au fossile ou au nucléaire, tu affectes la planète et son futur.
Notes diverses
modifier- Béton cellulaire : lambda = 0.40 à 0.55
- Béton de chanvre : lambda = 0.09 à 0.13
- Laine de bois en panneaux (hofatex therm) : lambda = 0.038
Auteur de la version initiale : Roland CHARLOU OCT 2006.