Commentaire de la Fondation de la métaphysique des mœurs

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Commentaire de la Fondation de la métaphysique des mœurs d'Emmanuel Kant

Traduction du titre modifier

Tout d'abord, une remarque sur le titre : en allemand, Kant utilise le mot Grundlegung qui évoque l'acte par lequel on fonde, par opposition au fondement (Grundlage). Les anciennes traductions (et il en existe au moins quatre) rendent le titre par Fondements, donc à tort. La traduction la plus récente, celle de A. Renaut que nous suivons ici, rend plus justement le titre par Fondation.

Introduction : la métaphysique dans l'œuvre de Kant modifier

Double importance de l'œuvre modifier

La Fondation de la métaphysique des mœurs peut être doublement caractérisée. Publiée en 1785, elle prend place dans la période critique, et nous allons voir dans cette introduction l'importance de cette situation. C'est aussi la première œuvre de Kant consacrée à la morale et au fait moral : sa pensée à ce sujet, influencée par Wolf, était jusque-là encore inaboutie.

Son objectif modifier

L'objectif de l'œuvre est ainsi formulée par Kant : « Quant à ces Fondements, que je présente au public, ils ne sont rien de plus que la recherche et l’établissement du principe suprême de la moralité. »

Ce principe est le principe de détermination de notre volonté qui donne à notre agir sa valeur morale. Et cet objectif sera atteint par la fondation d'une métaphysique des mœurs qui : 1. doit être possible et : 2. mérite d’être fondée.

Il s'agit donc d'établir une métaphysique, et Kant cherche à justifier son projet, en se répétant d'ailleurs dans la préface et au début de la première section :

  • nécessité d’une métaphysique des mœurs.
  • au point de vue pratique, rendre la morale susceptible d’être suivie et appliquée.
  • éclaircir le principe constitutif de la moralité.
  • la rendre applicable (pratique).

Quelle métaphysique ? modifier

Pourtant, dans une œuvre précédente, la Critique de la raison pure, Kant a, à première vue du moins, condamné la métaphysique. Pourquoi Kant parle-t-il tout de même de la nécessité d’une métaphysique des mœurs qui soit fondée ? se contredit-il ? En quel sens Kant revendique-t-il l’appréhension de la moralité par la métaphysique ?

Pour répondre à ces questions, voyons ce qu'est cette métaphysique dans la philosophie de Kant, c'est-à-dire dans la philosophie critique.

On peut d'emblée remarquer que le mot a chez Kant un sens flottant. Nous nous contenterons du nécessaire pour expliquer le sens du mot métaphysique dans l'expression métaphysique des mœurs.

Prise dans un sens général, la métaphysique est une connaissance procédant exclusivement de la raison pure. Et, en un sens large, la raison est la faculté de former des principes a priori, autrement dit indépendamment de toute expérience. L'A priori désigne la modalité de constitution des principes ; c'est cette modalité, autrement dit cette manière, qui est indépendante de l'expérience. Aussi les éléments qui entrent dans les principes peuvent-ils venir de l’expérience, sans affecter leur caractère a priori.

Maintenant, si ces principes sont des principes de connaissance, alors la raison pure est dite théorique.

Et si ces principes a priori déterminent ce qui doit être, la raison pure est dite pratique.

La métaphysique serait donc une connaissance par la raison pure, au sens que nous venons d'indiquer.

Or, c'est cette connaissance que la Critique de la raison pure paraît ruiner complètement. Mais ce n’est pas si évident : le but de Kant était peut-être de condamner un certain usage stérile de la raison en dehors de l’expérience, et c'est cette partie de la métaphysique qui est ruinée. Dans ce dernier cas, la métaphysique (et nous voyons le sens flottant que le mot peut avoir chez Kant) est la connaissance spéculative de la raison qui s’élève au dessus des enseignements de l’expérience par de simples concepts.

Kant a effet constaté l'embarras des métaphysiciens : la métaphysique purement spéculative est une activité intellectuelle d’où il ne sort aucune connaissance certaine à partir desquelles on pourrait en construite d’autres, elle est improductive et son histoire est un perpétuelle recommencement.

Mais la philosophie critique consiste à faire la critique du pouvoir de la raison et à en montrer les illusions, afin d'établir les limites et les conditions de connaissance pure rationnelle. Dans ce contexte, la question de Kant est : quelque chose comme la métaphysique est-elle possible ? et sa réponse consiste à faire la critique du pouvoir de la raison par rapport à toutes les connaissances auxquelles elle peut aspirer indépendamment de toute expérience. Il ne s'agit donc pas pour Kant de ruiner la métaphysique, mais d'en sauver l’honneur : toute métaphysique n’est pas nécessairement condamnée.